Défense : la Pologne fera-t-elle un geste vers les industriels de l'armement français ?

La roue va-t-elle un jour finir par tourner pour l\'industrie d\'armement française en Pologne… Depuis l\'échec cinglant du Mirage 2000-5 de Dassault Aviation en 2002 - Varsovie candidate alors à l\'Union européenne avait préféré des F-16 américains -, la France est toujours restée complètement absente des grands marchés de l\'armement polonais. Les industriels français font régulièrement un « bide » commercial. Sur la période 2007 et 2011, Varsovie, qui préfère acheter américain, allemand ou israëlien, a ainsi royalement commandé à l\'industrie tricolore 54,7 millions d\'euros d\'équipements militaires, selon le dernier rapport au Parlement sur les exportations d\'armement de la France publié en octobre 2012. Dialogue politique franco-polonaisQu\'est-ce que peut espérer la France aujourd\'hui ? Sur le plan politique, le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a tendu à plusieurs reprises la main aux Polonais dans le cadre du Triangle de Weimar (Berlin, Paris et Varsovie) pour relancer l\'Europe de la défense. Son homologue Tomasz Siemoniak y semble favorable. Paris avait réussi à réunir en novembre à Paris dans le cadre du format \"Weimar Plus\", les huit ministres des Affaires étrangères et de la Défense de la Pologne, mais aussi de l\'Allemagne, de la Pologne, de l\'Italie et de l\'Espagne.Dans la déclaration commune, les dix ministres avaient annoncé qu\'ils étaient \"réunis pour confirmer [leur] volonté de promouvoir une politique européenne ambitieuse dans le domaine de la sécurité et de la défense\". L\'ambition \"de construire une Europe de la défense intégrée n\'est pas facile\", a reconnu le ministre de la Défense espagnol, Pedro Morenes Eulate. Depuis, c\'est silence radio…Contraintes budgétairesParallèlement Varsovie avait entrepris de moderniser et de renforcer ses équipements militaires. En juin dernier, le Premier ministre, Donald Tusk, avait confirmé un plan de modernisation des forces armées polonaises de 43 milliards d\'euros sur 10 ans, annoncé en mai. Mais la Pologne a été rattrapée par la crise et, deux mois plus tard, Donald Tusk a pris la décision… de couper dans les achats d\'armement.Le projet de collectif budgétaire fait état de recettes fiscales inférieures de 23,7 milliards de zlotys (5,6 milliards d\'euros) par rapport à ce qui était prévu dans la loi de finances pour 2013. En réponse, le gouvernement polonais propose de procéder à des coupes dans ses dépenses de 7,7 milliards de zlotys pour limiter l\'augmentation du déficit budgétaire à 16 milliards de zlotys. Les coupes concerneront principalement les financements de la défense nationale (3,5 milliards de zlotys) et des infrastructures de transport.Priorité à la défense aérienne et aux hélicoptèresDe sept projets prioritaires, le ministre de la Défense polonais Tomasz Siemoniak en a conservé trois, dont la défense aérienne et les hélicoptères. Deux compétitions auxquelles participent le missilier MBDA (37,5 % BAE Systems, 37,5 % EADS et 25 % l\'italien Finmeccanica) et Eurocopter (groupe EADS). MBDA, qui doit faire face à la concurrence américaine, postule avec le système antimissile SAMP/T pour renforcer la défense aérienne, en vue de contrer notamment les avions de combat russes. Pour gagner, MBDA avait signé en juillet 2009 avec le groupe d\'armements polonais Bumar un accord-cadre sur la création en commun d\'un système de missiles de défense aérienne.En dépit d\'un retard initial, Eurocopter, qui expose au salon MSPO de Kielce un EC725, semble maintenant avoir rattrapé ses concurrents (l\'italien AgustaWestland et l\'américain Sikorsky) et a réussi à rebattre les cartes en Pologne avec l\'EC725, le Caracal qui a fait ses preuves sur plusieurs théâtres d\'opération, notamment en Afghanistan... qui a séduit les militaires polonais. Objectif, remporter un appel d\'offres, qui pourrait être lancé en fin d\'année et qui porte sur l\'achat de 70 hélicoptères de transport de troupes, un contrat estimé à 3 milliards d\'euros environ. Si le constructeur européen remporte cette campagne, il installera avec le motoriste Turbomeca respectivement deux chaînes d\'assemblage pour l\'EC725 chez l\'industriel polonais WZL 1 basé à Lodz. Varsovie pourrait choisir son fournisseur vers la mi-2014.Et les sous-marins ?DCNS, qui propose deux Scorpène (950 millions d\'euros), aura tout fait pour tenter de briser le tropisme allemand de la marine polonaise. Difficile (trop ?) même si le groupe naval propose de sauver les chantiers navals polonais en faillite. Car l\'Allemagne et la Pologne ont signé en avril une lettre d\'intention (LoI), qui consolide le partenariat stratégique entre les deux pays dans le domaine naval. Selon ce document, cette coopération comprend un large spectre, dont notamment le développement de capacités dans le domaine de l\'armement et des achats. Dans les annexes, les deux pays souhaitent établir une autorité opérationnelle commune pour les sous-marins allemands et polonais. Face aux difficultés budgétaires, la marine polonaise, qui pour l\'heure n\'a pas obtenu le lancement d\'un appel d\'offres du gouvernement polonais contrairement à ce qui était prévu cet été, chercherait des solutions innovantes pour acquérir deux nouveaux sous-marins. Car ce n\'est plus dans les priorités de Varsovie, qui aurait envisagé de louer deux sous-marins conventionnels SS U-212A (ASA 2005-2007) à l\'Allemagne, qui seraient prélevés sur les 6 SS U-212A Batch-1 et 2 de la marine allemande. Un projet qui pourrait être déjà mort-né tant il soulève des réticences de la marine allemande, qui ne souhaite pas se séparer de ses navires, et des interrogations. Une telle procédure, sans publication d\'un appel d\'offres à l\'échelle européenne, pourrait contrevenir aux règles communautaires de l\'Union.
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