Fantômes scandinaves

Après Stieg Larsson et sa flamboyante trilogie Millenium, ou Arnaldur Indridason et ses envoûtantes enquêtes islandaises, le rayon polar de nos librairies s'enrichit de deux nouvelles signatures qui devraient connaître un beau succès. À ma gauche, le Norvégien Knut Faldbakken, 68 ans, auteur déjà consacré dans son pays, qui s'est reconverti au roman policier sur le tard. Les éditions Le Seuil publient « l'Athlète », le premier volume d'une série policière prometteuse. À ma droite, le Suédois Johan Theorin, 46 ans, dont Albin Michel propose la traduction de son premier roman « l'Heure trouble », qui a décroché en 2007 le prix du meilleur roman policier suédois.brillante intrigueLes deux auteurs ont en commun de plonger les racines de leur intrigue au c?ur de la Seconde Guerre mondiale dont les fantômes hantent encore de nombreuses mauvaises consciences. Chez Faldbakken, c'est l'occupation allemande et la collaboration active des nazis locaux qui sont à l'origine d'une série de meurtres, soixante ans plus tard, dans une petite ville norvégienne. Chez Theorin, c'est l'arrivée sur une île de la Baltique de deux déserteurs allemands du front russe, qui va bouleverser le destin de Nils Kant.Johan Theorin a conçu une brillante intrigue dans « l'Heure trouble », alternant le récit de la vie tumultueuse de cet homme violent et impulsif et la quête de vérité d'une femme brisée par la disparition de son enfant. Le romancier suédois jongle avec la chronologie et les personnages avec virtuosité. Il ne laisse aucun répit au lecteur happé par cette histoire de vengeance, d'avidité et de conflits familiaux. Au passage, Theorin dresse une saisissante galerie de portraits d'êtres cassés par la vie. Il décrit avec nostalgie les superbes paysages de lande sauvage de l'île d'Oland au sud-est de la Suède.une enquête déroutanteLa construction du roman de Knut Faldbakken est plus classique et plus sobre, mais tout aussi efficace. Dans « l'Athlète », il s'est inspiré de sa ville natale de Hamar, au nord d'Oslo, pour décrire une communauté de retraités confrontée à une série de meurtres mystérieux qui fissure la façade de respectabilité de cette petite cité endormie. Knut Faldbakken mêle humour noir et analyse psychologique pour dépeindre l'atmosphère étouffante de puritanisme et de désirs inassouvis de ces petits bourgeois en mal de sensation. Le romancier dresse un étonnant portrait d'une femme desséchée sur place, un être aigri par l'absence d'amour. Élise Valmoe vit seule dans une vaste demeure familiale aux lourdes tentures masquant un superbe tableau du Christ après sa descente de croix qui, tel l'athlète de ses rêves, aiguise sa libido débridée. Une enquête déroutante pour le fragile inspecteur Valmann, nouvelle figure attachante du polar norvégien. n « L'Heure trouble », de Johan Theorin. Albin Michel, 430 pages, 19,50 euros.« L'Athlète », de Knut Faldbakken. Seuil Policiers, 364 pages, 22 euros. À lire aussi : « Hiver arctique », d'Arnaldur Indridason. Éd. Métailié, 336 pages., 19 euros.
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