
En matière de cloud gaming, Blacknut ne se voit ni en concurrent des offres déjà proposées par les opérateurs, comme celles de Bouygues Télécoms, pionnier dans ce domaine, ou d'Orange, ni comme celui des consoles de jeu.
Ce futur service de distribution de jeux vidéo dans le nuage, que la startup rennaise éponyme prévoit de commercialiser entre le deuxième et troisième trimestre 2017, se veut bien plus : une marque multi-écrans avec une approche très éditorialisée.
Distribuée en direct via les TV connectées (Samsung, LG, TCL), les appareils de type Apple TV ou Chromecast, sur internet ou intégrée dans l'offre jeu des opérateurs, la future plate-forme prépare le lancement d'une version Beta au premier trimestre de l'année prochaine.
Blacknut a toutefois déjà testé son marché fin novembre en finalisant une levée de fonds de plus de 600.000 euros sur la plate-forme bretonne de financement participatif GwenneG. Grâce à une trentaine de souscripteurs, le projet a largement dépassé son objectif de 500.000 euros. Un bon signe avant la première levée de capitaux (1M€ environ) qui sera bouclée d'ici à la fin de l'année.
Netflix pour la technologie, Canal+ pour l'éditorialisation
« Notre différence, c'est notre dimension multi-écrans et notre approche éditoriale. Nous utilisons les technologies du cloud et du très haut débit afin de fournir un catalogue de jeux varié, récent et indépendant, à un public large » relève Olivier Avaro, président de Blacknut, société qu'il a co-fondée en janvier 2016 avec Eric Bustarret, devenu directeur technique. Ingénieur spécialiste du codage audio et vidéo et ancien dirigeant de Streamezzo (logiciels pour la téléphonie mobile), un essaimage d'Orange revendu en 2010 à Amdocs, Olivier Avaro connaît la problématique des services OTT. Il est même convaincu qu'après la numérisation de la musique (Spotify, Deezer) et de la vidéo (Netflix), « le jeu vidéo est le dernier média qu'il restait à dématérialiser ».
Blacknut prévoit donc de donner accès, en streaming (sans téléchargement), à un catalogue de 200 jeux au lancement, 1 500 à 1 800 sous 18 mois, et fournira aussi un moteur de recommandation. En cela, la plate-forme se revendique de Netflix, le service américain de vidéos à la demande par abonnement. Elle s'inspire aussi de la Wii pour la démocratisation du jeu, et de Canal + pour l'éditorialisation haut de gamme. À la différence de ses concurrents, au catalogue souvent limité, Blacknut a choisi de s'adresser au grand public.
« Nous ne visons pas le joueur passionné ou « hardcore gamer » car les 25-49 ans sont notre cœur de cible affirme Olivier Avaro. La variété de notre catalogue pourra néanmoins intéresser l'ensemble de la famille. » Pour un abonnement mensuel dont le modèle devrait s'orienter vers une offre unique à moins de 20 € plutôt que vers deux offres ( 9,99 € et 19,99 €), Blacknut proposera aussi des jeux ludo-éducatifs pour les enfants, des jeux de société pour les seniors et même des jeux rétro ou vintage.
Partenariat avec les éditeurs : Shelter II et Toybox Turbo au catalogue
L'ensemble est sourcé et structuré par les deux autres hommes de la start-up, Oscar Barda, surnommé le «Bernard Pivot des jeux vidéo» et Nabil Laredj, ancien d'Electronic Arts et de Gameloft.
Sans publicité, le service qui souhaite constituer un écosystème avec une communauté d'abonnés via une application dédiée, étoffe peu à peu son catalogue en nouant des partenariats avec les éditeurs de jeux. « Nous avons déjà signé des accords avec des éditeurs indépendants prestigieux comme Might&Delight pour des titres à succès comme Shelter II, mais aussi de gros éditeurs comme Codemasters qui nous fournit par exemple Toybox Turbos, un jeu de course très famille se réjouit Olivier Avaro. Blacknut dispose aussi de titres cultes comme Another World. »
Partant du constat que le panier moyen pour le jeu vidéo est plus élevé que pour la série, et que la moitié de la population joue, l'entreprise de 10 personnes mise sur une montée en puissance rapide et vise 500 000 abonnés à 5 ans. Lauréate du concours d'innovation numérique de BPI France en juin dernier, Blacknut est accompagnée depuis ses débuts par le programme Emergys de Rennes Atalante, et installée au sein de l'incubateur de Télécom Bretagne. En 2018, et après une nouvelle levée de fonds, elle compte aborder le marché européen, puis les Etats-Unis et le Canada.
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GwenneG : un soutien de 300.000 euros de la Caisse des dépôts
Une cinquantaine de projets économiques comme Blacknut ont déjà trouvé des financements sur la plate-forme de crowdfunding bretonne GwenneG.
Lancée en 2015, celle-ci a permis aux entreprises de lever plus d'un million d'euros auprès de particuliers mais aussi d'investisseurs. Sa montée en puissance rapide lui vaut d'être soutenue depuis fin novembre par la Caisse des dépôts. Ce soutien financier expérimental se traduit par une souscription d'obligations convertibles à hauteur de 300 000 € qui s'effectue en partenariat avec le Conseil régional de Bretagne. La Région apportera un cofinancement de 100 000 € sous forme d'avances remboursables. Pour GwenneG, qui regroupe plus de 130 dirigeants bretons à son capital, l'objectif est de financer plus de 300 projets économiques à hauteur de 20 M€ cumulés à horizon 2020, avec création ou maintien de plus de 3 000 emplois sur le territoire. P. P.-L.
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