Tragi-comédie sous un petit chapiteau

CinémaDisons-le tout net, le pic Saint-Loup, fière montagne du Languedoc, est un acteur muet et assez énigmatique du dernier opus de Jacques Rivette. C'est loin d'être la seule énigme de ces « 36 Vues du pic Saint-Loup », la plus grande étant de savoir s'il est encore possible, en 2009, de faire un film pareil. C'est un ovni, au milieu des grosses machines à scénario huilé comme un moteur de F1 qui pétaradent dans le cinéma d'aujourd'hui.Une vieille petite fille au léger accent anglais joue l'héroïne, c'est Jane Birkin. Un Italien gauche et incongru avec ses costumes chics et sa décapotable noire s'incruste dans son histoire, c'est Sergio Castellito, déjà vu chez Rivette dans « Va savoir?! ». Ils se rencontrent sur une route ensoleillée où elle est tombée en panne. Il répare la voiture sans un mot et sans un regard pour la conductrice stupéfaite. La scène est cocasse, on pouffe, c'est parti.On découvre vite que Kate fait partie d'un cirque, un tout petit cirque à quatre roulottes dépareillées, avec un chapiteau à peine plus grand qu'une tente. Rivette n'a pas besoin de plus pour nous entraîner, pour peu que nous nous laissions aller. L'histoire du cinéma compte, avant celui-ci, au moins 52 films ayant le cirque pour cadre ou pour prétexte. Le malicieux cinéaste en récupère tous les codes ? il ne va pas nous faire l'injure de penser que nous n'en avons vu aucun ? et il les bouscule subtilement. Le clown, Alexandre dans le civil (André Marcon), est grave comme ils le sont toujours, mais il n'a rien de désespéré. La preuve, c'est lui qui partira avec la femme de l'acrobate-jongleur tout en muscles, Wilfrid (Tintin Orsoni).Drame passéVittorio l'Italien, lui, veut comprendre pourquoi Kate est si triste, il y sera aidé par l'ingénue Clémence (Julie-Marie Parmentier). Bien sûr, il y a eu un drame dans le passé, c'est comme ça dans le cirque (on vous laisse découvrir lequel).C'est lent et léger à la fois, on craint de s'ennuyer et puis on est saisi malgré soi. Les acteurs récitent un peu leur texte, façon nouvelle vague, il y a cinquante ans, du coup leurs mots captent l'attention. Le seul espoir pour ce petit film d'un grand cinéaste, c'est la cinéphilie renaissante chez les enfants du DVD. Des ovnis, ils en ont vu plein dans le cinéma américain, avec leurs éternels occupants gluants. Qui sait s'ils ne trouveront pas un charme irrésistible au petit cirque de Rivette?? Sophie Gherard
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