Des interventions publiques de plus en plus massives

Quatorze mois après le début de la crise, ses conséquences pour les banques dans le monde remettent en cause le modèle que l'on croyait établi. L'intervention des pouvoirs publics britanniques puis américains a démontré que le pragmatisme, en temps de crise majeure, passait outre les grands principes du marché. Ainsi, lorsque l'État allemand a, dès août 2007, annoncé son intention de maintenir à flot la banque privée IKB, personne n'anticipait le feuilleton qui se solderait, selon le Frankfurter Allgemeine Zeitung, par un coût de plus de 9 milliards d'euros.UNE MARQUE DE FABRIQUEMais le véritable tournant de la crise, celui qui frappera les esprits, est l'intervention, après plusieurs jours d'atermoiements, de la Banque d'Angleterre, pour sauver Northern Rock. Devant la panique qui débute aux guichets et la colère qui se propage dans le pays, la banque centrale se résout le 17 février à nationaliser la banque et à lui prêter 24 milliards de livres. Un mois plus tard, c'est de l'autre côté de l'Atlantique que les pouvoirs publics interviennent pour sauver une banque, et non des moindres. Refusant qu'une banque d'affaires, Bear Stearns, ne soit victime d'une faillite, la Réserve fédérale demande à JP Morgan d'intervenir pour reprendre la banque, lui prêtant main-forte en prenant à sa charge la garantie de 30 milliards de dollars d'actifs à risque. Ce scénario mariant influence de la puissance publique (Réserve fédérale ou Trésor) et intervention privée deviendra une marque de fabrique, réitérée à plusieurs reprises en septembre. Dans le cas de Merrill Lynch, la Fed s'est mobilisée pour lui trouver un repreneur (Bank of America), avant que la banque n'aille trop mal. En revanche, elle a laissé Lehman Brothers et Washington Mutual faire faillite puis a fait le nécessaire pour qu'elles soient reprises partiellement, par Barclays et Nomura, d'un côté, et JP Morgan, de l'autre. Les Américains investiront massivement dans trois établissements seulement. Le 7 septembre, L'État prend le contrôle de Freddie Mac et Fannie Mae, se disant prêt à injecter en capital jusqu'à 200 milliards de dollars. Une semaine plus tard, la Fed ne pouvant se résoudre à voir disparaître le premier assureur américain, consent à prêter 80 milliards de dollars à AIG en échange d'une participation de 80 % au capital. Enfin, le 3 octobre, le Congrès américain vote le fameux plan Paulson prévoyant la mise à disposition des banques de 700 milliards de dollars pour éviter un risque systémique.Alors qu'au même moment les Européens ne parviennent pas à se mettre d'accord sur un plan similaire, les États du Benelux se résolvent à nationaliser partiellement leurs deux fleurons nationaux, Dexia d'abord, puis Fortis .Le cas d'école japonais...Il a fallu attendre 1998 pour assister à la nationalisation en catastrophe de Long Term Credit Bank. Dans son sillage a été créé un fonds de recapitalisation des banques doté de près de 330 milliards d'euros, soit 7 % de l'encours des banques nippones de l'époque. Il a encore fallu attendre 2001 pour que le gouvernement Koizumi instaure un traitement de choc des banques dont un bon nombre ont sombré corps et biens. Pendant dix ans les banques ont été maintenues sous perfusion par un environnement de taux d'intérêt très bas qui les a conduites à accumuler les mauvaises dettes bien après le déclenchement de la crise. Aujourd'hui encore la consommation reste atone et le Trésor japonais est devenu le premier emprunteur de la planète (180 % du PIB)... Et le suédois Le sauvetage des banques suédoises en 1991 reste la référence inégalée. Pourtant le challenge était de taille. Les créances douteuses ont représenté 12 % du PIB quand les prix de la pierre se sont effondrés. De manière consensuelle le gouvernement a créé un organisme indépendant, la Bank Support Authority. Cette structure de cantonnement des actifs sulfureux n'a repris ceux-ci qu'à la condition de la nationalisation des banques qui la sollicitait. En parallèle, la banque centrale suédoise a mis à la disposition des banques du pays ses propres réserves en devises étrangères. L'effort de l'État suédois a culminé à 6% du PIB, mais le coût final n'a pas dépassé 2,1 %. Et la récession, si elle n'a pas été évitée, n'a duré que vingt mois.
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