L'hôpital public souffre surtout de sa désorganisation

Après les décès d'un petit garçon de 3 ans, entré à l'hôpital pour une angine, et d'un homme qu'aucun service de réanimation n'a pu prendre en charge dans un délai raisonnable, l'hôpital public se retrouve sur la sellette. Certains syndicats, comme Force ouvrière, ont dénoncé un « problème de moyens à l'hôpital public » et des « recrutements insuffisants ». L'Association des médecins urgentistes de France (Amuf), pointant également « des défauts de moyens pour les patients », a demandé au gouvernement de déclencher un plan d'urgence dans les hôpitaux de la région parisienne et de rappeler les personnels.La plupart des acteurs du monde de la santé mettent toutefois davantage en cause d'importants problèmes de désorganisation à l'hôpital. « L'homme victime samedi soir d'un malaise cardiaque à Massy n'a pas pu être accueilli alors que les secours auraient contacté 24 services de réanimation. Pourtant, il se trouve qu'il y avait 11 places de disponibles en Ile-de-France », explique-t-on au ministère de la Santé. Roselyne Bachelot, qui a diligenté une enquête « afin que toute la lumière soit faite sur les circonstances ayant conduit au décès », a évoqué hier un problème de rencontre entre l'offre et la demande. « Pourquoi certains hôpitaux qui ont été contactés ont répondu à tort qu'ils n'avaient pas de places?? Peut-être pour ne pas être dérangés au milieu de la nuit, plus certainement pour garder des places si un problème survenait au sein de leur hôpital. C'est la réalité, mais ce n'est pas normal », affirme-t-on au sein du ministère.état des lieuxRoselyne Bachelot a par ailleurs demandé un état des lieux précis du nombre de lits de réanimation disponibles en Ile-de-France cette nuit-là. Selon de premiers éléments, il semble que seulement 5 % des lits de réanimation étaient fermés.« Ces drames ne sont pas inhabituels, commente Jean de Kervasdoué, professeur en économie de la santé et ancien directeur des hôpitaux au ministère de la Santé. Dans plus de 90 % des cas, ce sont des problèmes d'organisation, des procédures qui ne sont pas respectées dans beaucoup d'établissements. Car l'hôpital est plus au service de ses agents qu'au service de ses malades, c'est une organisation qui arbitre entre les pouvoirs des différentes corporations. Par exemple, beaucoup de tâches programmables ne le sont pas, car les médecins y perdraient pouvoir et influence. » En outre, cet économiste impute aux 35 heures une partie de la désorganisation actuelle. Il refuse en revanche de mettre en cause un manque de moyens de l'hospitalisation, la France arrivant au 3e rang mondial en termes de dépenses de santé (représentant 11,1 % du PIB en 2005), derrière les États-Unis et la Suisse. L'Hexagone emploie en outre autant de personnels à l'hôpital que l'Allemagne qui compte 20 millions d'habitants en plus.Même pour un syndicaliste comme François Aubart, à la tête de la Coordination médicale hospitalière, la question des moyens n'est pas primordiale. « Les contraintes financières ou démographiques conduisent-elles à fermer des lits de façon excessive?? La réponse est non. Elle est organisationnelle ».Pour la Fédération hospitalière de France (FHF), la question posée aujourd'hui « n'est pas celle des effectifs ». Depuis plusieurs années, « nous avons des problèmes budgétaires, mais nous avons puisé dans nos réserves d'investissement », explique Gérard Vincent, délégué général de la FHF. En revanche à l'avenir, compte tenu de la pression financière, le problème de l'emploi va devenir aigu. « Nous ne nous en sortirons pas sans supprimer des emplois et nous devrons fermer des lits. Pour la première fois cette année, des directeurs d'établissements à Paris, Lyon, Marseille, se voient d'ailleurs assigner des objectifs de suppression de postes », souligne Gérard Vincent. n
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.