Trop d'argent nuit à la stabilité

Les tumultueuses relations entre les pays émergents et les capitaux spéculatifs commencent à l'orée de la décennie 1990 : pour la première fois en 1993, les flux d'investissements privés Nord-Sud dépassent ceux de l'aide publique internationale. Cette manne ? investissement industriel et surtout financier, sur les Bourses et les marchés des changes ? fait littéralement décoller l'Asie, l'Amérique du Sud et la Russie, mais il crée aussi une bulle spéculative dans ces pays. Les monnaies, les Bourses et l'immobilier sont alors largement surévalués. En juillet 1997, les premiers signes du krach se produisent en Thaïlande, sur le marché du bath, la devise locale, que les investisseurs vendent massivement, découvrant brutalement le déficit extérieur considérable du pays. La roupie indonésienne, le ringgit malaisien, le rouble russe, le peso argentin et le réal brésilien seront bientôt emportés dans la tourmente, perdant jusqu'à 80 % de leur valeur. La crise économique qui suit est d'autant plus violente que nombre de particuliers et entreprises de ces pays s'étaient endettés en dollars, pour profiter de taux d'intérêts plus faibles. D'un jour à l'autre, leur dette réelle est multipliée par deux ou par trois. Les pays émergents connaissent en 1998 une année noire, avec des chutes du PIB comprises entre 5 % et 10 %. Un seul pays échappe à la purge, le Chili, qui avait imposé aux financiers internationaux des dépôts non rémunérés proportionnels à leur investissement, pour les dissuader d'une spéculation excessive. Après la crise, Mahatir, le Premier ministre malaisien, met en place de tels contrôles à l'entrée des capitaux.Traumatisés par cette expérience, les pays émergents vont, durant la décennie qui suit, accumuler de considérables réserves de change, investies en dollars. Ce déséquilibre d'épargne sera l'une des causes majeures de la crise financière de 2007-2008, puisqu'il stimule indirectement l'endettement des Américains. Comme toujours, le remède a des effets pervers, pour peu qu'il soit administré de façon excessive. François Lenglet
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