Plan d'adaptation à l'effet Free Mobile : le scénario noir imaginé par SFR

Noir, c\'est noir. Le constat dressé par SFR dans le « livre II» communiqué aux partenaires sociaux dans le cadre du plan de départs volontaires qui touche 1.123 emplois (sans compter les 267 créations de postes envisagées) se révèle des plus alarmistes. Certes, c\'est la règle dans ce type de document destiné à justifier un plan social d\'ampleur. Mais les prévisions annoncées sont particulièrement pessimistes, alors que le groupe a légèrement relevé ses objectifs pour l\'année 2012 le mois dernier, tablant sur une baisse de 12% de son Ebitda (résultat brut d\'exploitation), contre - 12% à - 15% redoutés initialement. Même après le plan d\'adaptation que l\'opérateur va mettre en place avec l\'objectif de devenir \"opérateur numérique engagé\" (ONE), «le plan d\'affaires 2011-2015 reste fortement dégradé » indique la filiale de Vivendi, qui s\'attend selon nos informations à une chute de 64% de son bénéfice net en quatre ans, à un peu moins de 500 millions d\'euros en 2015, et de 42% du cash flow net à 740 millions (hors coûts de restructuration et achat de fréquences). Avec ou sans plan d\'adaptation, le chiffre d\'affaires devrait se contracter de 15% en quatre ans, à 10,3 milliards d\'euros, dont près de 35% dans les services mobiles grand public.« Innovation, maîtrise des réseaux, richesse de l\'offre : banalisés »SFR a bâti ce plan d\'affaires sur l\'hypothèse d\'un équilibre à moyen terme entre les « offres complètes » et les « offres simples », comprendre celles avec abonnement, engagement et subvention par opposition au « SIM-only », les offres low-cost sans téléphone et sans engagement qui se sont généralisées depuis l\'arrivée de Free Mobile en janvier. Mais SFR n\'exclut pas que ces nouvelles offres représentent « 60% à 70% du marché. » Il évoque « le cataclysme provoqué par l\'arrivée de Free sur le marché du mobile et ses conséquences très lourdes pour SFR » et se livre à un long exercice d\'auto-dénigrement, affirmant que « les avantages compétitifs que possédait SFR jusqu\'à maintenant » sont désormais « banalisés » : par exemple, la « richesse d\'offre de produits et services », devenue « moins pertinente », ou encore la capacité d\'innovation car « l\'innovation ne constitue pas un avantage compétitif dans la mesure où elle peut être répliquée très rapidement », un commentaire qui a laissé pantois plus d\'un ingénieur télécoms, et enfin « la maîtrise des réseaux » a perdu de son importance du fait des « nouvelles facilités réglementaires d\'accès à des réseaux tiers. » C\'est une référence au fameux contrat d\'itinérance conclu entre Free et Orange par lequel le nouvel entrant loue le réseau de l\'opérateur historique en attendant d\'achever la construction du sien. Les dirigeants de SFR dénoncent en privé les « conditions financières mirobolantes » qu\'Orange aurait accordées selon eux.L\'efficacité opérationnelle, « un avantage natif de Free »Or en parallèle, le numéro deux français des télécoms se considère « dépositionné (sic) en termes de compétitivité » sur de « nouveaux critères de préférence ou d\'attractivité que souhaite désormais une partie significative du marché et pour lesquels SFR n\'a pas de légitimité naturelle » : il s\'agit de la perception du rapport qualité/prix, de la maîtrise des canaux de distribution « digitaux » des acteurs venus du fixe (Free réalisait 100% de ses ventes sur Internet avant d\'ouvrir quelques boutiques) mais aussi de « l\'efficacité organisationnelle et opérationnelle », présentée comme un « avantage natif de Free ». Le plan d\'adaptation de la direction ne règlera pas tous ces problèmes mais permettra d\'améliorer sensiblement les équilibres d\'exploitation de SFR » : ainsi, le bénéfice d\'exploitation (Ebit) ne s\'effondrerait plus de 65% entre 2011 et 2015 mais de 47% à 1,2 milliard d\'euros. C\'est plus pessimiste que les projections des analystes, mais ces derniers n\'attendent généralement de stabilisation du marché qu\'en 2014, ce qui rend délicat l\'exercice. Idem pour le résultat net qui ne serait pas divisé par six mais par un peu plus de 2,5 seulement. Ces chiffres sont-ils vraiment compatibles avec la valorisation de 20 milliards d\'euros pour SFR avancée par le président du directoire de Vivendi, Jean-François Dubos ? Ou bien SFR noircit-il volontairement le trait ? Seul point de nature à rassurer les salariés, SFR n\'a pas prévu de couper drastiquement dans ses investissements : dans son plan d\'affaires, il maintient autour de 1,4 milliard d\'euros d\'investissements par an (hors fréquences).« La vocation financière des investissements de Vivendi »Les salariés doivent en revanche se faire une raison sur le maintien éventuel dans le giron de la maison-mère Vivendi, s\'ils leur restaient quelques illusions, après les propos du président du directoire ce lundi (lire l\'article). Le document remis aux représentants du personnel explique sans détours la philosophie de Vivendi : « il n\'existe aucune réalité économique ou financière, ni même en termes de gouvernance ou encore de moyen ou de mutualisation au niveau de ce pôle » d\'actifs télécoms, qui regroupe SFR, Maroc Télécom et le brésilien GVT, « compte tenu, d\'une part, de la spécificité nationale du secteur des télécoms, et d\'autre part, de la vocation financière des investissements de Vivendi et de l\'indépendance qui en résulte pour chaque entité. »  
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