Retraites : la grogne se déplace du côté des patrons

Changement de ton au sein des organisations patronales à l'égard de la réforme de retraites. La bienveillance affichée depuis la présentation du projet gouvernemental en juin est en train de tourner à la méfiance, voire à l'affrontement.Pourtant, dans sa version initiale, le projet avait tout pour séduire le patronat. Le recul de l'âge légal de départ de 60 à 62 ans est de longue date une revendication de Laurence Parisot, la patronne des patrons. Le refus d'une reconnaissance collective de la pénibilité avait été posé par le Medef comme préalable non négociable dans les discussions - inabouties - avec les syndicats lancées sur ce sujet dans la foulée de la réforme Fillon de 2003. Enfin, le choix de l'exécutif de financer sa réforme essentiellement par des mesures d'âge et peu par des prélèvements sur les entreprises ne pouvait que satisfaire les organisations patronales. Et même si, en contrepartie, le gouvernement attend des entreprises qu'elles fassent des efforts sur l'emploi des seniors, la satisfaction était de mise.300 millions d'eurosLas?! Cette entente cordiale est en passe de voler en éclats. Les dirigeants patronaux redoutent, en effet, de voir le savant équilibre imaginé initialement fragilisé par les concessions accordées aux syndicats. « Ceux-ci ont d'ores et déjà dit qu'ils n'approuveraient pas la réforme. Je ne vois pas pourquoi on devrait faire des efforts pour eux, mais le gouvernement est hyper frileux », regrette un dirigeant patronal.Principale source de mécontentement, le financement des aménagements annoncés par l'exécutif au lendemain de la manifestation du 7 septembre. L'extension du dispositif pénibilité (lire page 4) coûtera 300 millions d'euros par an, pris en charge par les entreprises via la branche « accidents du travail-maladies professionnelles ». Un coût supplémentaire d'autant plus mal vécu qu'il s'accompagne de nouvelles sanctions financières pour les mauvais élèves (lire ci-dessous). Et qu'il s'ajoute aux effets de l'annualisation des allégements de charges sociales, prévue dans le projet initial. Or, en faisant tourner leurs calculettes, certains secteurs se sont aperçus qu'ils avaient beaucoup à perdre. Ainsi, François Roux, délégué général du Prisme, fédération patronale de l'intérim, indique que « selon les résultats d'une étude du Credoc, les simulations font état d'une diminution des allégements de 9 % en moyenne pour l'ensemble des entreprises, et de... 29 % pour les agences d'emploi ».Pour tenter d'infléchir la position gouvernementale, Laurence Parisot, la présidente du Medef, est montée au créneau. « On ne peut que regretter la remise en cause d'un dispositif d'allégements de charges qui ne fait que compenser un préjudice que nous avons subi [avec les 35 heures, Ndlr]. Cela affectera l'emploi », a-t-elle prévenu, mardi, lors de sa conférence de presse mensuelle. Poliment. Mais le ton risque fort de monter, surtout si le budget 2011 prévoit de nouvelles contraintes pour les entreprises, telles qu'une hausse du forfait social ou la réduction du crédit d'impôt recherche. Agnès Laurent et Isabelle Moreau
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.