Siemens et Areva préparent leur divorce

Un divorce qui se veut discret. Ni Siemens lors de son assemblée générale, ni le porte-parole du gouvernement allemand lors d'une conférence de presse, ne sont revenus hier sur les modalités et les conséquences du retrait de Siemens du capital du constructeur nucléaire Areva NP. Pourtant, avec cette décision, le géant allemand tire un trait sur près de cinquante-cinq ans d'expérience nucléaire. Enfin pas tout à fait puisque Siemens a répété avec force qu'il n'entendait pas pour autant abandonner ce secteur. « Dans une perspective de long terme, nous regarderons les opportunités qui se présenteront pour rester présent de manière active et non pas mineure, dans le nucléaire », affirme-t-on en interne, en désignant explicitement les constructeurs nucléaires japonais, américain et même russe. Lundi, la presse allemande évoquait d'ailleurs des projets d'alliance avec le russe Atomenergoprom, qualifiées de « spéculations » par Siemens.De toute façon, Siemens a signé avec Areva une clause de non-concurrence qui lui interdit, sauf renégociation, de revenir sur ce marché dans les huit ans qui suivent sa sortie du capital d'Areva NP. Areva a précisé hier que le transfert des 34 % détenus par Siemens se ferait dans « les mois qui viennent », après un accord sur le prix (estimé autour de 2 milliards d'euros), mais qu'Areva ne réglerait cette transaction qu'en 2012. S'il reste convaincu du potentiel du nucléaire à terme, Siemens se dit très déçu par les modalités de la coopération avec Areva. « Nous refusons de nous contenter de récupérer les pertes tout en participant au vaste programme d'investissement d'Areva NP, sans aucune garantie sur notre maintien après 2012, au moment où les investissements commenceront à payer », explique-t-on en interne chez Siemens. À partir de janvier 2009, l'accord liant les deux ex-associés donnait à Areva la possibilité de racheter la part de Siemens, sous réserve d'un préavis de trois ans.Sérénité affichéeSiemens laisse à Areva NP quelque cinq sites en Allemagne, employant au total plus de 4.000 personnes, dont l'ex-centre névralgique du nucléaire allemand, à Erlangen, près de Nuremberg. Hébergeant aujourd'hui un simulateur d'essais nucléaires, qui n'existe qu'en deux autres exemplaires au monde, ce site de 3.000 personnes a vu naître en 1955 la cellule nucléaire de Siemens, devenue KWU en 1969, le constructeur unique du parc nucléaire allemand de 17 réacteurs. Mais le géant allemand conserve son activité dans le « nucléaire conventionnel », notamment les turbines et les systèmes de contrôle-commande. Il revendique 20 % de parts de marché dans le parc nucléaire mondial sur cette spécialité qui n'existait pas chez Framatome lors de la fusion avec Siemens pour former Areva NP en 2001.Chez Areva NP, on affiche une sérénité absolue. « Nos clients ne perdront rien, nos grands clients allemands comme E.ON et RWE l'ont d'ailleurs bien compris. Nous conservons les équipes et la technologie héritées de Siemens, déclare Luc Oursel, patron du constructeur français. En matière de contrôle-commande, Areva NP garde la maîtrise du design, Siemens fournit le matériel. » Les deux groupes se veulent rassurants sur l'avenir de leur coopération sur de futures centrales comme en Finlande, où Siemens fournit la partie conventionnelle (un tiers du budget estimé à plus de 4,5 milliards d'euros), tandis qu'Areva construit le réacteur. Un réacteur conçu depuis 1989 par Framatome et Siemens, associés pour faire face à la décrue du nucléaire.
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