" Les autorités politiques et monétaires ont la situation sous contrôle... "

Le répit aura été de courte durée. La baisse des taux, décidée hier en concertation par cinq banques centrales, aura à peine réussi à enrayer le krach boursier. Quelques minutes seulement après l'annonce d'une réduction d'un demi-point des taux d'intérêt, la plupart des indices boursiers de la planète piquaient à nouveau du nez, témoignant de l'impuissance des autorités monétaires à reprendre le contrôle de la crise. " Si nous intervenons, c'est la crise, si nous n'intervenons pas c'est aussi la crise ", commente piteusement un expert au fait des décisions monétaires.POMPIERS GALONNESRien de nouveau : depuis l'éclatement de la bulle des subprimes, au printemps 2007, gouvernements et banquiers centraux ne cessent de courir après l'incendie. Pourtant, tous ces pompiers galonnés ne claironnaient-ils pas, il y a encore quelques mois, que, cette fois-ci, les coupe-circuit étaient désormais en place et que, contrairement à 1929, 1987 ou 1997, la situation était sous leur ­contrôle ? En clair, que la gouvernance mondiale allait anéantir la menace des tombereaux de dettes et réussir à préserver l'économie réelle. Double ­erreur : non seulement l'absence de coordination internationale, le retard des décisions ou encore la montée des égoïsmes nationaux auront réduit à néant l'efficacité de la gouvernance internationale, mais les économistes ne peuvent que constater aujourd'hui les méfaits de la contagion de la crise financière à l'économie réelle. Retour sur les trois lances à incendie ouvertes depuis le début de la crise par les argentiers de la planète. Les premiers à intervenir ont été les banquiers centraux, dès l'été 2007, via des injections massives de liquidités. Une réponse efficace mais très insuffisante.En réalité, il faudra encore attendre janvier 2008 pour que le patron de la Réserve fédérale, Ben Bernanke, accepte enfin de baisser substantiellement les taux d'intérêt. Bien vu, mais la décision arrive avec un temps de retard. Car, déjà à cette époque, le sujet la crise de l'endettement n'est plus cantonné au secteur des subprimes, mais s'étend à l'ensemble des crédits. Surtout, de l'autre coté de l'Atlantique, Jean Claude Trichet, gardien de l'euro, n'a qu'une seule aiguille sur sa boussole, celle de l'inflation : il lui faudra attendre plusieurs mois - et jusqu'à la semaine dernière - pour enfin reconnaître l'étendue de la crise et envisager une baisse des taux, réalisée finalement hier." Cette intervention était destinée à créer un choc de confiance, en soulageant notamment le système financier, mais l'ampleur de la baisse est restée limitée ", commente Florence Pisani, économiste chez Dexia AM. Deuxième étage de la gouvernance internationale, les réponses des États, qui ont péché jusqu'à présent par leur manque de coordination. Certes, les États-Unis ont fini par agir, sans pour autant délivrer les messages adéquats. Ainsi, non seulement la mise sous tutelle des agences financières Fannie Mae et Freddie Mac est intervenue tardivement (en septembre) mais, de surcroît, le Trésor a refusé de secourir la banque d'investissement Lehman Brothers, provoquant une forte interrogation sur la cohérence de sa politique d'aide au système financier en déroute. Quant au plan Paulson, destiné à éponger du système bancaire 700 milliards, il a finalement été adopté, mais après moult rebondissements politiques ayant mis en évidence la faible marge de manoeuvre de l'exécutif américain.L'Europe, elle, a surtout révélé son incapacité à délivrer une réponse commune efficace à la crise. En témoigne l'accord a minima auquel sont péniblement parvenus les Vingt-Sept mardi dernier sur la garantie des dépôts bancaires. On est loin d'un plan Paulson européen ! Enfin, les pays émergents assistent, en spectateurs passifs, au déroulement d'une crise qui s'étend chaque jour un peu plus loin. Reste le troisième échelon de la gouvernance, qui devrait se jouer en cette fin de semaine à Washington, à l'occasion des réunions du G7 et du Fonds monétaire international. Jusqu'à présent resté simple observateur de la crise, l'organisation née des accords de Bretton Woods devrait à cette occasion s'introniser le pompier en chef de la crise. Le plan concocté par Dominique Strauss Kahn devrait se décliner en deux temps. Tout d'abord, il devra mettre d'accord vendredi les sept ministres des pays du G7, Allemagne comprise, laquelle hésite pour l'instant à jouer collectif, comme elle l'a d'ailleurs montré avec ses partenaires européens. S'il parvient à ses fins, le directeur général du FMI tentera le lendemain de ­convaincre les 24 membres du Comité monétaire et financier du FMI d'adopter un plan anticrise en y associant les pays émergents, dont, au premier chef, les Chinois. Un nouveau mode de gouvernance internationale pourrait ainsi voir le jour dès le week-end prochain, sans doute plus adapté aux règles dictées par la mondialisation. Avec à la clé la possibilité d'un plan global pour faire face à la crise : à la veille de l'ouverture des réunions de Washington, la balle est désormais dans le camp du FMI.
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.