Pékin joue du bâton politique et de la carotte économique

Etre porteur d'une pétition de 60.000 noms de personnes s'opposant à la dissolution de l'assemblée législative de Hong Kong, prévue l'an prochain, n'était pas de nature à impressionner le gouvernement chinois. Hier à Pékin, les sept délégués de Hong Kong, emmenés par le député Andrew Cheng, ont été accueillis par un commando qui les a renvoyé par le premier vol, non sans avoir confisqué leurs documents de voyage. Commentaire de Martin Lee, le président du Parti démocrate : « A l'évidence, la Chine ne souhaite pas entendre le point de vue de la population de Hong Kong... Mauvais présage pour l'avenir. » Signe des temps, Pékin a pourtant aussitôt associé à la fermeté politique un nouveau signe d'ouverture économique. Le vice-gouverneur de la Banque Populaire de Chine, Chen Yuan, a souligné qu'après le retour de Hong Kong sous souveraineté chinoise, « deux sociétés différentes continueraient à avoir deux politiques monétaires, deux devises et deux administrations financières différentes ». La banque centrale n'aura d'ailleurs pas de bureau à Hong Kong, a-t-il promis. Le PC chinois, qui fêtait hier son soixante-quinzième anniversaire, continue donc de poursuivre un exercice délicat mais qui, insiste-t-on à Pékin, n'a rien de contradictoire : la stabilité et l'efficacité du pouvoir central est la condition d'une réforme réussie de l'économie. C'est ainsi que Pékin vient de décider de la création de six « bureaux administratifs régionaux » destinés à surveiller les activités des cadres provinciaux, dans les domaines politiques et économiques. Une manière de réduire le mandarinat provincial, alors que la corruption dans les administrations est devenue monnaie courante. Les bureaux régionaux auront aussi la charge de superviser la production céréalière et le versement des impôts dans les provinces concernées. L'exode rural - qui concerne quelque 70 millions de paysans chaque année - est désormais l'une des priorités de Pékin. Résultat, selon le ministère du Travail : la Chine comptera 153 millions de chômeurs d'ici à l'an 2000. L'arrivée de nouveaux investisseurs étrangers ne suffit plus à résoudre le problème de l'emploi et à compenser la mise à pied de millions d'ouvriers. L'annonce, dimanche, d'un recul en rythme annuel de 7,1 % des exportations chinoises de janvier à mai 1996 ajoute à l'inquiétude ambiante. Tout cela n'a pas empêché le président, Jiang Zemin, de recommander vivement hier la poursuite du développement de « l'économie de marché socialiste », chère à Deng Xiaoping. Indice supplémentaire de la modernisation de l'économie, la Chine employait à la fin de l'an dernier davantage de main-d'oeuvre dans les services (24,8 % de la population acive) que dans l'industrie (23 %), selon une étude publiée hier par le journal China Securities. Une majorité de 52,2 % consacre toujours son travail à l'agriculture, mais cette proportion a reculé de 7,8 % sur la période 1991-1995, selon la même source. Thierry Arnaud et Philippe Le Corre, à Hong Kong
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