Le gouffre de la Sécu inquiète la majorité

Ce n'est pas une fronde contre la politique du chef de l'État. Les députés de la majorité, qui débattront à partir de demain du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), ont presque tous fini par accepter le principe de ne pas augmenter les prélèvements obligatoires pendant la crise et de laisser se constituer un déficit colossal en 2010. En revanche, tous s'inquiètent à haute voix de la dette sociale qui s'accumule et de l'avenir de la Sécurité sociale française.« Le problème, c'est que les Français se fichent des déficits, ils ne sont pas conscients de leurs conséquences, ce qui empêche les élus de monter au créneau, confie un responsable de cabinet ministériel. Ce qui m'inquiète, c'est que pour réduire ce trou on soit amené à prendre de mauvaises décisions. »en banqueroute en 2011 Avec plus de 30 milliards d'euros de déficit par an prévus pour la Sécu en 2010, 2011, 2012 et 2013, selon les projections du gouvernement, le système atteint en effet ses limites. Ce qui alarme des élus, de gauche comme de droite. Le député PS Gérard Bapt prévient que « la Sécurité sociale sera en banqueroute en 2011, son financement n'étant plus assur頻. « Je suis particulièrement troublé par l'état de nos finances sociales. Le niveau de déficit à moyen terme m'effraie. Il faut qu'il y ait une prise de conscience de la réalit頻, affirme pour sa part Yves Bur, le rapporteur UMP du PLFSS pour 2010.Dans les rangs même de l'UMP, la rapporteur du texte pour la commission des Finances de l'Assemblée nationale, Marie-Anne Montchamp, est allée plus loin. Lors du vote du texte par cette commission, la semaine dernière, elle s'est abstenue, jugeant le PLFSS « insuffisant » car mettant en lumière « les limites du système » et le caractère insoutenable des déficits dès 2010. Si bien que, fait inédit, la commission des Finances n'a pas émis d'avis favorable, en raison de l'égalité entre les voix « pour » et « contre » le projet de loi.Le malaise des parlementaires tient en particulier à la décision du gouvernement de ne pas commencer à amortir dès à présent les déficits de la Sécurité sociale de 2009 et de 2010 en les transférant à la Cades (Caisse d'amortissement de la dette sociale), car cela aurait obligé l'exécutif à augmenter la contribution de remboursement de la dette sociale (CRDS).La Cades ne jouera donc pas son rôle, et plus de 55 milliards d'euros de dettes s'accumuleront fin 2010 dans la banque de la Sécurité sociale, l'Acoss, qui n'est pas équipée pour financer de tels montants (lire ci-dessous). Marie-Anne Montchamp a proposé en vain de relever le taux de la CRDS de 0,5 à 0,72 % et d'exclure cette contribution du calcul du bouclier fiscal. Le président UMP de la commission des lois de l'Assemblée, Jean-Luc Warsmann, avait lui aussi demandé, dans un rapport sur l'optimisation de la dépense publique, que la CDRS soit retirée des impositions directes prises en compte pour le bouclier fiscal. Une proposition aussitôt rejetée par le gouvernement, fortement soutenu sur ce point par l'Élysée, bien décidé à ce qu'aucune fêlure n'entame le bouclier fiscal. Alain Vasselle, rapporteur UMP du PLFSS pour 2010 au Sénat, aurait voulu « préparer l'avenir, avec une solution mixte : prolonger de deux ou trois ans la durée de vie de la Cades et réaliser une petite hausse de la CRDS », explique-t-il à « La Tribune ».Pour l'heure, le gouvernement fait le dos rond en attendant le retour de la croissance. « Le mot d'ordre, à Bercy, c'est : À chaque jour suffit sa peine », témoigne un parlementaire. Véronique Chocron
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