Transition écologique dans l’immobilier : quel avenir pour la France ?

OPINION. Alors qu’Emmanuel Macron vient d’être réélu par les Français pour un deuxième mandat présidentiel, ce dernier a apporté un regard critique sur sa politique menée lors des cinq dernières années en matière de rénovation énergétique. Par Mathieu Darras, fondateur de Brickmeup, start-up experte de l'investissement locatif
(Crédits : Reuters)

Alors qu'Emmanuel Macron vient d'être réélu par les Français pour un deuxième mandat présidentiel, ce dernier a apporté un regard critique sur sa politique menée lors des cinq dernières années en matière de rénovation énergétique. Lors d'un discours donné à Aubervilliers le 17 mars, il indiquait que le début de son quinquennat n'avait pas été marqué par des résultats probants, avant de souligner que 650 000 logements avaient tout de même été rénovés au cours de l'année 2021 grâce au dispositif MaPrimeRénov'. Souhaitant poursuivre ses efforts, le Président de la République fixe un nouveau cap pour les cinq ans à venir : 700 000 logements rénovés annuellement. D'après son programme, "certaines rénovations pourront être effectuées sans avance de frais".

Ces objectifs sont à mettre en perspective avec la dernière étude de France Stratégie qui réevaluait le nombre de passoires énergétiques en France à plus de 7 millions. À cela s'ajoutent, les nouvelles directives de la loi climat qui rendront 600 000 logements classés G inlouables dès janvier 2025. Face à ces nouvelles règles, les propriétaires ne tardent pas à réagir comme le constate le site SeLoger avec une hausse de 21% des annonces de biens notés G observée sur un an. Une tendance qui ne semble pas prête de s'arrêter surtout que le même sort sera réservé, en 2028, au 1,2 million de logements classés F, et, en 2034, aux 2,6 millions de logements classés E.

Tous ces efforts n'ont rien d'anodin. Responsable de 44% de l'énergie consommée en France, le bâtiment constitue l'un des principaux leviers de la transition écologique. D'autant que près de la moitié des logements sont actuellement chauffés au gaz ou au fioul, deux sources d'énergie polluantes majoritairement importées, en contradiction avec les objectifs environnementaux du gouvernement.

La mutation du secteur de l'immobilier passe nécessairement par la rénovation énergétique des bâtiments, mais ce n'est pas la seule composante à prendre en compte. Outre les aspects environnementaux, les conséquences sociales des investissements, mais également celles des mesures législatives doivent être prises en compte.

Simplifier les conditions d'attribution des aides aux particuliers

Avant, pour prétendre à des aides telles que MaPrimeRenov' les particuliers n'avaient d'autres choix que de s'adresser à des entreprises labellisées RGE (reconnue garant de l'environnement). Se rendant compte de l'aspect restrictif du système, l'État a depuis assoupli son dispositif avec la mise en place de la "qualification chantier" (source). Bien que plus flexible, ce nouveau label n'en demeure pas moins dissuasif car difficile à obtenir pour une petite entreprise. Le choc de simplification porté par le gouvernement doit impérativement se poursuivre. En ce sens, le législateur a tout intérêt à créer un cahier des charges - ouvert à toutes les entreprises - garant de la qualité des travaux et qui permet aux propriétaires de prétendre aux différentes aides.

Inciter et accompagner les Français dans leurs démarches

Actuellement exigé pour les logements en location ou mis en vente, le DPE doit être rendu obligatoire à l'ensemble du parc immobilier résidentiel. Ce diagnostic, gratuit pour une certaine tranche de la population - moins de 20 000 ou 30 000 € de revenus annuels - et payant pour le reste des citoyens, permettrait de mesurer la performance de tous les bâtiments du territoire d'ici 2025. Pour simplifier sa mise place, la déclaration "DPE" se ferait sur la fiche de taxe foncière.

Cette obligation pour devenir efficace doit s'accompagner de mécanismes de simplification administrative. Depuis quelques années, l'État prend le problème à bras le corps : guichet unique avec France Rénov, mise en place de MonAccompagnateurRénov'. Tout cela va dans le bon sens, mais le processus mérite d'être accentué. Avec un chèque coaching, les Français éloignés des démarches administratives seraient en mesure de faire appel à un tiers indépendant chargé de réaliser le DPE obligatoire, de faire un état des lieux des travaux à réaliser, de sélectionner les entrepreneurs et de prendre en charge les démarches administratives ainsi que le financement. Davantage que le simple appui fourni par MonAccompagnateurRénov', c'est d'un tiers de confiance habilité à réaliser les démarches dont les propriétaires ont besoin.

Une transition écologique qui ne doit pas éluder le social

Le plan de rénovation énergétique annoncé par le Président Macron doit également prendre en compte la dimension sociale. Une grande partie des bâtiments qui nécessitent une réhabilitation se trouvent dans les quartiers populaires. Des secteurs où certaines copropriétés sont parfois en difficulté et pour lesquelles il est impossible d'imposer des investissements en raison de la situation financière de ses propriétaires. Face à ce constat, la mise en place de plans d'assainissement est nécessaire pour atteindre les objectifs fixés par le plan de rénovation énergétique.

En parallèle, il faut que les français puissent participer à la transition écologique et solidaire à la hauteur de leurs moyens. Dans cette optique, les investisseurs particuliers - de plus en plus nombreux et qui bénéficient souvent d'un pouvoir d'achat élevé - doivent nécessairement prendre leur part. Pour les y inciter, il est indispensable de penser à de nouvelles incitations fiscales récompensant les investisseurs vertueux qui amènent leur bien vers des diagnostics énergétiques A, B ou C.

Quatre piliers fondamentaux sont ainsi susceptibles d'encourager la transition écologique dans le secteur de l'immobilier : mesurer (DPE), financer (aides financières), inciter (Mon Accompagnateur Rénov, assouplissement pour les entreprises), contraindre (DPE obligatoire notamment).

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Commentaire 1
à écrit le 20/06/2022 à 11:48
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Encore faudrait-il que les classes des logements soient réellement justes, c'est-à-dire obtenues par des méthodes et compétences vraiment qualifiées et objectives, et non quelques peu erratiques comme l'a montré une récente étude. Comment avoir confi...

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