L'inflation met la grande distribution au pied du mur

La politique de l'autruche de la grande distribution française ne tiendra plus très longtemps. Elle devra répercuter l'inflation des matières premières et des prix de revient de ses fournisseurs. Les prix agricoles sont au plus haut depuis 2008. Ils ont bondi de 21,6 % en un an seulement, selon l'Insee, dont 87,4 % pour les céréales et 150 % pour le blé. La planète entière s'alarme de l'inflation des denrées alimentaires de base. Pascal Lamy, directeur général de l'Organisation mondiale du commerce, s'est inquiété, lundi, des « troubles politiques difficilement imaginables » qu'elle entraîne. L'Indonésie vient de suspendre les droits de douane sur les produits alimentaires pour lutter contre l'inflation nationale. La BCE regrette son accélération en janvier dans la zone euro; les prix ont grimpé de 2,4% sur un an. Fanfaronnades rituellesEn France, branle-bas de combat : le gouvernement convoque ce mercredi matin les représentants agricoles, industriels et de la distribution. Car, pour l'heure, alors que les négociations annuelles entre fabricants et hypermarchés battent leur plein, l'inflation mondiale des prix alimentaires a tout du nuage de Tchernobyl. Depuis des mois, la grande distribution s'en tient à une position de principe, de peur de perdre des clients : l'inflation ne passera pas par elle. « Les prix alimentaires vont augmenter mais nous allons nous battre bec et ongles pour éviter une hausse de prix à nos clients », avance Jérôme Bédier, président de la Fédération des entreprises du commerce et de la distribution.Faut-il y voir les gesticulations habituelles des gros durs de la grande distribution face aux champions de l'agroalimentaire ? Chaque début d'année, ces fanfaronnades reviennent comme les hirondelles au printemps. Car, enseignes et fabricants doivent signer leurs contrats annuels d'ici à fin février. Mais, cette année, tout traîne. « Aucun contrat n'a encore été signé alors que d'habitude 50 % le sont à cette période », assure Jean-René Buisson, président de l'Association nationale des industries alimentaires, qui espère être reçu à l'Élysée, après avoir dénoncé, par courrier à Nicolas Sarkozy, « l'absence totale de solidarité des distributeurs ». « Les plus rétifs sont Carrefour et Leclerc, suivis de Système U, malgré un discours plus ouvert », s'agace un fabricant.Mais Système U vient d'ouvrir une brèche dans le front uni de la grande distribution. Dans nos colonnes, Serge Papin, patron du groupement, appelle Carrefour et Leclerc à « prendre leurs responsabilités » en répercutant les hausses justifiées. Interrogé par « La Tribune », Carrefour continue pourtant de vanter la puissance de sa centrale d'achats, commune à la France, l'Espagne, la Belgique et l'Italie qui lui permettrait de juguler l'inflation. « Cette année, les industriels demandent 5 à 6 % de hausse de prix. Compte tenu de notre puissance d'achat, l'inflation dans nos rayons alimentaires ne devrait pas dépasser les 2 % », calcule son directeur général, Lars Olofsson, comptant manifestement sur la peur de rater un gros contrat pour imposer sa loi.
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