Carignon retourne en prison, Tapie perd ses mandats

L'ancien ministre RPR Alain Carignon, qui avait déjà passé près de sept mois derrière les barreaux entre octobre 1994 et mai 1995, s'est constitué prisonnier hier en fin d'après-midi à la prison de Villefranche-sur-Saône (Rhône). Un mandat d'arrêt avait été délivré à son encontre quelques heures auparavant par la cour d'appel de Lyon, qui venait de le condamner à cinq ans d'emprisonnement dont un avec sursis, et cinq ans de privation de ses droits civiques, pour corruption dans l'affaire Dauphiné News, subornation de témoins et recel d'abus de biens sociaux. Le défenseur d'Alain Carignon, Me Guy Danet, s'est empressé d'introduire un pourvoi en cassation. La cour d'appel a aggravé les peines prononcées en première instance par le tribunal correctionnel de Lyon, le 16 novembre 1995, à l'encontre de l'ancien maire de Grenoble (de 1983 à 1995), président du conseil général de l'Isère, qui n'avait alors écopé « que » de trois ans de prison ferme (cinq ans d'emprisonnement assortis de deux années de sursis). Alain Carignon « a commis l'acte le plus grave qui puisse être reproché à un élu. Il n'a pas hésité à trahir la confiance de ses électeurs en monnayant son pouvoir de maire afin de bénéficier d'avantages » indique l'arrêt de la cour d'appel qui, outre la peine principale, a infligé au condamné 400.000 F d'amende. La cour a chiffré les avantages dont a bénéficié Alain Carignon à près de 20 millions de francs (mise à disposition d'un appartement à Paris, renflouement du groupe de presse Dauphiné News, vols à titre gracieux sur la compagnie Sinair), échangés contre la concession au groupe Merlin et à la Lyonnaise, en 1989, de la distribution de l'eau à Grenoble. L'ex-PDG de la Sofirad, Jean-Louis Dutaret, a également vu sa peine initiale aggravée en appel (quatre ans de prison, dont un an avec sursis et cinq ans de privation de ses droits civiques, civils et familiaux). Aggravation aussi pour l'ancien directeur commercial de la Lyonnaise des Eaux, Jean-Jacques Prompsy (trois ans dont deux avec sursis). L'industriel lyonnais Marc-Michel Merlin a vu lui sa peine confirmée (quatre ans dont trois avec sursis). La condamnation d'Alain Carignon, quarante-sept ans, signe la chute d'un franc-tireur de la politique, qui s'était imposé en 1983 en ravissant la mairie de Grenoble au socialiste Hubert Dubedout. Trois ans plus tard, il entrait au gouvernement. Hier le RPR a souhaité qu'il « se mette en congé de son mouvement » et abandonne la présidence du conseil général de l'Isère. Demande appuyée par la majorité des élus isérois, qui ont réclamé sa démission de l'assemblée départementale. Autre grand perdant de cette journée, le député radical des Bouches-du-Rhône, Bernard Tapie, qui a demandé hier au ministre de la Justice d'attendre la fin de toutes les procédures commerciales engagées à son encontre avant d'entamer la procédure de déchéance de ses mandats électoraux. Procédure qui semble inévitable après le rejet par la Cour de cassation de son pourvoi contre sa mise en liquidation judiciaire personnelle. Un arrêt qui ouvre définitivement la voie à la perte des mandats électifs de l'ancien patron de l'OM, à tout le moins de son mandat de député des Bouches-du-Rhône, dont la déchéance obéit à des règles claires et simples. La déchéance de son mandat de parlementaire européen, pour l'heure sans précédent, semble en revanche plus problématique. Au Parlement européen, on indiquait hier qu'une demande motivée de la France était nécessaire pour déclencher la procédure qui ne répond à aucun automatisme et relève de la Commission des règlements du Parlement européen, qui instruit l'affaire. Une fois passées les querelles de procédure sur cette situation inédite, une autre échéance, plus redoutable, attend cependant Bernard Tapie en fin d'année : la décision de la chambre criminelle de la Cour de cassation sur sa condamnation par la cour d'appel de Douai à huit mois de prison ferme pour l'affaire du match truqué OM-VA. Comme Alain Boublil et Samir Traboulsi dans l'affaire Pechiney, et quelle que soit la future décision de la Cour, Bernard Tapie devra en effet se constituer prisonnier pour que son pourvoi soit examiné. Philippe Flamand (avec AFP)
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