Plaidoyer pour un fonds de remédiation

OPINION. La mise en palce d'un fonds de rémédiation répondrait à la nécessité de financer des initiatives que l'état actuel des deniers publiques ne permet pas de satisfaire, et dont le bénéfice immédiat n'est pas acquis, mais qui se justifient à long terme par le soucis de l'intérêt général. Par Corinne Lepage.
Corinne Lepage.
Corinne Lepage. (Crédits : Christian Hartmann)

L'idée d'un fond de remédiation avait été évoquée par mes soins voici une dizaine d'années après discussion avec le professeur Robert Bell. Elle avait été reprise dans le rapport sur l'économie du Nouveau Monde remis en 2015 à Ségolène Royal. Aujourd'hui, cette proposition mérite d'être remise au centre des débats. De quoi s'agit-il ? Il s'agit de la création d'un fonds dédié à des opérations dont on verra le contenu ci-dessous, dont la souscription présenterait une double originalité. D'une part, les fonds seraient bloqués pour 30 ans sans possibilité de les récupérer sauf à perdre tout le bénéfice de l'opération. Un modeste intérêt (cependant supérieur au taux confiscatoire du livret A) serait versé aux souscripteurs. La contrepartie de ce blocage durant 30 ans serait un régime fiscal plus que favorable puisque les sommes versées le seraient en dehors de tout impôt sur les successions et de tout impôt sur le patrimoine (IFI).

La justification de cette générosité fiscale serait exactement la même que celle de la fiscalité de la forêt. Gérer une forêt et planter des arbres ne rapporte rien à court terme. La souscription au fond de remédiation s'inscrit dans une perspective de long terme (30 ans) et consiste donc à investir pour ses propres enfants et leur génération. Tout comme pour la propriété forestière, dont il est donc parfaitement logique d'exonérer ces sommes de tout droit de succession. Ainsi, le fonds pourrait-il être rapidement abondé par ce moyen ce qui n'exclut évidemment pas que des taxes publiques affectées puissent être utilisées, en particulier celles issues de transferts de subventions directes et indirectes aux hydrocarbures.

Un intérêt économique à long terme

L'objectif du fonds serait la remédiation et l'adaptation, c'est-à-dire toutes sortes de dépenses dont l'intérêt immédiat n'est pas acquis, qui sont indispensables et justifiées par l'intérêt général mais que l'état des finances publiques ne permet pas de satisfaire. Dans cette catégorie figurent les dépenses d'adaptation au changement climatique en commençant bien entendu par l'habitat mais également les déplacements de certaines zones littorales, la reconquête de voies de chemin de fer secondaires comme en Allemagne les dépenses  de mutation du monde agricole etc. figurent également les dépenses de reconquête de la biodiversité et des milieux naturels ainsi que la dépollution des terres contaminées et la rénovation des entrées de ville qui pourraient alors devenir selon les cas des terrains à bâtir ou des terrains agricoles.

Toutes ces dépenses qui ont un intérêt économique à long terme évident, qui peuvent constituer de la récupération de pouvoir d'achat pour les individus, qui génèrent une activité économique locale, présentent en revanche peu ou pas de rentabilité et surtout ne trouvent aucun fonds public pour les engager. Mais, ne pas les engager alors qu'elles sont indispensables constitue une faute dont les effets économiques et financiers à moyen long terme seront majeurs. La création de ce fonds devrait bien entendu s'accompagner d'une véritable sécurité juridique pour les souscripteurs, tout d'abord en ce qui concerne le régime fiscal, d'autre part en ce qui concerne l'affectation des sommes obtenues à des investissements dont la nature et l'objectif seraient très clairement précisés même si bien évidemment les opérations particulières n'ont pas être visées.

Une solution d'investissement pour des projets d'intérêt public

Il est en effet impératif que ce fond ne puisse en aucune manière devenir un mode nouveau d'alimentation du budget général et de remboursement de la dette publique. Certes, il s'agit bien de rembourser une dette publique, mais elle n'est pas financière. Corrélativement, ce fond ne devrait pas être géré par Bercy mais être considéré comme un fonds privé, à la gestion duquel des représentants de l'État pourraient participer de manière minoritaire et sans capacité de blocage ,le tout sous contrôle la Cour des Comptes.

À une époque où le ras-le-bol fiscal exclut tout nouvel effort des contribuables, où la dette publique explose, où des services publics indispensables ne peuvent plus être convenablement rendus du fait de la rigueur budgétaire et où les fonctionnaires les plus indispensables à la vie en société (policiers, magistrats, enseignants, personnels hospitaliers etc.) sont sous-payés, il est indispensable de trouver les moyens de financer les investissements obligatoires pour créer une société de résilience, le fonds de remédiation est un moyen innovant, facile à mettre en place et dont l'intérêt est plus qu'évident.

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