Guess va bien, merci ? !

MODEPaul Marciano est un homme peu disert avec la presse. Le président de Guess préfère mettre en avant ses campagnes de pub qui revisitent le fantasme de la femme idéale (voluptueuse et fatale, à la manière d'une Sophia Loren ou Brigitte Bardot). Parler n'est pas son truc, il préfère agir.Aujourd'hui, pourtant, le dernier des quatre frères de cette famille de Marseillais partis en 1982 à la conquête de l'Amérique aurait de quoi fanfaronner. Leur société va bien, très bien même. Avec une croissance des ventes de 21 % en Europe, il vient d'inaugurer un immense espace à Londres et annonce l'ouverture de 111 nouveaux magasins dans le monde dont 30 en France pour 2010. Présent dans 1.154 boutiques dans 79 pays, le groupe a ouvert ces derniers mois pas moins de 168 nouveaux magasins. En Asie, la croissance est spectaculaire. En Corée, Guess est la deuxième marque la plus importante après Calvin Klein. Aux États-Unis, les chiffres bien sûr sont moins bons, mais la marque résiste mieux que la concurrence. Les analystes financiers saluent ses performances. La clé du succès ? Bien sûr, c'est le style. La mode Guess a la magie de susciter l'envie des femmes dans le monde entier. Dessinée en Europe dans les ateliers de Florence, cette mode est sexy sans être vulgaire, bling-bling mais pas trop, de qualité mais pas hors de prix, jamais elle ne se prend pour ce qu'elle n'est pas. Résultat : les consommatrices en redemandent.Grâce à un bon équilibre entre distribution de gros et détail à l'international, et une présence équilibrée en mode, accessoires, horlogerie et joaillerie, Guess devrait terminer l'année à 1,99 milliard de dollars de chiffre d'affaires, en hausse de 4,9 %. Ce qui s'accompagne d'une hausse de son résultat opérationnel de 14,6 % à 300 millions de dollars. DisciplineLe secret d'une telle performance?? Paul Marciano le résume à un mot?: discipline. « La crise, on l'a connue avant tout le monde. Quand, en 1999, nous avons décidé de quitter les grands magasins, parce que ces derniers menaient une guerre des prix effroyable qui nous rendait totalement vulnérable, le titre a perdu 85 % de sa valeur à Wall Street. L'action est passée de 32 dollars à 3 dollars. Mes frères et moi détenions 82 % du capital, c'était un coup dur, mais nous avons encaissé et c'est ce qui nous a sauvés. Nous avons décidé alors de nous concentrer sur nos propres points de vente. Et d'accélérer notre développement international pour être moins dépendant du marché américain. Les circonstances ont fait que nous avons pu reprendre en direct le marché italien et plus tard le marché coréen. Nous nous sommes disciplinés. »Depuis août 2006, le groupe a mis en place une réflexion baptisée « what if » qui a permis, explique le PDG, d'anticiper le retournement du marché. « Cela faisait plus de cinq ans que l'on enregistrait des croissances annuelles à deux chiffres, cela ne pouvait pas durer éternellement. Il fallait s'attendre au pire. Lorsque Lehman Brothers a chuté, on a immédiatement ralenti les ouvertures, stoppé les dépenses et établi des points cash-flows tous les trois jours. Le dollar dégringolant, l'euro montant, notre business en Europe a tiré la croissance. La bonne résistance de l'Asie aussi. »Anticipation« Who moove my cheese?? » Sous cet intitulé, Paul Marciano encourage dans une brochure son management à rester vigilant. « Quand tout va bien, on a tendance à s'endormir au volant. Or, si nous pouvons contrôler l'action interne de notre business, nous ne sommes pas maîtres des événements extérieurs. C'est du bon sens. Il faut faire remonter les infos du terrain. »De même, n'ayant pas céder à la tentation de s'endetter pour bâtir une unité de production, trop coûteuse, et contrôlant toujours avec son frère Armand la majorité du capital, Paul Marciano n'a aucun crédit en cours?; il est en mesure de saisir les bons emplacements. Chaque semaine, des dossiers d'acquisition arrivent sur son bureau. « On est ouvert à une acquisition, mais la marque doit partager notre culture, avoir une image qui s'inscrit dans la longévité et être totalement transparent? Trois points importants qui réduisent considérablement le nombre des acquisitions potentielles. »Intégrit髠On sait qui nous sommes. On ne cherche pas à faire n'importe quoi. Guess n'organise pas de défilés. Ce n'est pas notre truc. Nous n'avons pas besoin de flatter nos egos. Défiler, cela permet d'avoir de l'éditorial gratuitement. Je préfère me concentrer sur le produit?; être au plus près des clients pour connaître leurs attentes. Nous ne sommes pas une marque de luxe, nous ne sommes pas non plus un label de grande distribution. Nous sommes une marque de mode de lifestyle. Nous pensons global, notre volonté est de créer le meilleur produit possible, ce qui signifie un bon style, une bonne qualité, un prix juste. Les marques qui, ces dernières années, se sont laissé emporter par le prix du rêve, paient cher aujourd'hui le retournement du marché. La prise de conscience est mondiale. À Los Angeles, il était devenu normal de payer 3.000 dollars voire 3.500 dollars un sac. Aujourd'hui, les produits sont tellement soldés que les femmes ressortent des magasins avec des dizaines de sacs au bras, qu'elles ont payés 250 dollars ; que font les dirigeants?? Ils pleurent?; leurs produits ne valent plus rien, leurs business plans se sont effondrés. À Thanksgiving l'an dernier, le choc a été terrible. Ça a été un cataclysme. Il ne faut jamais avoir trop confiance en soi. »
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