Médecine du travail  : chronique d'un avenir annoncé

La santé au travail est une priorité pour les salariés qui attendent de leur employeur le respect d'une obligation de résultat garantissant leur santé et leur sécurité. Les entreprises sont par ailleurs de plus en plus nombreuses à reconnaître qu'une part de leur compétitivité et de leur attractivité dépend d'une amélioration notable des conditions de travail. C'est enfin une priorité pour l'État puisqu'il en va de l'intérêt général.Depuis une dizaine d'années, les ministres du Travail n'ont eu de cesse de rappeler cette priorité.Progresser dans la connaissance des risques professionnels, améliorer les normes et leur effectivité, donner des objectifs clairs et chiffrés pour protéger les salariés les plus exposés ou de risques spécifiques (risques chimiques, troubles musculo-squelettiques...), créer une cohérence entre les multiples acteurs compétents, tels ont été les principaux axes des politiques menées ces dernières années.On ne pouvait bâtir un nouveau système de santé au travail sans l'expertise, la connaissance très fine des milieux professionnels et l'engagement des médecins du travail. Mais il convenait alors de bâtir une réforme qui constitue les fondations d'un dispositif dans lequel les médecins du travail avec les services de santé au travail auraient toute leur place.Sur le fondement de la loi du 31 janvier 2007, il fut demandé aux partenaires sociaux de négocier sur cette base. En dépit des efforts et du courage d'une partie des représentants des organisations professionnelles et syndicales, un accord interprofessionnel n'a pu être conclu.Les ministres du Travail exposèrent devant les partenaires sociaux, les associations et les organismes compétents leur volonté de dépasser cet échec en prenant en compte le travail effectué et de bâtir une réforme fondée sur les axes suivants : faire des médecins du travail et des services de santé au travail les acteurs de proximité de la prévention des risques en milieu professionnel, démarche à laquelle seraient associés des spécialistes d'autres disciplines non médicales, élargir le bénéfice de la médecine du travail aux salariés qui, en fait ou en droit, sont trop souvent aux marges du droit du travail, renforcer l'attractivité et la professionnalisation de la médecine du travail et, enfin, améliorer la gouvernance des services de santé au travail en prévoyant une gestion paritaire et la définition au niveau régional d'objectifs précis et concrets.Les conditions de travail étaient dorénavant au centre de problématiques nouvelles s'articulant autour des questions de pénibilité, de travail des seniors et de gestion des âges et donc de retraite. Pour ces raisons et compte tenu également de l'urgence qu'accordait le gouvernement à ce dossier, les dispositions législatives concernant la médecine du travail furent ajoutées par voie d'amendement au projet de loi sur les retraites.Il n'est dans l'intention d'aucun responsable public de porter atteinte d'une quelconque façon directe ou indirecte à l'indépendance du médecin du travail, garantie par le code de déontologie et par la protection dont bénéficie tout médecin du travail pour toute mesure concernant sa carrière. La reconnaissance de l'autorité administrative de l'employeur sur l'organisation des services autonomes dans les grandes entreprises n'affecte bien évidemment pas la mission du médecin et donc son indépendance.La vraie menace qui porte sur la médecine du travail, y compris sur son indépendance, ne résulte pas de l'exégèse de tel ou tel alinéa du projet mais du maintien d'un statu quo qui empêcherait les médecins du travail de répondre aux défis nombreux auxquels ils sont confrontés. En un mot, le vrai combat est de bâtir ensemble une médecine du travail toujours indépendante mais aussi porteuse de progrès réel et effectif dans le champ complexe du monde du travail.
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