Paris sort Veolia et Suez de son service de l'eau

Bertrand Delanoë va tourner la semaine prochaine une page emblématique de la gestion chiraquienne de la capitale. Lors du Conseil de Paris du 24 et 25 novembre sera votée la première étape de la « remunicipalisation » du service de l'eau à Paris. « Au-delà de notre ambition d'offrir un service amélioré aux usagers, il s'agit avant tout d'un choix politique », soulignait hier la première adjointe au maire, Anne Hidalgo. C'est un combat de longue date. Dès son arrivée en 2001, l'équipe de Delanoë avait dénoncé les contrats « opaques » liant Paris aux distributeurs privés Lyonnaise des Eaux (Suez Environnement) et Compagnie Générale des Eaux (Veolia).Après des décennies de gestion publique de l'eau à Paris, Jacques Chirac avait en 1985 confié à ces deux entreprises, sans appel d'offres, la distribution de l'eau pour vingt-cinq ans. En divisant la ville en deux : la rive gauche, plus petite, fut attribuée à la Lyonnaise (qui y réalise actuellement un chiffre d'affaires de 62 millions d'euros) et la rive droite à Veolia (132 millions d'euros). « S'il y avait eu un troisième larron, il aurait eu l'île de la Cit頻, ironise un élu socialiste. De surcroît, en 1987, les deux distributeurs prenaient 28 % de la société d'économie mixte chargée de la production de l'eau (Eau de Paris) et du contrôle? de la distri- bution.programme ambitieuxDepuis, la ville a progressivement repris le contrôle du service et renégocié les contrats. Anne Le Strat, élue Verte à Paris en 2001, nommée dans la foulée à la tête d'Eau de Paris, a mené ardemment le combat. Aujourd'hui adjointe chargée de l'eau, elle peut savourer sa victoire. C'est Eau de Paris, dont Suez et Veolia sont sortis du capital en 2007, qui va prendre en charge à partir de 2010 l'ensemble du service de l'eau à Paris, de la production à la distribution. Son programme est ambitieux. Elle s'engage à la fois à « stabiliser le prix de l'eau » d'ici à la fin de la mandature et à réaliser 30 millions d'euros d'économies annuelles. Or à 2,8 euros le mètre cube (HT) le prix de l'eau à Paris est inférieur à la moyenne française et les recettes parisiennes ne cessent de baisser avec la consommation qui fléchit de 1 % à 2 % par an.« Les profits des distributeurs représentent déjà 15 millions d'euros par an », affirme Anne Le Strat. En attendant, la Ville de Paris doit débourser 6,2 millions d'euros pour racheter les 28 % d'Eau de Paris, entre-temps repris par la CDC. Il lui faudra aussi intégrer le personnel de Veolia et de la Lyonnaise « sans perte salariale ». Soit 380 personnes selon l'élue mais 450 selon les deux groupes. Personnel qui bénéficie de « salaires qui peuvent être jusqu'à 40 % supérieurs à ceux des équipes municipales », selon un élu UMP.De leur côté, Veolia et Suez Environnement cachent leur déception. Si les contrats parisiens étaient pour eux une belle vitrine, ils pèsent peu dans leur chiffre d'affaires eau en France, respectivement de 5 et 1,9 milliard d'euros. Avec une part de marché de 72 % (en volume) dans l'eau potable en France, les deux géants minimisent la tendance au retour de l'eau dans le giron municipal constatée depuis dix ans. « Les initiatives de Grenoble, Castres, Châtellerault ou Cherbourg montrent précisément la réversibilité de nos contrats », assurent-ils, en répondant ainsi au principal reproche de leurs opposants. « Paris continuera à faire appel aux compétences du privé, notamment pour la gestion de la relation client », affirme Anne Le Strat. Veolia et Suez n'ont pas tout perdu.
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.