L'édito de Pierre-Angel Gay : JP Morgan, le commandeur de Wall Street

Brillants, décevants et plein d'enseignement, tout à la fois. Les résultats annuels de JP Morgan Chase, publiés vendredi, en disent long sur la santé de l'économie américaine et sur celles de ses banques. Sur l'état d'esprit de Wall Street, aussi. L'établissement du 475, Park Avenue, à New York, était sorti triomphant de la tourmente financière, cumulant les podiums. Les rachats successifs, et à la casse, de ses compatriotes Bear Stearns et Washington Mutual, avaient fait de l'établissement, dirigé par un Jamie Dimon aussi implacable que discret, la première banque d'outre-Atlantique, par la capitalisation boursière, le total des actifs sous gestion et l'émission de cartes de crédit. De quoi mettre ses concurrents K.-O., y compris un Goldman Sachs aux performances éblouissantes mais à l'assise infiniment plus étroite. À première vue, les chiffres confirment cette domination, avec un bénéfice multiplié par plus de deux sur l'année, à près de 12 milliards de dollars, et par plus de quatre au dernier trimestre (3,3 milliards). Mais derrière cet apparent retour au « business as usual », la réalité est nettement plus contrastée. La fin d'un tabouLes revenus ont reculé dans la banque d'affaires et le coût du risque (le défaut de paiement sur le crédit) est resté élevé, faisant plonger l'activité de détail dans le rouge et y maintenant celle des cartes de crédit. Et Jamie Dimon n'a rien fait pour rassurer les investisseurs, confirmant ses propos pessimistes sur l'état de l'économie américaine de ces derniers mois. JP Morgan Chase n'a pu maintenir sa bonne fortune annuelle qu'en passant les bonus de ses traders au rabot. Jamie Dimon, qui n'a jamais été connu pour ses largesses à l'égard des cadres de sa banque, a décidé de couper leur rémunération variable de 80 % au quatrième trimestre. Et c'est cela, le principal enseignement : la première banque de Wall Street n'a pas hésité à s'attaquer à l'un de ses plus grands tabous. Même si l'on peut penser que toutes ses concurrentes ne lui emboiteront pas forcément le pas, la dénonciation des « bonus obscènes » par le président Barack Obama, la volonté de ce dernier d'imposer aux établissements financiers un « financial crisis responsability fee », littéralement une taxe pour leur responsabilité dans la crise financière, finit par s'imposer dans les buildings de Manhattan. « Main Street » avance dans son combat contre Wall Street.
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