Le Smic, la carotte et le bâton

Avec la revalorisation du Smic de 2% au 1er juillet, le ministre du Travail  Michel Sapin considère que l’une des promesses de campagne de François Hollande a été tenue… Même si elle ne fait que des déçus. Pour autant, Michel Sapin ne veut pas en rester là. Il demande maintenant à l’ensemble des branches professionnelles d’entamer des négociations salariales pour assurer la progressivité des grilles salariales. A défaut, prévient-il, le gouvernement devra intervenir. Après la carotte, le bâton ?La hausse de 2% du Smic est en partie une anticipationDe fait, en portant le Smic horaire brut de 9,22 à 9,40 euros et le Smic mensuel (sur la base de 35 heures de travail hebdomadaires) de 1.398 euros à 1.425, 67, le gouvernement affiche une progression de 2%. En réalité, le vrai \"coup de pouce\" est limité à 0,6%, soit, pour Michel Sapin \" le plus fort depuis 1997\". Il est exact que le dernier \"coup de pouce\", en 2006, était égal à 0,3% et, l’avant dernier, en 2001, s’élevait à 0,3% également. Quant au 1,4% restant, il correspond en fait à l’inflation enregistrée entre novembre 2011 (derrière référence prise en compte pour l’augmentation du Smic au 1er janvier 2012) et avril 2012. \" Ce sont ainsi six mois de perte de pouvoir d’achat qui sont effacées\" a estimé le ministre du Travail. Mais, attention, il s’agit d’une anticipation sur la revalorisation légale du 1er janvier 2013. ce qui signifie que la prochaine hausse ne prendra en compte que l’inflation enregistrée entre mai et novembre. Sauf, si, d’ici là, les règles de revalorisation du Smic sont modifiées, comme le proposait le candidat Hollande qui souhaitait davantage tenir compte dans son calcul de la progression de la croissance. Le sujet sera sur la table de la Conférence sociale des 9 et 10 juillet.En attendant, cette progression de 2% a mécontenté toute le monde : les syndicats, bien sûr, qui estiment le coup de pouce totalement insuffisant… et le patronat qui le trouve trop élevé. Jérôme Frantz, le président de la Fédération des industries mécaniques le qualifiant de \"connerie\"… même si le Medef a poussé un \"ouf\" de soulagement en le jugeant finalement \"raisonnable\".Vers un \"round\" de négociations salarialesAu-delà de la question du Smic, c’est la volonté du gouvernement de voir s’ouvrir un \"round\" de négociations salariales dans les branches qui constitue une nouveauté. En effet, après la revalorisation qui interviendra au 1er juillet, d’après les chiffres du ministère du Travail, 3 branches sur 4, parmi celles de plus de 5.000 salariés, vont se retrouver avec un premier coefficient de leur grille inférieur au Smic. Ce sont ainsi plus de 100 branches au total qui se situent  \"hors la loi\", dont 26 étaient déjà dans cette situation avant la revalorisation. Michel Sapin leur donne quelques semaines pour négocier. A défaut, via l’intervention d’un syndicat, il demandera la tenue de commissions mixtes paritaires, pour obliger à l’ouverture d’une négociation. Et si cela ne suffit pas, le ministre se dit disposé a devenir plus contraignant. Comment ? Peut-être en sortant du congélateur des dispositions jamais appliquées de la \"loi en faveur des revenus du travail \" du 3 décembre 2008, votée à l’initiative du ministre UMP du travail de l’époque, Xavier Bertrand.Suppression des allègements de cotisationsCe texte contenait en effet quelques dispositions très contraignantes. Ainsi, en cas de premier niveau de grille inférieur au Smic dans une branche, le gouvernement peut décider que le barème de réduction général de cotisations patronales de sécurité sociale (appelé \"dispositif Fillon\" applicable de façon dégressive entre un et 1,6 Smic) ne soit plus appliqué au niveau du Smic mais au niveau du premier échelon de la grille. Ce qui aura pour conséquence de tirer vers le bas l’ensemble des allègements.De même, toujours selon cette loi, les entreprises qui ne respecteraient pas l’obligation annuelle de négocier sur les salaires peuvent se voir infliger une diminution de 10% des allègements de cotisations sociales patronales la première année. Puis, après trois ans sans négociation, la totalité des réductions et exonérations de cotisations peut être supprimée… Dissuasif. A noter qu’il s’agit d’une obligation de négocier et pas de conclure, ce qui laisse une marge de manœuvre. Va t-on voir un ministre de gauche appliquer pour la première fois des dispositions décidées par un ministre de droite? 
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