« Les consommateurs sont devenus paranos. » Au lendemain de l'ouverture du Salon du mondial du tourisme, qui se tient du 18 au 21 mars, à la porte de Versailles, à Paris, le diagnostic de l'après-crise est sans appel pour Michel-Yves Labbé, le fondateur de Directours. « Les clients ont le sentiment de s'être fait dupés pendant des années, et d'avoir payé le prix fort. Aujourd'hui, ils ne font plus confiance à la presse ou aux médias classiques pour choisir leur voyage. Tous recherchent le meilleur rapport qualité- prix. Et pour ce faire, ils s'adressent plus volontiers aux sites sur internet pour faire leurs choix. » L'étude Amadeus présentée en décembre dernier, conforte l'avènement du nouveau voyageur amateur expert. Réalisée, en pleine récession, à partir d'interviews de 2.719 voyageurs et 30 experts du tourisme dans le monde, elle quantifie et analyse l'arrivée d'une nouvelle génération de voyageurs pour qui Internet est la source d'information primordiale. Selon Ian Wheeler, vice-président d'Amadeus, « le client moyen ne dit pas je veux partir au Mexique ou ici ou ailleurs, aujourd'hui, ce qu'il recherche c'est partir au soleil de novembre à janvier au meilleur prix pour faire de la plongée », peu importe qu'il s'agisse des Caraïbes ou des Maldives. Grâce à Internet il a accès à toutes les informations, en un clic. Et fait lui-même ses choix. » Il est libre de manoeuvrer à sa guise. Ce n'est que le début, la mutation du secteur est en marche. Les agences de voyage doivent s'adapter. Globalement, l'ensemble des sites qui proposent des voyages à prix cassés explosent. Les hôtels ayant du mal à faire le plein, les prix baissent, les opportunités affluent. Brandalley vient ainsi depuis trois mois d'ouvrir son antenne voyages. Et organise désormais des ventes sur Internet au même titre que n'importe quel opérateur. Séjour à l'île Maurice à - 70 %, départ pour l'exposition universelle de Shanghai à moins de 1.000 euros, la clientèle CSP+, âgée enre 35 et 45 ans dont beaucoup de femmes, en redemande. Pour Sven Lung, le pdg et fondateur du site, « le tourisme va connaître le même phénomène que la mode a vécu ses dernières années. Aujourd'hui, face à une situation de déstockage importante, les sites de ventes privées arrivent sur le secteur du tourisme. Tout le monde s'y met. Les tour-opérateurs eux-mêmes, mais aussi, comme nous, les spécialistes de la vente privée. Dans un an ou deux, le marché lui-même aura fait le tri, il ne restera que quelques opérateurs. Mais, depuis notre création de l'antenne, il y a trois mois, notre activité est très satisfaisante. Nous allons atteindre rapidement l'objectif de plusieurs dizaines de millions d'euros de chiffre d'affaires ». Si les vacances au soleil en cinq étoiles à prix cassés sont désormais accessibles à tous, attention, tous les sites de ventes privées ne pourront jamais offrir la qualité d'un service sur mesure, comme peuvent le faire des agences de voyages spécialisées tels Nosylis, Exclusif Voyages ou Terres de Charme. En 2009, fort d'une connaissance réelle du terrain, où chaque destination préconisée a été testée, Directours a enregistré une hausse de 21 % de son activité alors que le marché du tourisme baissait de 13 % en France. Comme l'explique Michel-Yves Labbé : « à un certain niveau de clientèle, plus que l'argent, c'est le temps qui est précieux. Les clients veulent dépenser moins, mais surtout ils ne veulent pas se tromper. Ils ont besoin de réassurance, à nous de les convaincre. Un client satisfait revient, il faut tout mettre en oeuvre pour répondre à ses besoins spécifiques. C'est pour cela que Directours va bien. » Mais là encore, attention à la concurrence. Pour se rassurer, Internet a la faveur des nouveaux voyageurs amateurs experts. Leur bible ? Le site Tripadvisor et ses 30 millions d'avis de voyageurs. Super puissant, son influence est grandissante. Impossible pour une agence de voyages ou un tour-opérateur de faire sans. Le tourisme de demain se dessine sur la toile.

latribune.fr

18 Mars 2010, 23:22

Partager :