Le marché monétaire se détend enfin

Enfin ! Pour la première fois depuis quatre semaines, les tensions semblent vouloir s'apaiser sur les marchés monétaires. L'Euribor à 3 mois, un des taux du marché interbancaire de la zone euro les plus regardés - il s'agit en fait de la moyenne des taux auxquels les cinquante-sept établissements bancaires les plus actifs de la zone euro déclarent se prêter des fonds -, a confirmé hier la décrue entamée vendredi. Il s'était alors infléchi de 5,39 % - son plus haut niveau depuis 1994 - à 5,38 %. Lundi, il s'est franchement détendu à 5,32 %, après la réunion de l'Eurogroupe. Les professionnels veulent y croire : sur 27 traders interrogés par Reuters, 20 estiment que le pic des taux Euribor est passé.Après plus d'un an de crise, plus d'un mois d'enlisement et une semaine cauchemardesque, les observateurs du marché monétaire ont toutefois du mal à faire preuve d'un optimisme démesuré. " Les réactions de marché montrent que les décisions prises vont dans le bon sens mais certainement pas que les opérateurs considèrent que la crise est terminée ", signale Patrick Jacq, stratégiste demarché chez BNP Paribas.De l'avis général, il s'agit au mieux du début de la fin de la crise : il faudra du temps avant que la confiance revienne et que les institutions financières consentent à nouveau à se prêter mutuellement des fonds. La convalescence durerait aussi longtemps que la crise elle-même, estiment même certains stratégistes. Hier, continuant à thésauriser la liquidité plutôt que de la faire circuler, les banques ont d'ailleurs déposé un nouveau montant record (155 milliards d'euros) auprès de la BCE.RISQUE DE SUREVALUATION DES TAUXLes banques centrales ne s'y sont pas trompées et elles continuent à se doter de nouveaux outils pour abreuver le marché de liquidités. Lundi, la Réserve fédérale américaine (Fed), la Banque centrale européenne (BCE), la Banque d'Angleterre (BoE) et la Banque Nationale Suisse (BNS) ont annoncé qu'elles fourniront aux banques commerciales toutes les liquidités en dollars dont elles ont besoin à un taux d'intérêt fixe. Jusqu'ici celui-ci était déterminé à l'issue d'une adjudication et, lorsque la demande était très forte, il pouvait atteindre des niveaux totalement aberrants au regard des taux directeurs fixés par les banques centrales. À partir du mercredi 15 octobre, la BCE, la BoE et la BNS organiseront toutes les semaines des apports en liquidités en dollars à 1 semaine, en plus des opérations à 28 et à 84 jours qui existent déjà. Quant à la Banque du Japon, elle a déclaré envisager des mesures similaires.Plusieurs forces de rappel pourraient cependant freiner la décrue des taux du marché interbancaire. Ainsi, avant 2009, il y a peu de chances pour que celle-ci soit réellement significative. D'abord, avec l'approche de la fin de l'année et des clôtures de comptes, les besoins en liquidités des institutions financières resteront colossaux. Quant aux fonds monétaires, les principaux apporteurs de liquidité du marché interbancaire, ils mettront du temps à revenir. " Après s'être laissé piéger par les actifs toxiques, ils risquent d'avoir du mal à renoncer à la sécurité des T-bills ", explique Patrick Jacq. Enfin, les banques pourraient être tentées de surévaluer les taux auxquels elles déclarent prêter à leurs consoeurs (ceux qui sont retenus pour le calcul de l'Euribor). Un moyen facile de protéger leurs marges, la majorité des prêts commerciaux de la zone étant indexés sur l'Euribor.Mesures d'adaptation des normes comptablesLes quatre autorités de supervision des services financiers en France (Autorité des marchés financiers, Commission bancaire, Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles et Conseil national de la comptabilité) se réunissent aujourd'hui à la demande des gouvernements français et allemand pour " apporter des clarifications nécessaires pour l'arrêté des comptes ". Cette réunion fait suite au sommet de l'Eurogroupe de dimanche qui avait appelé à un assouplissement du système comptable actuel d'évaluation des actifs à la valeur de marché accusé d'accélérer la chute des marchés boursiers et impraticable pour les actifs devenus illiquides. L'objectif est de permettre aux banques de revoir leurs comptes de manière rétroactive pour le troisième trimestre 2008. Cette initiative, conduite en parallèle dans d'autres pays en Europe dont l'Allemagne, se situe dans le prolongement des déclarations des autorités comptables internationales (International Accounting Standards Board) et américaines (Financial Accounting Standards Board et Securities and Exchange Commis- sion) concernant notamment la norme IAS 39 et le recours à des estimations lorsque le marché n'est plus en mesure de fournir une indication de prix. L'IASB devait, selon nos informations, officialiser hier soir, ou au plus tard aujourd'hui, une mesure d'assouplissement pour permettre aux banques un reclassement comptable de leur portefeuille de prêts et de créances.
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