Sarkozy ménage Medvedev

Pour le premier sommet Europe-Russie après la guerre de la Géorgie de cet été, Nicolas Sarkozy a pris le soin, dans son rôle de président en exercice du Conseil européen, de ménager le président russe Dmitri Medvedev. Le président français était accompagné hier à Nice par le président de la Commission, José Manuel Barroso, et le haut représentant de la politique étrangère de l'Union, Javier Solana, pour recevoir l'homme fort du Kremlin. L'heure n'était en effet pas aux dissensions à la veille du sommet du G20 qui se tient aujourd'hui samedi à Washington sur la réforme du système financier international tant souhaité par Nicolas Sarkozy. L'important était donc de pouvoir sceller une alliance euro-russe pour pouvoir peser sur le sommet de Washington appelé à ouvrir le processus d'un « nouveau Bretton Woods ». Et Nicolas Sarkozy de jubiler : « Je crois pouvoir dire que les propositions russes, techniques, financières, économiques, sont de grande qualité et qu'elles se rapprochent beaucoup des propositions européennes », s'est-il félicité en rendant compte des travaux du sommet Europe-Russie. De son côté, Dmitri Medvedev a observé que les deux parties allaient défendre à Washington des « positions pratiquement identiques ».Ce rapprochement sur la crise financière devrait alimenter la volonté des Européens et des Russes de surmonter les tensions nées de l'intervention militaire russe en Géorgie en août, qui s'était soldée par le gel des négociations sur un futur partenariat stratégique entre les deux parties. Les ministres des Affaires étrangères de l'Union qui s'étaient réunis en début de semaine à Bruxelles pour préparer le sommet bilatéral de Nice s'étaient mis d'accord pour que ce nouveau partenariat soit à nouveau remis sur la table. Même si la condition qu'ils avaient initialement posée ? le retour de l'armée russe à ses positions d'avant le conflit ? n'a pas été totalement respectée. « Il faut continuer le dialogue. Il n'y a pas d'autre solution », a observé le ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner.Il est vrai aussi qu'à la veille du sommet bilatéral de Nice, les Russes ont multiplié les gestes de conciliation. Dmitri Medvedev a par exemple indiqué ? sans toutefois rien promettre ? qu'il pourrait renoncer au déploiement de missiles Iskander dans l'enclave de Kaliningrad en réponse au bouclier antimissiles américain installé en Pologne. Ou encore le premier ministre Vladimir Poutine a accepté de retarder d'un an la hausse brutale de 300 % des taxes à l'exportation de bois brut russe vers l'Europe, qui devait être imposée au 1er janvier 2009. Ces taxes auraient durement touché la sylviculture finlandaise et suédoise. Le délai satisfait partiellement les Scandinaves, qui espèrent avoir le temps de négocier un accord ou de se retourner.Cependant, la question qui préoccupe principalement le monde des affaires russe est celle de la résistance européenne à l'entrée de la Russie dans l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Le nouvel accord de partenariat stratégique revitalisé à Nice semble fortement lié à cette question puisque 30 % des points de ce projet correspondent à des normes OMC. Dmitri Medvedev a réitéré que son pays s'engageait à rejoindre l'OMC, « mais à condition que les termes soient acceptables pour la Russie ». Le principal conseiller économique du président russe, Arkadi Dvorkovitch, a indiqué la semaine dernière que son pays était prêt à reconsidérer certains contentieux commerciaux avec l'Europe si cette dernière donnait rapidement son feu vert à une accession de la Russie à l'OMC.croissance rapideLes échanges entre la Russie et l'Union européenne ont presque triplé en valeur entre 2000 et 2007. Cette croissance rapide s'est poursuivie au premier semestre 2008, la valeur des exportations européennes vers la Russie passant de 40 milliards d'euros au premier semestre 2007 à 50 milliards, et celle des importations de l'Union en provenance de Russie passant de 69 à 88 milliards. La part de la Russie dans le total du commerce extérieur européen de biens a presque doublé entre 2000 et 2007. Cette part a encore augmenté au cours du premier semestre 2008, la Russie représentant près de 8 % des exportations européennes et plus de 11 % des importations. La Russie a ainsi été le troisième plus important partenaire commercial de l'Union après les États-Unis et la Chine. Parmi les États membres de l'Union, l'Allemagne a été de loin le premier pays exportateur vers la Russie au premier semestre 2008 (15,7 milliards d'euros) et le principal importateur (16,2 milliards). Les exportations françaises se sont élevées, elles, à 3 milliards, et les importations à 6,5 milliards. L'important était de pouvoir sceller une alliance euro-russe pour pouvoir peser sur le sommet de Washington.
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