Duel des géants de l'énergie dans les terminaux méthaniers

La France croule sous les projets de terminaux méthaniers, ces installations portuaires qui permettent d'accueillir les énormes tankers remplis de gaz naturel transporté sous forme liquide, à ? 160°C, et de lui rendre sa forme gazeuse. Le tout nouveau terminal que GDF Suez exploite à Fos-Cavaou, depuis avril 2010, à 20 % de ses capacités, doit être autorisé aujourd'hui par arrêté préfectoral à fonctionner à plein régime. Les débats publics portant sur deux autres projets, toujours à Fos, vont se dérouler du 6 septembre au 17  écembre prochain.Exactement en face des installations de Fos-Cavaou, de l'autre côté du canal qui mène au terminal historique Fos-Tonkin de GDF Suez, - qui a accueilli en 1972 les premiers méthaniers en provenance d'Algérie -, Shell (10 %) et le spécialiste néerlandais des hydrocarbures Vopak (90 %) projettent de construire d'ici à 2016 un terminal aussi grand que celui de Cavaou (8 milliards de mètres cubes), pour un budget de 800 millions à 1 milliard d'euros. En même temps, GDF Suez présente un dossier de débat public pour des travaux de maintenance, voire d'extension, de son port historique de Fos-Tonkin, pour un budget de 300 à 450 millions d'euros. Et ce, alors que ces installations anciennes qui ne peuvent pas accueillir les méga-tankers actuels, trop gros pour faire demi-tour au fond du canal, semblaient vouer à la fermeture à partir de 2014. De son côté, EDF, rejoint en février par Total à la recherche d'investissements industriels pour compenser le fermeture de sa raffinerie des Flandres, étudie depuis 2006 la construction à Dunkerque d'un terminal de 8 à 13 milliards de mètre cubes. Si l'électricien a annoncé en juin dernier le report, sans fixer de nouvelle échéance, de sa décision d'investissement, le projet est loin d'être enterré. Ses promoteurs s'affichent très satisfaits du « test de marché » réalisé début 2010 sous le contrôle de la Commission de régulation de l'énergie. Cette procédure vise à interroger les différents clients gaziers potentiels sur leur volonté de réserver des capacités du futur terminal à long terme. Selon nos informations, l'espagnol Gas Natural s'est notamment porté candidat.Un troisième nouveau terminal est enfin prévu de longue date au Havre par Poweo. Un projet de 800 millions à 1 milliard d'euros pour 9 milliards de mètres cubes. Gelé pour six mois en janvier 2010, le dossier reste d'actualité à moyen terme. « Nous avons des discussions particulièrement avancées avec un acteur du monde économique », explique un porte-parole de l'électricien contrôlé par l'autrichien Verbund. « Nous restons très positifs sur ce projet, confiants dans la qualité du site et les besoins en France à moyen terme », ajoute-t-il.Dimension européenneReste que si tous ces projets voient le jour, ils représenteront des capacités équivalent à 100 % de la consommation française de gaz naturel (un peu moins de 50 milliards de mètres cubes, importés dans leur totalité) contre 35 % aujourd'hui, porté à 50 % avec la mise en service complète de Fos-Cavaou. « Le marché du GNL doit s'apprécier dans sa dimension européenne », explique Thierry Bros, analyste à la Société Généralecute; Générale. « Les terminaux français pourront servir de points d'entrée pour du gaz qui irait, par gazoduc, chez nos voisins européens du nord comme du sud. Aujourd'hui, faute de capacité suffisante en France, des méthaniers choisissent d'aller dans un terminal en Grande-Bretagne, quitte à faire ensuite transiter le gaz par les conduites sous la Manche ». Un détour qui prive un terminal français d'une recette d'un million d'euros, tarif moyen pour le déchargement d'un bateau.« Nous manquons de capacités en France », affirme Thierry Trouvé, patron d'Elengy, filiale de GDF Suez en charge des terminaux du groupe. « Nos trois ports sont totalement réservés pour 2010 et 2011. Celui de Montoire de Bretagne l'est sur dix ans », ajoute-t-il. Il n'empêche que les différents « tests de marché » réalisés récemment, notamment pour Fos-Tonkin, se sont révélés en dessous de ses attentes. « Nos clients gaziers ont du mal en ce moment, notamment avec la crise du GNL dans le monde, à s'engager sur les vingt prochaines années. On les interrogera à nouveau dans les prochains mois », ajoute-t-il. « Ce qui est sûr, c'est que nos projets d'extension nous permettront d'offrir des tarifs 50 % moins chers que ceux de n'importe quel nouveau terminal », conclut-il. Avis non partagé chez EDF pour son projet à Dunkerque : « Notre installation, non régulée, nous permettra de proposer une flexibilité cruciale sur ce marché, qui pèse davantage dans le coût total du service que le simple tarif du terminal ». A suivre.
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