Les marchés réclament de l'audace à la BCE

La Banque centrale européenne aura-t-elle le même culot que certaines de ses homologues à travers le monde qui ont osé des baisses de taux de 100 points de base d'un coup, comme la Banque de réserve australienne mardi, voire de 150, le montant consenti le mois dernier par l'intrépide Banque d'Angleterre. C'est peu probable, si l'on en croit le panel de l'agence Dow Jones Newswires. Trente et un des 46 économistes interrogés prévoient une détente d'un demi-point des taux à l'issue de son conseil ce jeudi, soit le même montant que le mois précédent et que lors de l'opération concertée de cinq instituts d'émission le 8 octobre, ce qui ramènerait son taux directeur de 3,25 % à 2,75 %. Ils ne sont que 12 à avancer l'hypothèse d'un assouplissement plus agressif de trois quarts de point, à 2,50 %, qui serait le premier d'une telle agressivité au cours des dix ans d'existence de la BCE. Hors panel, on trouve même quelques idéologues pour prédire 100 points de base, bien que ce ne soit pas dans la culture de la banque centrale de Francfort de risquer de se retrouver à court de munitions. C'est ce que laissait récemment entendre Lorenzo Bini Smaghi, l'un des membres du directoire de la BCE.Holger Schmieding, le stratège Europe de Bank of America, fin limier de la BCE, estime que la situation catastrophique de l'économie de la zone euro nécessite une détente monétaire hors norme, et table sur trois quarts de point de baisse, après l'annonce hier d'une chute sans précédent de l'indice des directeurs d'achats. L'indice PMI composite (regroupant les secteurs manufacturiers et des services) est en effet tombé de 43,6 en octobre à 38,9 en novembre. Dans ces conditions, il sera difficile à Jean-Claude Trichet de justifier que c'est « business as usual » (les affaires continuent comme d'habitude), explique-t-il. Et d'ajouter qu'avec un taux directeur de 3,25 %, la BCE est loin d'avoir grillé ses cartouches. inversion de la courbe «?Refuser de tirer alors que l'ennemi se rapproche, ne constituerait pas une issue heureuse pour un western-spaghetti », conclut l'économiste. Alors de l'audace, que diable, Monsieur Trichet, disent même ses thuriféraires. Les rendements longs lui ouvrent d'ailleurs la voie?: depuis début décembre, les taux allemands à dix ans sont inférieurs au taux directeur de la BCE de 3,25 % ? ils se sont attaqués au seuil de 3 % hier ?, provoquant une inversion de la courbe des taux de mauvais augure.La Banque d'Angleterre, qui donnera également ce jeudi son verdict, devrait avoir la main moins lourde qu'en novembre, où elle avait fait passer ses taux en dessous de ceux de la BCE pour la première fois depuis la naissance de l'euro, à 3 % contre 3,25 %. Sur les 20 économistes interrogés par Dow Jones Newswires, 10 attendent une baisse d'un point entier de pourcentage, tandis que les 9 autres misent sur l'option d'un demi-point et qu'un dernier opte pour trois quarts de point. Une baisse d'un point entier ferait tomber le rendement de la livre au plus bas depuis 1939. La Banque pourrait tout à fait récidiver en consentant une détente de 1,50 point de pourcentage ou même plus, déclarait mardi Willem Buiter, ancien membre de son conseil, si elle ne craignait pas que « la livre sterling s'écroule littéralement ». Laquelle livre est déjà l'une des monnaies sinistrées du système monétaire international. nIsabelle Croizard
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