La complainte des riches britanniques

Guy Hands aurait-il découvert une soudaine passion pour les promenades au bord de mer ? Le patron de Terra Firma, le fonds de capital-risque qui possède le label de musique EMI, a quitté Londres et s'est installé en fanfare cette année à Guernesey. Le flamboyant millionnaire a décidé de s'exiler dans l'île Anglo-Normande avec un objectif simple : trouver un régime fiscal plus clément.L'ancien banquier de Goldman Sachs est loin d'être un cas unique. Beaucoup de millionnaires menacent de quitter le Royaume-Uni. Même Tracey Emin, une artiste connue pour exposer son lit défait, envisage de claquer la porte. Mais c'est surtout à la City que la grogne monte : plus d'une dizaine de hedge funds ont ouvert des bureaux à Genève cette année. BlueCrest est le dernier d'entre eux, et envisage le déménagement d'une cinquantaine de gérants. « Jusqu'à présent, relativement peu de personnes ont quitté le Royaume-Uni, mais cela semble être en train de se développer », souligne Michael Wistow, avocat à Berwin Leighton Paisner.Longtemps un lieu fiscal rêvé pour les grandes fortunes, le Royaume-Uni resserre en effet la vis depuis deux ans. À partir d'avril 2010, le taux d'imposition sur les salaires de plus de 150.000 livres (165.000 euros) passera de 40 % à 50 %, un chiffre symbolique. Un geste qui fait suite au durcissement l'an dernier du fameux statut des « non-doms », ayant longtemps permis aux étrangers vivant au Royaume-Uni de se déclarer fiscalement « non-domiciliés », et de ne payer des impôts que sur leurs revenus britanniques. Les milliardaires russes et moyen-orientaux en ont largement profité? Désormais, ceux-ci doivent choisir entre déclarer tous leurs revenus internationaux, ou payer un impôt fixe de 30.000 livres (33.000 euros). Et, lors du budget présenté ce mercredi, un nouvel impôt sur les bonus devrait aussi être introduit.Pour l'instant, il est trop tôt pour parler d'hémorragie. Si les hedge funds ouvrent des bureaux en Suisse, ils n'y déplacent pas encore des équipes entières. Et les quelques cas spectaculaires, comme Guy Hands, restent rares. Pour Richard Murphy, fondateur de Tax Justice Network, les grands cris des riches britanniques ne sont que du lobbying : « Il y a beaucoup de comptables et d'avocats qui affirment que les gens font la queue pour quitter le Royaume-Uni : ils essayent surtout de faire de la publicité pour leur firme. »incertitudesFaux, répond Chris Sanger, d'Ernst & Young. « La menace est sérieuse. Notre équipe est submergée de clients qui veulent comparer les différents régimes fiscaux. De plus, le problème concerne aussi ceux qui envisagent de s'installer en Europe mais ne choisiront plus Londres. » Il ajoute également que le problème, outre le niveau des impôts, est l'incertitude qui règne désormais dans ce domaine, les resserrements du régime fiscal ayant été ces dernières années brutaux et sans large consultation préalable. Ces arguments, Gordon Brown les écoutaient du temps où il était chancelier. Mais, avec la crise, et une élection dans les mois qui viennent, il ne veut plus en entendre parler. Éric Albert, à Londre
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