Le grand Meccano continue... sans les Européens

Il est une mode américaine que les Européens tardent à copier : celle de la restructuration de l'industrie aéronautique et militaire liée à la baisse des budgets de défense nationaux. Outre-Atlantique, le message a été bien compris. Juste avant cette fusion de Lockheed-Martin et de Loral, Westinghouse venait de vendre, pour 15 milliards de francs, son électronique de défense à Northrop-Grumman, lui-même né du rachat de Grumman et de Vought par Northrop - à la barbe de Martin-Marietta. En plus de la fusion géante entre Lockheed et Martin Marietta, qui a suivi l'opération Northrop, on a vu la vente par General Dynamics de ses missiles à Hughes General Motors, de ses avions de combat tactique (notamment le F16) à Lockheed, de ses activités spatiales à Martin Marietta, et de son électronique à Carlyle. Lui-même repreneur, au côté de Northrop, de l'aéronautique de LTV... qui a également vendu ses missiles, mais cette fois à Loral. Ce dernier a en outre racheté l'électronique de défense d'IBM. Dans cette longue liste, qui ne commence pourtant qu'en 1994, on notera aussi la vente par McDonnell Douglas de son informatique à IBM, de ses systèmes de simulation à Flight Safety, et de ses systèmes d'information à Baring. Un McDonnell Douglas qui a pris langue avec Boeing pour parler fusion (la Tribune du 17 novembre 1995), en particulier dans les hélicoptères, les missiles et les lanceurs spatiaux, sous l'oeil bienveillant du Pentagone. Des restructurations timides Sur l'Ancien Continent, on avance encore à petit pas. Après une première phase très nationale dans les années 70-80 (créations après concentrations de Dasa, Daimler-Benz Aerospace, de British Aerospace, et, auparavant d'Aerospatiale), les restructurations récentes restent timides : union d'Aerospatiale et de Dasa dans les hélicoptères pour créer Eurocopter et bientôt dans les missiles (EMS) et dans les satellites (ESI), rapprochement Matra-GEC dans le spatial (Matra Marconi Space), projet de mariage entre Thomson et GEC dans les sonars. Le reste se limite à des unions mineures (Thomson-Dasa dans les armements terrestres ou la propulsion pour missiles), à des prises de participation, dont Thomson en Grande-Bretagne, en Italie et en Espagne, ou de petites acquisitions - comme le rachat des activités spatiales de British Aerospace par Matra. Quant au récent rapprochement entre Dassault Aviation et British Aerospace, préfigure-t-il une vraie union pour concevoir ensemble les avions de combat européen de l'avenir... ou ne consiste-t-il qu'à écarter les menaces de restructurations franco-françaises dans l'aéronautique et l'armement que le gouvernement pourrait proposer, voire imposer, dans les prochaines semaines, à la lumière d'un budget de défense français en chute libre ? Car, dans l'Hexagone, la tentation demeure de faire le Meccano en tricolore. Et si l'idée de démanteler Thomson-CSF paraît avoir moins le vent en poupe, celle de découper Aerospatiale pour donner ses activités aéronautiques à une société Airbus - dont la création est projetée -, et à Dassault, et ses satellites voire ses missiles à Matra, est loin d'être abandonnée. O. P.
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