1Lula, un syndicaliste converti à la realpolitik

Quand il se gratte la barbe comme il le fait souvent, on voit qu'il manque un doigt à l'énorme pogne du président. Arraché par une machine, du temps où il travaillait comme métallo dans une usine du pôle industriel de São Paulo. Septième fils d'un migrant nordestin, un temps cireur de chaussures, illettré jusqu'à l'âge de 10 ans, ouvrier, puis syndicaliste : rien ne prédestinait Luiz Inacio da Silva, baptisé « Lula », à devenir un jour président de la dixième plus grande économie de la planète. L'histoire de Lula n'est pas le symbole d'une ascension sociale fulgurante ? le pays, qui compte encore près de 22 % de pauvres, est parmi l'un des plus inégalitaires du monde, et les chances de s'en sortir restent limitées. C'est celle d'un miracle, celui du Brésil tout entier. Longtemps considéré comme « o pais do futuro », le plus grand pays de l'Amérique latine ? « plus grand que les États-Unis sans l'Alaska », comme se plaisent à dire les Brésiliens ? conjugue désormais son avenir au présent. Et si le président a reçu l'aide de Dieu, dans cette société particulièrement versée dans le religieux, sous forme d'immenses étendues de terres arables ou, plus récemment, de formidables gisements pétroliers le long des côtes qui bordent la « plus belle baie du monde », son action est loin d'être négligeable dans les performances actuelles du pays. Car la récession mondiale n'épargne plus les pays émergents ? à l'exception, relative, du Brésil.superpuissance agricolePourtant, rien là non plus n'était gagné d'avance. Quand en 2002 Lula est finalement élu président (après trois tentatives infructueuses) au nom du Parti des Travailleurs (PT), qu'il a fondé en 1980 dans le sillage du syndicat dont il était devenu le patron, il héritait d'une situation désastreuse. Les événements de 1998-1999 ? dévaluation de la monnaie, chaos économique et, enfin, appel au Fonds monétaire international ? restaient des plaies ouvertes. Lula allait-il jouer un jeu bien connu en Amérique latine, celui du populisme ? Allait-il fanfaronner devant les Brésiliens qu'il ferait ce que bon lui semblerait face au FMI ? C'est ce que les analystes, en particulier à New York, où ils sont nombreux à couvrir l'Amérique latine, craignaient. Lula fait tout le contraire. Le FMI exige en contrepartie de son prêt un excédent budgétaire de 3,75 % du Pib ? Il adopte un objectif de 4,25 % ! Mieux, il privilégie le service de la dette (il remboursera même le FMI par anticipation) plutôt que l'aide aux plus démunis. Sans doute parce qu'il est « l'un des leurs », peut-il faire avaler cette potion amère aux Brésiliens. Dans la foulée, il devient le chouchou de Wall Street. Le cercle vertueux s'instaure. L'économie repart. Le Brésil devient bientôt une superpuissance agricole, nourrie par la demande des autres pays émergents pour son soja, son b?uf, son blé. Lula en profite pour marquer des points dans la lutte contre la pauvreté. Certes, la tâche reste immense et le ralentissement pourrait porter un coup à ses initiatives. Mais, malgré des affaires de corruption dans son parti, sa popularité reste forte. Car comme le dit l'ancien métallo : « J'ai changé, mais le Brésil aussi a changé? » Lysiane J. Baudu++BSD ++PasSupprimerBalise balise systèmene pas supprimer++BSF ++
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