La Grèce peut faire plus, la zone euro aussi !

Il n'y a aucune raison pour que la spéculation actuelle contre la zone euro se calme rapidement. L'ajustement budgétaire prendra du temps, surtout dans les pays les plus fragiles. Le problème grec est gérable tant que les marchés croiront en un soutien européen. Mais la Grèce doit s'aider elle-même en faisant un peu plus d'efforts. Face au risque d'une "fatigue des réformes", une aide extérieure, du FMI ou de l'Europe, sera peut-être nécessaire.

La zone euro traverse une tempête, mais il serait bon de s'accrocher parce que les intempéries risquent de durer : la question grecque est vive à court terme à cause des besoins immédiats de financement, mais l'ajustement des finances de la Grèce prendra du temps. De même, les questions d'ajustement budgétaires auxquelles la zone euro est confrontée ne sont ni nouvelles ni hors de proportion à l'échelle des pays de l'OCDE, mais prendront du temps à se résoudre. Ainsi la situation grecque est sérieuse et inquiète en partie parce qu'elle pose une question nouvelle à la zone euro (celle de la possibilité d'un défaut), mais aussi parce qu'elle remet en exergue les discordances européennes sur la question budgétaire, dont on ne se débarrassera pas en trois mois.

La situation des finances publiques de la Grèce est indéniablement critique : un déficit extérieur de près de 14% du PIB, un déficit budgétaire de près de 13% du PIB, une dette aux alentours de 125% du PIB, un impact du vieillissement démographique le plus coûteux de la zone euro puisqu'il ajoutera en moyenne près de 10 points de PIB de dépense par an à l'horizon 2035 en l'absence de réforme. Ajoutons à cela un historique, tant en termes d'efforts que de comptabilité pauvre, et des besoins d'argent pressant pour continuer de faire fonctionner son administration publique et système de sécurité sociale.

En outre, la zone euro a des finances généralement fragilisées. Après la crise, son endettement public aura augmenté largement au-delà des ratios autorisés par le traité européen, et va encore progresser au-delà de ce que les effets du vieillissement de la population vont entraîner. Ils aboutiront à une hausse des dépenses publiques de 3,2 points de PIB supplémentaire, annuel, à l'horizon 2035. La zone euro n'est en rien particulière pour ces chiffres : le Royaume-Uni, comme les Etats-Unis affichent des déficits de plus de 11 points de PIB en 2009, et leurs dettes, certes parties d'un niveau plus faible, pourraient frôler les 80 points de PIB en 2011. Le vieillissement démographique ne les épargnera pas non plus. Au Royaume-Uni par exemple, ce sera 2,7 points de PIB supplémentaires par an au même horizon.

La zone euro a donc à faire face à deux problèmes : un de court terme, la Grèce, et l'autre de moyen terme, l'ajustement budgétaire de de ce pays et plus largement de la zone. Le problème de court terme est gérable : confiant dans un soutien européen, les marchés ont de "l'appétit" pour la dette grecque, qui apporte un taux de rémunération bien supérieur à ses voisins européens. Or tant que les investisseurs sont prêts à acheter sa dette, la Grèce peut continuer de se financer. En même temps, sous la pression plus forte des instances européennes, elle peut aussi ajuster ses finances publiques. Avec un ajustement tendanciel (même plus modeste qu'affiché), les instances européennes seront satisfaites dans le sens où elles continueront de soutenir la Grèce. Et les marchés seront satisfaits aussi, puisque confortés dans leur confiance d'un sauvetage de la zone euro.

Avec un ajustement plus important, cette mécanique est encore plus juste. Or la Grèce peut faire un peu plus d'effort que ce qu'elle a prévu : près de la moitié de ses annonces sont en fait l'extension de mesures temporaires prises en 2009 pour éviter la récession, et beaucoup des remèdes sont des hausses de recettes fiscales provenant de mesures visant à réduire l'économie "grise". Dans le même temps, 75% de l'opinion grecque cautionnent le gouvernement dans ses réformes et les syndicats et le Parti socialiste majoritaire dialoguent bien.

Au-delà de 2010, les choses se compliquent : non seulement une "fatigue des réformes" peut s'installer, mais les autres pays de la zone euro vont aussi devoir décider d'un ajustement budgétaire. La Grèce aura alors sûrement besoin d'une aide financière extérieure, la question est de savoir si elle la trouvera avec l'euro Que ce soutien implique le FMI ou non, quelle importance ? L'important est que les pays de la zone euro montrent qu'ils peuvent faire preuve de pragmatisme et monter une solution coordonnée, qu'elle invoque un article du traité opportun ou implique le FMI. C'est dans sa capacité à gérer ce problème sans heurt que la zone euro saura convaincre de son existence. En revanche, les déclarations contradictoires des différentes instances européennes et nationales font du mal à l'image de la zone euro et ne facilitent pas la tâche des autorités grecques, ni ne leur fournissent les motivations nécessaires.

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