Changement climatique : poursuivons la lutte !

La réunion du Conseil européen à Bruxelles, précédant la conclusion de la conférence de Poznan, sera décisive pour définir les positions de l'Europe sur les objectifs de réduction de gaz à effet de serre. Jean-Pierre Clamadieu, PDG de Rhodia, estime que la crise ne doit pas faire oublier cette priorité, mais souligne les risques pour la compétitivité des entreprises et les dangers d'une "fuite de carbone" vers les pays moins exigeants.

En déclarant récemment "delay is no longer an option, denial is no longer an acceptable response", le président élu Barack Obama s'est engagé à réduire les émissions américaines de gaz à effet de serre de 80% d'ici à 2050 et à investir 150 milliards de dollars en faveur des énergies renouvelables. Cette position assumée en pleine crise économique par le futur président des Etats-Unis représente une véritable rupture pour un pays qui avait toujours refusé de ratifier le protocole de Kyoto. C'est un signe fort adressé à la communauté internationale, à l'heure où celle-ci prépare le traité qui prendra en 2013 la suite de ce protocole.

Même si les étapes décisives ne devraient être franchies que l'an prochain lors de la conférence de Copenhague, les discussions qui se tiennent depuis le 1er décembre à Poznan en Pologne dans le cadre de la 14ème conférence des Nations unies sur le changement climatique constituent un jalon important.

Cependant, c'est à Bruxelles, demain et après-demain, que devraient être prises les décisions à plus fort impact pour la France. Le conseil des chefs d'Etat ou de gouvernement se prononcera sur le dispositif européen de quotas d'émission de gaz à effet de serre pour la période 2013-2020. En se donnant pour objectif une réduction de 20% de ses émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2020, l'Europe affirme clairement sa volonté de leadership et d'exemplarité.

Les industriels français, résolument engagés dans la lutte contre le changement climatique, soutiennent cet objectif ambitieux et exigeant. Ils n'ont d'ailleurs pas attendu les décisions européennes pour agir et sont fiers d'avoir déjà réduit de plus de 20% leurs émissions entre 1990 et 2005, alors que la production augmentait, elle, de 17%. Rappelons que, durant la même période, les émissions "diffuses" des transports et du logement ? secteurs qui émettent deux fois plus de gaz à effet de serre que l'industrie ? étaient en augmentation de plus de 20%.

La crise économique ne remet pas en cause cet engagement de long terme de l'industrie française. Nous ne voulons pas "jouer la montre". Au contraire, les entreprises ont besoin de décisions rapides qui leur donnent de la visibilité, et nous soutenons la volonté du président de la république, président en exercice du Conseil européen, de trouver un accord politique sur ce sujet complexe, tout en rappelant que le consensus ne doit pas être obtenu à n'importe quel prix.

Il est capital que ce nouvel effort des entreprises européennes n'obère pas leur compétitivité. Celles-ci ne peuvent supporter des surcoûts disproportionnés, qu'il s'agisse de surcoûts directs liés à leurs propres efforts de réduction des émissions, ou d'effets indirects sur les coûts de l'électricité. Le projet initial de mise aux enchères totale des quotas d'émission aurait ainsi gravement menacé la pérennité d'une activité industrielle en Europe et ne pouvait être adopté en l'état. Pénaliser les entreprises sur la partie incompressible de leurs émissions reviendrait à les inciter à réduire leur activité en Europe. Au contraire, il faut les encourager à évoluer rapidement vers les technologies les moins émettrices. La mise aux enchères des quotas ne doit ainsi avoir lieu que pour les émissions dépassant les seuils correspondant aux meilleures technologies disponibles.

Au moment où l'environnement économique se dégrade, la transition vers une économie moins carbonée ne doit pas exposer davantage l'industrie européenne à la concurrence internationale, ce qui conduirait inéluctablement à des "fuites de carbone" vers des pays moins exigeants. Les secteurs les plus exposés doivent être déterminés sur la base de critères objectifs, inscrits dans le texte même de la directive.

Enfin, la lutte contre le changement climatique doit être l'affaire de tous?: il faut intensifier les efforts au-delà du seul secteur industriel, qui n'est responsable que de 20% des émissions françaises de gaz à effet de serre. En préservant la compétitivité des entreprises, nous pourrons poursuivre les efforts déjà engagés tout en maintenant l'activité et les emplois industriels.

Le changement climatique et ses conséquences sont des préoccupations partagées aujourd'hui par l'ensemble des opinions publiques, des responsables politiques et des acteurs économiques. Ces derniers appellent à poursuivre la lutte?: la crise actuelle ne doit pas nous faire oublier cette priorité environnementale.

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