Culture et économie main dans la main

Le succès du premier forum "Croissance et Culture" qui s'est tenu à la mi-novembre à Avignon a montré combien la culture est devenue un enjeu majeur pour l'économie de la France et son rayonnement international. Nombre d'initiatives prises par le gouvernement ont pour objectif de favoriser leur développement conjoint, que ce soit en termes d'investissement ou encore de réglementation, estiment Christine Lagarde, ministre de l'Economie, et Christine Albanel, ministre de la Culture.

Cet été, l'actrice Valérie Dréville avait lu des extraits de "La Divine Comédie" dans la cour d'honneur du palais des Papes, à Avignon. A la mi-novembre, le premier forum "Culture, Economie, Médias" a réuni entre les mêmes murs plus de 250 acteurs majeurs de la culture et de l'économie, issus d'une vingtaine de pays, autour du thème "Culture et Croissance économique". L'économie : enfer ou paradis pour les artistes ?

Ne cédons pas à l'illusion romantique d'une culture détachée de l'économie. C'est cette illusion qui conduit certains à applaudir le piratage des ?uvres sur Internet, comme si les créateurs étaient enfin libérés des "vampires" que seraient les producteurs ou les diffuseurs. Tant de bonnes intentions ne peuvent que nuire aux entreprises de la musique, du cinéma, bientôt du livre. Souvenons-nous que l'Athéna sculptée par Phidias était couverte d'or ; que l'art de la Renaissance n'aurait jamais vu le jour sans grands mécènes, qui étaient bien souvent de grands banquiers ; et qu'aujourd'hui les fondations d'entreprise permettent à nombre d'artistes contemporains de vivre ? et de vivre bien ? de leur métier. Ce qui n'empêche pas les artistes de se moquer parfois de leurs bienfaiteurs : en ces temps de crise des subprimes, les financiers trop cupides pourraient se rendre au Louvre, regarder avec profit un fameux tableau de l'école hollandaise, "Le Prêteur et sa femme" de Quentin Metsys...

La première des nombreuses vertus du forum d'Avignon a été de replacer les enjeux des industries culturelles dans leur élément naturel, celui des flux mondiaux de circulation des richesses, des ?uvres et des hommes. Quelques chiffres suffisent à démontrer combien la culture est vitale pour notre économie. Les activités culturelles au sens large représentent aujourd'hui 1/40ème du PIB et de l'emploi dans l'Union européenne. Autant dire que la culture est une valeur sûre, garantissant dans notre pays un demi-million d'emplois. 90% des entreprises du secteur sont des PME de moins de vingt salariés (labels de production et de distribution de la musique, du cinéma et de l'audiovisuel, éditeurs et librairies, galeristes et antiquaires). En dépit des difficultés liées au pouvoir d'achat, les Français restent très attachés aux dépenses culturelles, auxquelles ils consacrent 30 milliards d'euros par an et qui ne donnent aucun signe de fléchissement.

La culture est un élément fondamental de notre identité dans le monde et de notre attractivité, qui contribue à faire de la France le troisième pays récipiendaire d'investissements directs à l'étranger et la première terre d'accueil touristique. Combien d'investisseurs se sont décidés à implanter un nouveau centre de production ou un siège européen en France en pensant à nos théâtres, nos cinémas, nos opéras, nos musées, nos festivals et nos restaurants ?

Donnant, donnant. Si la culture est un moteur de croissance, les pouvoirs publics doivent favoriser son développement. Ainsi, nous avons voulu mobiliser l'argent des épargnants et des donateurs au service de la culture. La loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat (Tepa) de l'été 2007 permet de réorienter une grande partie de l'ISF vers les PME et les fondations reconnues d'utilité publique ? près de 1 milliard d'euros pour cette année ! ?, notamment dans le domaine culturel.

Par ailleurs, les fonds de dotation, créés par la loi de modernisation de l'économie, vont permettre à des institutions comme le Louvre de développer des ressources de mécénat de très long terme, à l'image des "Endowment Funds" qui ont démontré leur efficacité outre-Atlantique. Enfin, le projet de loi de finances rectificative pour 2008 proposera au parlement de donner un nouveau souffle au mécénat d'entreprise, en étendant les avantages fiscaux prévus pour l'achat d'?uvres d'artistes vivants aux entreprises individuelles et aux professions libérales et en les élargissant pour les PME.

En plus de mobiliser l'argent des entreprises et des ménages, il faut doter les entreprises culturelles d'un environnement juridique et économique propice à leur compétitivité et qui assure l'accès aux marchés des ?uvres les plus diverses. Ainsi, le projet de loi "création et Internet", déjà voté par le Sénat, pose le cadre juridique nécessaire pour faire des réseaux numériques un vecteur privilégié de diffusion de la musique, des films, bientôt de la littérature. Le régime des ventes aux enchères sera profondément modernisé dans les mois qui viennent à l'occasion de la transposition de la directive "services".

Ces projets majeurs viennent compléter les nombreuses mesures déjà adoptées depuis dix-huit mois en faveur des industries culturelles, et particulièrement des "indépendants" et des PME, qui jouent un rôle majeur dans le renouvellement de la création : exonération de taxe professionnelle des librairies indépendantes, élargissement du crédit d'impôt pour la production des jeunes talents musicaux, orientation de la collecte des Sofica vers la production de films indépendants... La création, au sein du ministère de la Culture, d'une nouvelle direction générale spécialement en charge de l'économie culturelle montre bien la nouvelle direction prise. Un magazine anglo-saxon avait prédit il y a un an "la mort de la culture française". Prouvons le contraire, en investissant dans l'économie de la culture et dans l'avenir !

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Commentaire 1
à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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Il est grand temps que la france ce réveillle dans ce domaine

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