Financièrement séduisants, politiquement encombrants

Mais qui peut bien faire acte de candidature?pour accueillir des déchets nucléaires ? Sur les 3.115 communes sélectionnées par l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra), elles sont déjà une dizaine à s'être officiellement portées candidates. Des petits villages inconnus comme Rimaucourt en Haute-Marne (753 habitants) ou Aouze dans les Vosges (193 habitants), mais aussi des bourgs plus importants, comme Brienne-le-Château dans l'Aube ou Sainte-Ménéhould, l'ancienne capitale de l'Argonne, aujourd'hui sous-préfecture de la Marne. Toutes ont leur chance. Mais une seule l'emportera. Demain, l'appel d'offres lancé par l'Andra sera officiellement clos. Et les éventuels retardataires ne pourront plus s'ajouter sur la liste. Mais cette date clé n'est que la première étape d'un long processus. Les candidats devront se montrer très patients. L'Agence devrait faire une proposition de localisation au gouvernement en 2010. Selon nos informations, ce centre d'enfouissement de déchets nucléaires à faible activité mais à durée de vie longue ? baptisé, pour simplifier, FA-VL ? devrait être situé dans le Grand Est où les conditions géologiques et « l'acclimatation » des populations semblent le plus favorables. pas avant 2019La commune qui l'emportera devra attendre plus longtemps que prévu pour tirer profit de sa « victoire ». Ce centre devait être opérationnel avant 2013. « Il ne fonctionnera pas avant 2019 », reconnaît Bruno Cohen, directeur de la sûreté de l'Andra.Ce retard ne change rien aux autres prévisions établies par l'agence. Le site est toujours prévu pour accueillir près de 170.000 m3 de déchets issus du démantèlement des centrales de première génération, aujourd'hui stockés dans des installations provisoires. Et ils seront, comme prévu, confinés dans du béton, soit en surface, soit enfouis à faible profondeur (entre 15 et 200 mètres). C'est en prenant connaissance de la liste complète des communes qui auront répondu à son appel d'offres que l'Andra pourra mesurer sa capacité de conviction. Les caractéristiques géologiques spécifiques (sol argileux à faible perméabilité, absence d'activité sismique, éloignement de zones naturelles classées) limitent certes le nombre de candidats potentiels. Les 3.115 communes contactées se concentrent dans le Grand Nord-Est (Marne, Aube, Vosges, Lorraine), le Lot ainsi qu'une partie du Centre (Indre) et du Nord. Mais, plus que la nature des sols, le principal obstacle est l'inquiétude, légitime, des populations? et l'agit-prop des associations hostiles à l'enfouissement des déchets. Les élus qui ont répondu favorablement à l'appel d'offres en sont conscients. L'un d'entre eux, maire d'une petite commune de Champagne-Ardenne, le reconnaît sans détour : « Il faut se préparer en toute connaissance de cause à en découdre et pendant une longue période. » Il est vrai que les opposants au nucléaire ? et notamment l'association Sortir du nucléaire ? occupent le terrain avec un savoir-faire indéniable et des arguments chocs. « Ces projets sont dangereux pour les populations et pour les générations futures. Tout simplement parce que nous ne savons pas comment gérer dans le temps ces centres d'enfouissement qui sont de véritables bombes à retardement », affirme ainsi Xavier Rabillaud, porte-parole de Sortir du nucléaire. Ces farouches adversaires reprochent aux projets d'enfouissement leur caractère par nature irréversible. Ils dénoncent tout autant la fragilité historique des confinements qui ne font finalement que retarder la dispersion des éléments radioactifs dans l'environnement. À l'Andra, on tient évidemment à recaler ces « approximations ». « Il est exact que nous sommes dans une logique de retardement et de dégradation dans le temps de l'impact de la radioactivité. Le béton et l'argile ne sont pas des barrières infranchissables sur la très longue période. Toutefois, lorsque certains éléments radioactifs du centre FA-VL affecteront l'environnement dans quelques dizaines de milliers d'années, ils augmenteront l'exposition naturelle des populations à la radioactivité d'à peine 10 %. À titre de comparaison, les examens radiologiques d'un patient moyen augmentent annuellement son exposition à la radioactivité? de 25 % », argumente Bruno Cahen. À en croire le député PS nordiste Christian Bataille, qui fut le rapporteur de la loi de 1991 sur la gestion des déchets radioactifs : « Il n'y a pas aujourd'hui de solution alternative que l'enfouissement dans l'attente de nouvelles découvertes scientifiques. C'est un fait. Et il y a des déchets à gérer?! » autre urgenceCe dernier regrette que l'agenda ? prévu par le législateur? ? braque aujourd'hui tous les projecteurs sur le projet du centre FA-VL « au risque de rouvrir des polémiques stériles et de semer la confusion alors que l'urgence est ailleurs?! ». En effet, un second projet d'enfouissement de déchets radioactifs est engagé. Il sera situé dans un rayon d'une dizaine de kilomètres autour de la commune de Bure dans la Meuse où l'Andra exploite déjà un laboratoire (voir la suite de notre enquête dans notre édition de demain). Ce centre d'enfouissement accueillera des produits irradiés à haute activité et à vie longue (HA-VL) confinés dans du verre. « Ils sont aujourd'hui entreposés à la Hague et à Marcoule », indique Christian Bataille, avant de conclure : « Ces déchets sont des produits ultimes de combustibles qui n'ont pas pu être retraités et qui sont autrement plus critiques que les déchets FA-VL. »
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