Patrons français : nouveaux pauvres ?

Par Jacques Marceau, président d'Aromates Relations Publiques, président de l'Institut Syntec des études et du conseil, et enseignant à l'Institut d'études politiques (IEP) d'Aix-en-Provence.

Alors que le grand et indécent déballage sur les rémunérations de ces dirigeants salariés que l'on persiste à appeler "patrons", continue à coup d'annonces sur des rémunérations qui ressemblent à des gros lots de loterie, ils sont près de 2,2 millions à travailler dur et sans filet pour maintenir à flot leur entreprise.

Ils ont un revenu moyen de 2.158,33 euros net par mois (chiffres Insee), pour un minimum de 60 heures de travail par semaine, ce qui place leur salaire horaire largement sous la barre du SMIC. De plus, et dans de très nombreux cas, le conjoint participe à l'activité sans statut social, ni salaire.

Non seulement ils n'ont pas de parachute doré, mais ils n'ont pas de parachute du tout : contrairement à n'importe quel salarié, cadre ou non cadre, ils n'ont pas le droit au chômage.

Endettés ou "bénéficiant" d'un découvert, ils ont donné des cautions personnelles et risquent de voir, à tout moment, la banque leur confisquer leur maison, leur outil de travail ou de se retrouver endettés à vie.

Le risque, eux, ils connaissent !

Ceux-là ne font pas la une des journaux, ils ne s'expriment pas à la télévision ou à la radio. Les organisations patronales sensées les représenter les ignorent. C'est vrai qu'ils n'ont pas les moyens de cotiser au Medef ou à la CGPME, ni de consacrer du temps à autre chose que la roue du hamster dans laquelle ils tournent : trop de nuits blanches à espérer qu'une commande arrive, que les organismes sociaux leurs laissent un léger répit, ou qu'un client envoie enfin son règlement. Rageant quand on sait que le niveau de trésorerie est l'un des critères de calcul des fameux bonus des cadres dirigeants des grands groupes et que cette trésorerie est constituée sur le dos des plus petits à coups de délais de règlement indécents.

Le succès du statut de l'auto entrepreneur, dont on pourrait à juste titre se réjouir, fait qu'ils seront de plus en plus nombreux à travailler dur avec la précarité et le risque maximum, c'est-à-dire pénal, pour seule récompense.

Et pourtant, ce sont eux qui font tourner la "machine France" en travaillant, en innovant, en créant des emplois et en assumant les charges qui font la qualité de vie des Français. Par leur engagement et leur travail, ce sont eux qui financent les salaires de ceux-là mêmes qui clament haut et fort qu'ils ne veulent pas rendre des comptes sur leurs performances.

Les lignes ont aujourd'hui bougé et la crise actuelle accélère le mouvement.

Ceux qui exploitent le travail des autres sont en train de changer de camp et les nouveaux pauvres ne seront pas, demain, forcément ceux d'aujourd'hui.

Prenons garde à ce que le modèle français, dont on nous dit volontiers qu'il retarde les effets de la crise, ne nous empêche pas de repartir,... définitivement.

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Commentaires 6
à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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Pour infos : "ces dirigeants salariés" ne peuvent adhérer à la CGPME, mais au MEDEF. Car le statue de la CGPME oblige d'être propriétaire de son entreprise. Ce qui donne un syndicat moins "actif" car les entrepreneurs sont dans leur entreprise et man...

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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Les salariés qui sont employés dans une entreprise ne connaissent pas leur bonheur, la garantie de toucher un salaire régulier, de ne pas déduire les charges patronales (Arghhhh!!) râler à cause des charges sociales... ne pas avoir à fouiller partout...

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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J'ai l'impression que chacun découvre la vie ici... C'est comme partout il y a les bonnes pratiques et les mauvaises...et comme toujours on ne parle que des mauvaises car c'est ce que l'on retient plus facilement et parce que cela est choquant. Bref ...

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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J'ai l'impression que chacun découvre la vie ici... C'est comme partout il y a les bonnes pratiques et les mauvaises...et comme toujours on ne parle que des mauvaises car c'est ce que l'on retient plus facilement et parce que cela est choquant. Bref ...

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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Je crois qu'on se trompe singulièrement de cible ici : la problèmatique et le haro lancé sur la rémunération des dirigeants ne concerne absolument pas les milliers de PME que compte la france, mais bien les quelques centaines de grands groupes dans l...

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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Il y a des bons et des méchants comme partout.... Je pense que l'on ne peut pas généraliser de cette manière là les choses. Bien évidemment il y a des patrons qui n'abusent pas et sans doute plus que ceux qui abusent... Il en va de même pour les sala...

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