« Les distributeurs ne sont ni des voyous ni des voleurs »

Le gouvernement réunit demain agriculteurs, distributeurs et consommateurs à Bercy sur les modalités d'application de la LME. Assisterez-vous à cette réunion ?J'y assisterai personnellement. Car les 900 patrons de magasins Système U ne comprennent plus ce qu'il se passe ! Et je dois, en préalable de cette réunion, faire état des exactions, des pertes économiques, des pressions et violences que nos associés et collaborateurs ont subies lors du blocage des entrepôts et de nos magasins. Il faut mettre cela sur la table, car il serait trop facile de tourner la page.Quels dommages et pertes avez-vous subis ?Cinquante magasins ont été bloqués alternativement la semaine dernière. Samedi dernier, une dizaine de magasins en Bretagne ont dû fermer leurs portes. Fermer un samedi, jour qui représente jusqu'à 20 % du chiffre d'affaires hebdomadaire, ce n'est pas rien ! Tout cela ne sera pas sans conséquences pour nos magasins, entreprises parfois endettées ou reprises récemment par de jeunes entrepreneurs. Il nous reste aussi un fort sentiment d'injustice. Le ministère de l'Agriculture a jeté de l'huile sur le feu et porte sa part de responsabilité en nous ayant désignés comme bouc émissaire.La crise du lait a mis le feu aux poudres?Le problème du lait, c'est la fin des quotas et l'arrêt de la fixation du prix par accord interprofessionnel. Ce mode de fixation est jugé anticoncurrentiel par la DGCCRF. Dès lors, les producteurs de lait se sont retrouvés en concurrence frontale avec leurs concurrents étrangers. La tonne de lait se vend 200 euros en Allemagne, en Belgique et en Pologne, 160 euros en Nouvelle-Zélande et 280 euros en France. La baisse du prix du lait a été très forte depuis un an. Je peux comprendre le malaise paysan. Mais les pouvoirs publics doivent prendre leurs responsabilités. Si le gouvernement souhaite revenir à un système d'encadrement du prix du lait, qu'il le décide. Nous nous y adapterons. Mais nous ne sommes ni des voyous ni des voleurs.La semaine dernière, vous avez proposé de répercuter 10 centimes par litre de lait vendu aux agriculteurs pendant trois mois. Cette offre tient-elle toujours ?Non. Cette offre a été faite pour le seul lait UHT par Intermarché, Système U et Leclerc, trois groupements. Elle était conditionnée à une sortie de crise qui n'a pas eu lieu.Pour les agriculteurs, les distributeurs sont ceux qui « se gavent le plus »? Soyons sérieux ! Il suffit d'étudier les bilans de Danone, Lactalis et Bongrain pour voir combien leurs résultats en valeur relative sont supérieurs aux nôtres. Je l'ai déjà dit, mais cela ne passe jamais auprès de l'opinion : le résultat net d'un distributeur est de 1,2 à 2 % du chiffre d'affaires. Nos marges de man?uvre sont faibles.La FNSEA estime que la marge d'exploitation est passée de 15 % à 25 %. Qu'en est-il ? En 1984, la marge d'exploitation était de 15 %. Les frais de personnel représentaient alors 5 % du chiffre d'affaires. Nous en sommes aujourd'hui à 11 %. Dans le même temps, les impôts et taxes ont doublé. L'amortissement et les frais financiers aussi. Pour autant, notre résultat net n'a pas bougé. L'image du gros méchant distributeur nous colle à la peau. Or, la consommation, pilier de la croissance, se tient. Et nous y sommes bien pour quelque chose ! nSi le gouvernement souhaite revenir à un système d'encadrement du prix du lait, qu'il le décide. Nous nous y adapterons.
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