« L'IASB n'a aucune intention d'étendre la juste valeur à tous les actifs financiers »

Philippe Danjou fait le point sur le travail de l'entité qui édicte les normes comptables IFRS, en vigueur en Europe depuis 2005. De leur côté, les associations des professionnels et directeurs de comptabilité et gestion (APDC) et des directeurs financiers et de contrôle de gestion (DFCG) ont apporté hier leur soutien à l'IASB dans un communiqué conjoint.Comment l'IASB va-t-il répondre à l'Ecofin, qui lui a demandé le week-end dernier à Prague d'éviter toute distorsion de concurrence avec les États-Unis sur la « juste valeur » (*)?? Remettons le débat dans son contexte. D'abord, ni le G20, ni le Forum de stabilité financière (FSF) n'ont appelé à abandonner la juste valeur pour les actifs destinés à être cédés. Mais la crise a mis en évidence le besoin d'aider les sociétés à évaluer la juste valeur dans des marchés peu liquides. Nous avons donc publié en octobre une note d'interprétation (« guidance »), relayée par les régulateurs français, qui précisait que dans ce cas, il faut une analyse plus poussée pour déterminer si les prix observés représentent ou non la juste valeur, et dans quelles conditions utiliser un modèle interne de valorisation. Le régulateur de marché (SEC) et le normalisateur (FASB) américains avaient développé des interprétations identiques. Malgré cela, les sociétés américaines et leurs auditeurs ont pu avoir tendance, pour se couvrir, à se fier au dernier prix observé, tirant les valorisations à la baisse. Mais en dépit des pressions politiques, le FASB a réaffirmé sa position initiale, en insistant sur l'importance pour les sociétés d'exercer leur jugement. Nous ne voyons donc pas de différence pratique entre cette nouvelle « guidance » et la nôtre.Comment comptez-vous tirer les leçons de la crise??Nous y travaillons d'arrache-pied, sur la base des recommandations du G20 et du rapport du FSF d'avril 2008. En octobre, nous avons permis les reclassements d'actifs, avec des obligations d'information sur l'impact en fonds propres et en résultat, ce qui a permis aux banques de limiter leurs pertes sans accroître la défiance des marchés. Sur les risques financiers, nous avons renforcé les obligations d'information sur les modalités d'évaluation de la juste valeur et la position de liquidité des sociétés. Nous travaillons avec le FASB à une refonte d'ensemble de la norme sur les instruments financiers. Nous réexaminerons ainsi l'asymétrie entre les dotations aux provisions et leur reprise, que je considère comme une anomalie. Mais aussi la pertinence et le champ d'application de l'option juste valeur. Nous comptons publier un projet conjoint dans un delai de six mois. J'en profite pour rappeler que, contrairement à certaines rumeurs, l'IASB n'a aucune intention d'étendre la juste valeur à l'intégralité des instruments financiers. Un modèle mixte (combinaison de coût amorti et de juste valeur) est mieux adapté pour décrire l'activité de la plupart des établissements financiers.Quid des problèmes liés au « hors-bilan » des banques??C'est un problème crucial ? sans doute plus que la juste valeur. Nous avons soumis à consultation deux projets de réforme. Le premier, sur les règles de consolidation, vise à regrouper les deux textes en vigueur en clarifiant les critères de consolidation, sans les remettre en cause fondamentalement. Le second vise à rationaliser et à préciser les conditions dans lesquelles des actifs financiers peuvent être sortis du bilan. Mais aussi de renforcer la transparence en demandant aux sociétés d'expliquer sur quel fondement elles sortent tel actif de leur bilan, et ce qui se passerait dans le cas contraire. Les investisseurs auront ainsi plus d'information sur les actifs placés en hors-bilan mais qui restent liés à l'émetteur, comme les véhicules de titrisation de créances, au c?ur de la crise. Propos recueillis parBenjamin Jullien (*) Méthode de comptabilisation des actifs au prix de marché et non au coût historique.interview de philippe danjou, membre DE L'INTERNATIONAL ACCOUNTING STANDARDS BOARD (IASB) Philippe Danjou est l'un des deux Français membres de l'IASB, qui en compte quatorze.
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