SOMMET + Washington impose un élargissement « a minima » de l'Otan

Trois ou cinq ? Tel est le dilemme qui a dominé, hier à Madrid, le sommet de l'Otan, destiné à prendre la décision historique d'élargir l'organisation vers l'Est. Un sommet qui a donné lieu à des divergences sans précédent dans un tel conclave. Comme il était à prévoir, les Etats-Unis ont finalement imposé leur position, en limitant à trois le nombre de candidats admis à la « première fournée » d'adhésions : la Hongrie, la Pologne et la République tchèque, dont l'intégration devrait devenir effective en avril 1999. La Roumanie et la Slovénie devront donc attendre. Quant à l'autre thème clé de cette réunion, la réforme de la structure militaire de l'Alliance et l'intégration en son sein de la France et de l'Espagne, sa résolution a également été repoussée à plus tard. Dissensions. Les dissensions entre alliés sont rapidement apparues au grand jour, lorsqu'il fallut suspendre, pour consultation, la réunion plénière peu après son inauguration. Jacques Chirac s'est livré à une vigoureuse défense de l'adhésion de la Roumanie, un pays qui « a fait un choix clair en faveur de la démocratie et de l'économie de marché » et « a réglé les conflits séculaires qui l'opposaient à certains de ses voisins ». Appuyée par plusieurs pays méditerranéens, la France a fait valoir que, en oubliant l'Europe du Sud, l'Alliance risquait de provoquer « un clivage entre Nord et Sud à un moment où s'efface la ligne de fracture entre Est et Ouest ». De source française, on assurait qu'une majorité de pays (neuf contre sept, précisaient certains) étaient disposés à un élargissement à cinq. En vain : les Etats-Unis ont fait valoir que la règle du consensus obligeait à se ranger au plus petit dénominateur commun. Adopté après de longues discussions, le compromis attribue à la France un prix de consolation en citant explicitement, dans une formule alambiquée, la Roumanie et la Slovénie, mais aussi les pays baltes, comme candidats à la « seconde vague » d'adhésions et en mentionnant la date de 1999 comme début possible de ce nouveau processus de négociation. Intraitable. A propos de la réforme de la structure militaire intégrée, les difficultés restent également entières. Dès lundi soir, Bill Clinton s'était montré intraitable face à la revendication de voir passer à des mains européennes le commandement de Naples, dans la mesure où « les Etats-Unis ne doivent pas abandonner le contrôle de la sixième flotte » (basée en Méditerranée), qui représente l'un des actifs militaires américains les plus importants à l'étranger. « Si nous restons où nous en sommes aujourd'hui, nous ne sommes pas disposés à changer de position », a rétorqué Jacques Chirac, qui a subordonné l'adhésion de la France à la structure militaire intégrée aux « progrès que nous pourrons réaliser dans la voie d'un partage plus légitime des responsabilités » au sein de l'Alliance. « Les raisons qui ont motivé la création de l'Alliance ayant en grande partie disparu, l'organisation ne survivrait pas durablement à une relation euro-américaine déséquilibrée, qu'il s'agisse du partage du pouvoir au sein de la structure militaire ou du processus de décision politique », a-t-il ajouté. Dans ce contexte, l'Espagne, pourtant désireuse d'annoncer sa complète intégration dans le cadre de ce sommet, a reconnu que les « difficultés techniques » l'obligeraient à repousser elle aussi cette annonce à plus tard, vraisemblablement à décembre. La « nouvelle Alliance » censée naître au sommet de Madrid ne se présente guère, pour le moment, sous le signe de la concorde. Thierry Maliniak, à Madrid
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