l'art dans les nuages

Qu'une exposition thématique sur le nuage voie le jour au musée Malraux du Havre plutôt qu'ailleurs n'est pas surprenant. Ici, les grandes baies vitrées qui donnent sur le front de mer dévoilent l'étendue infinie du ciel et accueillent avec générosité sa lumière changeante.Il aura tout de même fallu un élément déclencheur. À savoir les 17 études de ciel signées Eugène Boudin comprises dans la donation Senn-Foulds dont a bénéficié le musée il y a cinq ans. L'exposition « Les nuages? là-bas? les merveilleux nuages », présentée pour quelques jours encore et dont le titre est emprunté à Baudelaire, s'ouvre avec les premières études datant des années 1850. Des petits formats qui laissent d'abord apparaître des lignes d'horizon mais qui, rapidement, s'affranchissent de tout repère spatial. Par la liberté de regard dont fait preuve Boudin, ces oeuvres font avancer la peinture d'un pas décisif vers l'abstraction.Mais de peinture, il ne sera plus question dans le reste de l'exposition. Car pendant que Boudin tente de capter la beauté des ciels avec sa palette, d'autres utilisent une technique toute nouvelle?: la photographie. Évidemment, au début, les images sont floues, surexposées, imprécises. On utilise des subterfuges. Gustave Le Gray par exemple immortalise la mer et le ciel ? qui nécessitent des temps d'exposition différents ? séparément pour ensuite les assembler.objets insaisissablesDans les années 1920, la technique s'est améliorée. Alfred Stieglitz entame sa série « Équivalents » consacrée aux nuages. Ses clichés abstraits nous plongent dans l'inconnu. Ils font ressurgir le mystère de ces objets insaisissables qui sont désormais envisagés comme des figures autonomes.Le nuage n'aura de cesse ensuite d'être utilisé par les photographes contemporains, comme le montre bien la seconde moitié de l'exposition composée d'une centaine d'oeuvres sélectionnées avec l'aide du Fonds régional d'art contemporain de Haute-Normandie. Nuage inquiétant qui envahit les rues pour Laurent Grasso et Gregory Crewdson, ou au contraire rassurant quand Michel Kempf, grâce au numérique, lui donne la forme d'un nounours. Nuages célestes lorsque Pierre et Gilles y font se reposer un ange blessé dans une pose saint-sulpicienne. Égaré pour André Kertész, léger pour Laurent Millet, en cumulus, cirrus ou stratus, le nuage est une source d'inspiration qui ne souffre aucun épuisement. Alors il faut courir vers le musée du Havre pour voir cette exposition tant qu'il est temps?!
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