L'avenir d'Escada ne tient plus qu'à un fil

L'Allemagne s'apprête à voir disparaître un de ses mythes de l'après-guerre. La marque de prêt-à-porter de luxe Escada devrait vraisemblablement entamer dès aujourd'hui une procédure de faillite. Mardi, seuls 46 % des détenteurs d'une obligation émise en 2005 de 200 millions d'euros ont accepté d'échanger leurs titres pour des titres d'une valeur réduite aux deux tiers. Ce plan, qui devait obtenir l'accord de 80 % des investisseurs concernés, était la condition nécessaire à une future recapitalisation, devenue donc quasi impossible. Hier, l'action a perdu plus de la moitié de sa valeur (- 57,5%) en finissant à 0,70 euro.Cet épilogue n'a guère surpris outre-Rhin, mais il laisse un goût amer. Car Escada avait réussi à s'imposer dans un monde de la mode où les Allemands sont rares. Créée en 1976 par la modèle munichoise Margaretha Ley et son mari Wolfgang, la marque a connu son heure de gloire dans les années 1980, séduisant des vedettes comme Kim Basinger ou la princesse de Galles, grâce à ses collections colorées. En 1986, le groupe couronne ses succès par une entrée en Bourse. L'action vaut alors près de 110 euros. Mais la mort de Margaretha en 1992 brise le conte de fées.des actifs bradésBientôt, les nouvelles collections sont délaissées et Wolf-gang Ley multiplie les erreurs de gestion. En voulant faire d'Escada un géant du luxe, il se diversifie tous azimuts, rachète des marques, lance des projets coûteux et démesurés comme un centre logistique ou des magasins immenses dans des hauts lieux du luxe. Bientôt, les liquidités commencent à manquer et la rentabilité s'étiole. En 2006, Wolfgang Ley doit partir. Ses deux successeurs, Frank Rheinbolt et le Français Jean-Marc Loubier, ancien de LVMH, ne peuvent rien contre la désaffection du public envers les collections. D'autant que le groupe est déstabilisé par les spéculations boursières qui l'entourent régulièrement. Escada passe alors dans le rouge : 27 millions d'euros de pertes nettes en 2007, 70 millions un an plus tard. En juillet 2008, les actionnaires du groupe de café Tchibo, les frères Herz, rachètent 25 % du groupe et nomment Bruno Sälzer, l'artisan du succès d'une autre marque de luxe allemande, Hugo Boss, à la tête d'Escada. Ce dernier réduit les coûts, vend des marques périphériques, tente de relancer l'attrait des collections. Mais la crise a raison de ses efforts, les ventes s'effondrent et les actifs vendus sont bradés. Son plan, qui a échoué mardi, était celui de la dernière chance. Escada devra désormais sans doute sortir de scène. n
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