« La Chine pèsera bientôt autant que la France pour Publicis »

Publicis a mieux redémarré que ses concurrents. Comment comptez-vous garder votre avance ?Au premier semestre, nous avons dégagé la plus forte croissance et la meilleure marge du marché mondial. Cette tendance me semble durable. La configuration du groupe et la répartition de nos activités font que nous sommes quasiment assurés de faire mieux que le marché les deux ou trois années à venir. Tout d'abord, nous avons une très forte surpondération dans le numérique qui représente déjà 28 % de notre chiffre d'affaires. Or, sur ce segment, les prévisions font état d'une croissance du marché supérieure à 14-15 %. Et nous ferons au moins aussi bien que le marché. Ensuite, nous avons près d'un quart de notre chiffre d'affaires sur les pays à forte croissance, les Bric et les « next eleven » (Turquie, Indonésie, Kazakhstan, etc.). Au total, c'est plus de 50 % de notre activité qui est exposée à une croissance forte, supérieure à 6 % en moyenne.La Chine est l'une de vos nouvelles priorités...Nous allons prendre dans les prochains mois des initiatives. On réfléchit de manière un peu différente. Jean-Yves Naouri, le COO (directeur opérationnel) du groupe, fait une analyse approfondie sur ce continent et nous proposera un plan d'action en novembre ou décembre. La Chine est déjà un des cinq premiers marchés de Publicis Groupe. Je pense que d'ici à deux ou trois ans, la Chine sera, après les États-Unis, notre second marché, à égalité avec la France.Comment allez-vous procéder ?Le potentiel de la Chine est considérable, mais c'est un pays complexe, par son étendue, sa démographie et sa culture. La question de notre implantation doit se poser sur un certain nombre de villes ou de régions en fonction du potentiel économique et publicitaire. Nous sommes déjà à Pékin, Shanghai et Guangzhou et avons une petite présence à Chengdu. Le groupe est également présent dans une quarantaine de villes sous des formes différentes : affiliation ou petites agences. Nous sommes la première agence média en Chine et le second groupe de publicité. Mais nous devons doubler ou tripler notre présence dans les prochaines années. Cela passera par de la croissance organique bien sûr, avec de l'investissement dans les talents que nous devrons attirer ou former. Nous espérons pouvoir procéder à des acquisitions d'acteurs régionaux ou locaux dont les règles de gouvernance et la culture sont proches des nôtres.À quand un Chinois au sein du conseil de surveillance de Publicis ?C'est une très bonne question. Ce serait une bonne chose pour le groupe, et bien que ce ne soit pas à moi, président du directoire, d'en décider, je serais très content de pouvoir un jour proposer au Conseil un Chinois ou une Chinoise.Du côté du numérique, la publicité sur mobile émerge. Ne craignez-vous pas les nouveaux entrants, tel Apple qui a créé sa propre régie ?Ce que veut faire Apple avec iAd, c'est une régie publicitaire et non pas une agence. C'est comme Google, Microsoft ou Yahoo. Ils ont développé d'importantes régies sur Internet, mais contrairement à ce que beaucoup de monde a dit, le contenu publicitaire n'a pas été « désintermédi頻. Ces acteurs ont en revanche gagné leurs positions au détriment des groupes de médias traditionnels. Il se passera la même chose avec le développement de la publicité sur mobile où de nouveaux modes de communication vont se développer. Comme les coupons de réduction avec la géolocalisation. Dans quelques années, le premier média du monde sera le téléphone mobile. Regardez ce que vous pouvez faire avec un iPhone, c'est déjà beaucoup plus riche que ce que vous pouviez faire avec un PC dans les années 1980.Beaucoup de gens s'inquiètent du nombre croissant d'informations personnelles qui sont collectées, via les réseaux sociaux ou la géolocalisation pour mieux vendre de la publicité. Cela ne risque-t-il pas de se retourner contre les annonceurs ?Les membres de la communauté Facebook ont montré qu'ils étaient très réactifs et vigilants. Et c'est vrai pour les autres communautés. C'est un garde-fou bien plus efficace que n'importe quelle loi. La patience des internautes a des limites, il y a des choses qu'ils ne supporteront pas. L'usage excessif, abusif, délictueux de données privées peut créer un dommage colossal aux opérateurs. La publicité sur les vidéos en ligne se développe, mais est vendue beaucoup moins cher que la publicité télé. Est-ce une menace pour la télévision ?Ceux qui ont des sites qui ne coûtent rien à fabriquer peuvent vendre le contact très bon marché. Mais un prix très bas qui ne rapporte rien, c'est déjà trop cher. Ce qui compte, c'est de toucher la bonne cible au bon prix. Il est vrai que la comparaison du rendement entre Internet et les autres médias peut provoquer un effet de vases communicants. Mais je ne pense pas que l'économie des chaînes privées soit menacée pour autant. Et nous allons assister à un nettoyage du Net comme on a eu un nettoyage après la bulle des « dotcom ». Il y a une floraison excessive de sites et nous allons voir la disparition de nombre d'entre eux dont l'utilité n'est pas démontrée.Le conseil de surveillance a une nouvelle fois prolongé votre mandat...Je vous coupe. Pas « une nouvelle fois ». La crise que nous traversons a amené le conseil de surveillance à insister pour ne pas tout changer au moment où la stratégie qui est menée semble réussir au groupe. C'est idiot de s'enfermer dans un calendrier pour une histoire de bulletin de naissance. J'ai donc accepté de rester au-delà de 2011, qui était la fin de mon mandat, sans fixer de nouveau terme. Cela nous laisse le temps pour arrêter les détails de ma succession.Propos recueillis par Sandrine Cassini et Jean-Baptiste Jacqu
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