Divergences européennes : c'est de pire en pire

La Tribune publie chaque jour des extraits issus des analyses diffusées sur Xerfi Canal. Aujourd'hui, les divergences européennes s'accroissent

La reprise conjoncturelle du sud crée l'illusion d'une convergence retrouvée en Europe. Il n'en n'est rien pourtant. Je ne pense pas uniquement à la dimension politique du problème, et à la manifestation si spectaculaire de la divergence des intérêts nationaux que révèle la question migratoire. Je voudrais surligner ici trois facteurs clés qui demeurent au cœur de la divergence des économies européennes.

Productivité, finances publiques et taux d'intérêt réels

Le premier, c'est la productivité. Les pays du sud sont certes repartis d'un point de vue conjoncturel. Il s'agit là d'un effet de rebond mécanique après une purge sans précédent. Mais pour savoir si ce mouvement est pérenne, il faut scruter plus en profondeur les moteurs de long terme de la croissance, au premier rang desquels la productivité. Et là le constat est sans appel. En Italie, en  Grèce, au Portugal, il n'y a toujours pas le moindre souffle de productivité. En Espagne, le rebond qu'avait occasionné le recul du secteur de la construction paraît déjà sur le point de s'étioler. Comment pourrait-il en être autrement d'ailleurs, puisque ces pays ont vu migrer leurs meilleures compétences et qu'ils ont sacrifié plusieurs années d'investissement stratégique.

Le deuxième c'est la puissance de feu budgétaire en cas de prochain choc ou retournement conjoncturel. Or cette puissance de feu contra-cyclique se concentre au cœur et au nord de l'Europe. Les finances de l'Espagne ou de l'Italie sont assainies, mais les marges de manœuvre sont très en-deçà de ce que l'on peut observer au cœur et au nord de l'Europe. Certes, le Portugal et la Grèce sont en fort excédent. Mais dans ces deux pays, l'excédent restera dédié au désendettement. Or la faiblesse du parachute budgétaire dans les récessions participe à l'érosion du potentiel de croissance.

Le troisième facteur de divergence, réside dans les taux d'intérêt. La politique monétaire définit une cote mal taillée pour la plupart des économies. Les pays en proue de la reprise et à faible taux de chômage sont ceux dont l'inflation structurelle se rapproche le plus rapidement de la cible des 2%. Et ce sont ceux aussi qui bénéficient en même temps des plus petits spread sur leur dette et donc des plus faibles taux d'intérêt nominaux. C'est l'inverse qui se produit pour les pays du sud, à très fort taux de chômage. Ces derniers subissent une double peine : des taux d'intérêt nominaux plus élevés, qui intègrent une prime de risque sur la dette souveraine et des taux d'inflation plus faibles. Au total, l'Europe vit sous un régime de divergence des taux d'intérêt réels. Ces derniers pénalisent l'investissement des pays qui en ont le plus besoin, et compliquent la résolution de leur équation budgétaire. A rebours de ce qui favoriserait une convergence, les taux réels freinent relativement la croissance de la périphérie et soutiennent la croissance des pays les plus avancés dans le mouvement de reprise.

Bref, l'Europe vit une convergence en trompe l'œil aujourd'hui. Elle continue à structurellement diverger, ce qui ne manquera pas de fragiliser à nouveau l'euro à terme.

 >> Plus de vidéos sur le site Xerfi Canal, le médiateur du monde économique

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Commentaires 12
à écrit le 18/08/2018 à 6:35
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L'UE n'est qu'une peau de chagrin, elle se vide un peu plus tous les jours. Tous les sacrifices n'auront abouti à rien, le nationalisme et chauvinismes l’emporterons, à la grande joie des nos amis et ennemis. M. Macron, réveillez vous!

à écrit le 12/08/2018 à 10:39
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"Pire en pire" ; bravo pour ce français "sous tenu"

à écrit le 12/08/2018 à 8:15
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Ce serait pire s’il n’y avait pas la zone Euro, puisque en plus des faiblesses conjoncturelles de tel ou tel pays, des cas de mauvaise gestion et les retards structurels, viendrait s’ajouter le manque de représentativité mondiale. Au delà de l’Euro i...

à écrit le 11/08/2018 à 21:13
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«La norme, c'est au contraire le protectionnisme, le patriotisme économique. Il est évident par exemple que si on prenait les États-Unis ou la Chine, jamais ils n'auraient accepté le rachat d'une entreprise stratégique et industrielle du type Alstom....

à écrit le 11/08/2018 à 14:16
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"Construire" en commençant par le toit a moins de chance de tenir debout que sur de solide fondation! Mais les architectes de l'UE non pas voulue construire mais "occuper" les ouvriers!

à écrit le 11/08/2018 à 7:18
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Les coupables sont les elus tricheurs, avec le mandat de leur electorat des profiteurs. Ne rien a reclamer.

à écrit le 10/08/2018 à 14:44
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En mettant notre tête dans le sable, on a toute les chances de voir la vie en rose! Mais on veut construire aux forceps une unité européenne par le biais d'une administration hors sol et d'une monnaie commune qui a pour rôle d'uniformiser toute les n...

à écrit le 10/08/2018 à 14:01
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LE problème est que la compromission entre politiciens européens et hommes d'affaires européens est trop poussée pour arrêter la catastrophe annoncée... -_- " « Le néolibéralisme est une perversion de l’économie dominante » " https://www.alternat...

à écrit le 10/08/2018 à 12:14
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un €uros faible permet a ces pays d'exporter plus et donc de rembourser leur dettes plus facilement ! ce qui compte c'est la stabilité de l'Europe qui permet d'attirer les investissements !

à écrit le 10/08/2018 à 11:10
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La divergence des soldes Targets de la zone s' accroit inexorablement. On se rend compte que l’euro, tel qu’il a été construit, a conduit à une situation impossible à dénouer, épouvantable aussi bien pour les très créditeurs, tels l’Allemagne...

à écrit le 10/08/2018 à 10:47
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Les problèmes monétaires et économiques liés à la monnaie unique sont apparus très tôt et ont été dénoncés depuis une bonne dizaine d'année. La distorsion interne de concurrence crée par l'€ s'est faite sentir depuis le début de l'€ En 2001 la ba...

à écrit le 10/08/2018 à 10:13
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en France tout va bien ! les évenements a venir projettent leur ombre helas sans pouvoir dissimuler les affaires et mensonges

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