Non, l'austérité n'a pas sorti l'Italie de l'impasse

C\'est attendu. Bruxelles va demander ce mercredi la sortie de l\'Italie de la procédure d\'infraction pour déficit excessif après la cure d\'austérité imposée par le gouvernement technique de Mario Monti. De quoi récupérer une certaine marge de manœuvre selon les dirigeants italiens. \"La simple fermeture de la procédure nous permettra une marge de dépense de 7 à 10 milliards d\'euros, 12 selon les prévisions les plus optimistes\", a expliqué Graziano Delrio, le ministre italien aux Affaires régionales au quotidien italien La Stampa. De son côté, le Premier ministre Enrico Letta a évoqué une marge de manœuvre supplémentaire de 8 milliards d\'euros en 2014. Et déjà, l\'Italie, qui veut voir dans cette sortie de la procédure pour déficit excessif une ouverture pour une politique de relance se demande que faire de cet argent.La charrue mise avant les boeufsMais en réalité, la simple sortie de la procédure ne change rien aux objectifs budgétaires fixés pour un État. Et du point de vue de la Commission, le problème italien n\'a pas disparu. La dette dépasse toujours 130% du PIB, l\'une des plus élevées en Europe, et des efforts de réduction doivent être faits en ce sens, explique-t-on à Bruxelles. En effet, comme cela est inscrit dans le pacte de stabilité et de croissance signé par les États-membres et retranscrit dans la législation italienne, la dette ne doit en principe pas dépasser 60% du PIB. Et l\'objectif fixé par le pacte est d\'atteindre l\'équilibre budgétaire. A ce titre, l\'Italie sera encore l\'objet d\'une surveillance toute particulière par la Commission européenne.En fait, en évoquant de nouvelles marges de manœuvre, les dirigeants italiens anticipent un autre débat : celui des investissements productifs des États dans le calcul du déficit public. L\'idée défendue par Rome est d\'accorder aux États une marge de manœuvre pour financer des investissements structurels au service de la croissance et de l\'emploi. Le locataire du palais Chigi entend en fait profiter de la reconnaissance par la Commission des efforts accomplis pour faire entendre sa voix auprès des partenaires européens lors du prochain Conseil de la fin juin. Son objectif : obtenir une marge de dépense publique équivalente à 0,5% du PIB pour financer ces investissements dits \"vertueux\". Ce qui correspondrait aux 7 à 12 milliards d\'euros évoqués. A Bruxelles, on considère cette somme comme irréaliste. Mais on prévoit de faire des recommandations sur la question d\'ici à la mi-juin, avant le prochain Conseil européen.La situation italienne est toujours tendueMais pour l\'heure, la situation de la péninsule reste difficile. Bruxelles s\'attend à un recul du PIB de 1,3% cette année et le chômage ne cesse d\'augmenter. Dans ce contexte, les finances publiques restent tendues et les rentrées fiscales restreintes par la récession mettent Rome sous pression. D\'autant plus que le gouvernement a dû agir dans l\'urgence pour suspendre la très impopulaire taxe foncière (exigence de Silvio Berlusconi pour maintenir la coalition), refinancer la Cassa integrazione en faillite, qui sert à aider les entreprises en cas de baisse de l\'activité pour préserver l\'emploi. Et elle va devoir financer une dette de l\'administration vis-à-vis du secteur privé à hauteur de 40 milliards d\'euros en deux ans (exigence de Bruxelles).Sans ces nouvelles marges de manœuvre qu\'il réclame, Enrico Letta ne pourra pas financer son plan pour la lutte contre le chômage, estimé dans la presse italienne à 8 milliards d\'euros sans faire progresser l\'endettement. Celui-ci comprend notamment la mise en place d\'un contrat de génération calqué sur le modèle français, mais aussi la réduction du poids de la fiscalité sur le travail, réclamée par Bruxelles. Or le Premier ministre italien ne cesse de clamer haut et fort que le respect des critères budgétaires européens est la condition de la crédibilité du pays tant vis-à-vis des partenaires européens que des marchés. Si l\'Italie a officiellement regagné un peu de cette crédibilité qui lui faisait défaut aux yeux de Bruxelles, la route qui la mènera vers une véritable politique de relance de la croissance et de l\'emploi est encore longue.
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