Les sociétés de gestion indépendantes en pleine réflexion

Les chiffres sont parlants : face à des encours de produits monétaires en augmentation de 58 milliards d'euros en 2008, à 487 milliards d'euros, ceux des fonds actions chutaient sur la même période de 143 milliards d'euros, à 190 milliards d'euros. La crise boursière de la fin de l'année 2008 est passée par là. Et une telle baisse pourrait avoir des conséquences non négligeables sur certains acteurs de la gestion d'actifs en France.Les sociétés de gestion indépendantes pourraient se trouver fragilisées par une telle situation. Excepté certaines maisons comme Carmignac Gestion, qui affiche une santé insolente avec une collecte nette de 3 milliards d'euros en 2008, la plupart des indépendants ont vu leurs actifs fortement baisser. C'est le cas de Tocqueville Finance, qui a perdu 40 % de ses actifs liés à des sorties, ou encore, à la Financière de l'échiquier, qui a vu fondre les siens de 50 % en 2008 avec une forte décollecte. Mais « notre métier est d'investir dans des actions, actif liquide par excellence. Nous avons été des victimes collatérales de la crise de liquidités », souligne Didier Le Menestrel, président de la Financière de l'échiquier.Malgré cela, les sociétés de gestion indépendantes, plus encore que les filiales de banques ou de compagnies d'assurances, doivent aujourd'hui faire face à une situation que peu d'entre elles ont connue jusqu'ici. Portées par des marchés boursiers en hausse constante depuis des années, beaucoup de sociétés se sont créées ces dix dernières années. Mais aujourd'hui, bon nombre d'entre elles doivent s'adapter à la nouvelle donne. Certes, « une société de gestion indépendante a une très grande capacité d'adaptation face à la demande du march頻, comme l'indique Didier Le Menestrel, mais aujourd'hui certaines sont plutôt confrontées à une réflexion stratégique.À commencer par la structure des coûts. En jouant sur les salaires, les loyers ou encore le poids des prestataires externes dans les coûts fixes, les sociétés de gestion peuvent réduire leurs dépenses. En pratique, même si certains comme Tocqueville ont ajusté les coûts fixes en stoppant certaines fonctions supports, peu de sociétés ont osé toucher aux salaires et encore moins aux bonus (lire encadré).quel business model ?Mais c'est avant tout une réflexion sur leur business model qui doit être entamée. La diversification semble être le maître mot face à des modèles « mono-tout » (monoproduit, monomarché, monoclientèle). Ainsi, pour Marc Renaud, qui a lancé Mandarine Gestion il y a un an, « nous avons dès le départ joué la carte de la diversification de clientèles et des compétences sur les produits. Et même si les conditions de marché nous ont retardé dans la mise en place de ce business model, nous n'allons pas changer notre stratégie pour autant ». Car c'est bien vers ce modèle que tendent de plus en plus de sociétés de gestion. Certaines, comme Sycomore Asset Management (SAM), ont déjà commencé. « Si nous restons spécialisés sur les actions, nous cherchons aussi à faire évoluer les stratégies sur lesquelles nous intervenons. Ainsi, nous avons recruté deux gérants afin de travailler sur un fonds market neutral avec une approche quantitative », explique Laurent Deltour, associé fondateur de SAM. Un rééquilibrage que beaucoup de sociétés visent et ce, même si chaque segment de clientèle a ses propres exigences, notamment en termes de marketing. Tocqueville souhaitait l'an dernier renforcer ses équipes dédiées aux investisseurs institutionnels, mais elle semble vouloir désormais miser sur un segment de clientèle plus proche de son histoire, à savoir la gestion privée. De son coté, Christophe Chouard, directeur général de HDF Finance, souligne que « nous préférons nous concentrer sur ce que nous savons faire le mieux, à savoir la sélection de hedge funds. Et même si nous restons spécialisés, nous cherchons à diversifier notre base de clientèle ».Une diversification qui pourrait se présenter avec les opportunités créées par la crise. Car même si pour Marc Renaud « peu de sociétés de gestion vont faire faillite, beaucoup d'entre elles sont déstabilisées ». Cela représente un vivier important pour les prédateurs. En effet, la crise actuelle pourrait bien déboucher sur une consolidation du secteur, qui paraît inévitable. Les premiers signes d'une restructuration du secteur se sont déjà fait sentir avec le sauvetage de Richelieu Finance par KBL, le rachat d'ADI par OFI et récemment le rapprochement de CAAM et SGAM. approche pragmatiqueAujourd'hui, des opportunités pourraient se présenter pour les sociétés indépendantes, mais c'est bien l'opportunisme qui prime sur l'effet de taille. Tous regardent les dossiers qu'on leur présente, mais avec une approche pragmatique. À la Financière de l'échiquier, « nous ne cherchons pas à acheter des actifs mais plutôt à nous associer des gestionnaires de talent ». Ce point de vue est partagé chez SAM puisque « nous restons opportunistes. Il y aura des cibles potentielles, mais nous cherchons avant tout de bons gérants plus que des structures ». De la même manière chez HDF « nous ne cherchons pas activement, mais nous restons ouverts aux dossiers qui pourraient nous offrir une diversification de clientèle ». Le rapprochement CAAM-SGAM laissera des gérants sur le carreau, qui intéresseront peut-être les indépendants ou qui oseront se lancer dans l'aventure entrepreneuriale.
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