Meteor relance ses brassins avant la réouverture des cafés

La brasserie Meteor s'est adaptée à la fermeture des cafés et restaurants, pendant la crise sanitaire et économique qui a affecté ses réseaux de distribution. L'entreprise alsacienne anticipe au mois de mai le redémarrage de l'activité des CHR.
La brasserie Meteor a vu son chiffre d'affaires reculer d'un tiers en 2020, conséquence de la fermeture des cafés et restaurants.
La brasserie Meteor a vu son chiffre d'affaires reculer d'un tiers en 2020, conséquence de la fermeture des cafés et restaurants. (Crédits : DR)

Sur le marché de la bière dominé en France par Kronenbourg (groupe Carlsberg), Heineken et AB InBev, l'alsacien Meteor témoigne de la résilience dont peuvent encore faire preuve les brasseurs indépendants. Malgré l'externalisation des fonctions support qui n'étaient plus liées à son cœur de métier, l'entreprise de Hochfelden (Bas-Rhin) a conservé ses effectifs (230 salariés) depuis trois décennies. Frappée depuis mars 2020 par une crise sans précédent qui a entraîné la fermeture pendant plus de six mois des cafés, hôtels et restaurants (CHR), Meteor a eu recours à un chômage partiel massif. La brasserie a vu son chiffre d'affaires chuter de 33 %. "Nous avons été touchés de plein fouet parce que notre activité est orientée à plus de 50 % vers les cafés, hôtels et restaurants", explique Michel Haag, président sortant de Meteor, en poste de 1975 à 2021.

L'activité de l'entreprise familiale s'est établie à 43 millions d'euros en 2020 contre 64 millions d'euros en 2019. La production a atteint 350.000 hectolitres en 2020, contre 490.000 hectolitres un an plus tôt. "Notre brasserie a bénéficié d'aides : exonérations de charges sociales, fonds de solidarité, aides sur les frais fixes", détaille Edouard Haag, qui a accédé en février 2021 à la présidence de l'entreprise. A 35 ans, il incarne la huitième génération de dirigeants de cette brasserie dont l'origine remonte à 1640. Pour amortir la crise, Meteor a pioché dans ses réserves. "Notre entreprise est gérée selon un modèle familial rhénan. Les bénéfices ont été réinvestis régulièrement. Les exercices 2017 à 2019 étaient à inscrire parmi nos meilleures années, avec des résultats nets avant impôts avoisinant 2 millions d'euros", calcule Edouard Haag. Incertaine quant à ses besoins en fonds de roulement, la brasserie a souscrit en avril 2020 un prêt garanti par l'Etat (PGE). La trésorerie apportée n'a pas été consommée, et la dette reste maîtrisée avec un ratio de 0,4 entre l'endettement et les fonds propres.

Un marché morcelé, de nouvelles recettes

Sous l'impulsion des brasseries artisanales, qui ont mis en avant des recettes variées telles que les India Pale Ale ou IPA, houblonnées et fortes en goût, ou les bières bio, le marché s'est morcelé. Meteor propose désormais une vingtaine de recettes différentes, contre trois blondes seulement il y a une trentaine d'années (Pils, Ackerand et Export). "Nous investissons chaque année 10 % du chiffre d'affaires dans la modernisation et le renouvellement des installations industrielles. En 2021, nous maintenons un projet d'investissement dans une nouvelle meunerie, parce qu'il faut gérer un nombre croissant de malts différents. Un brassin représente au minimum 300 hectolitres. Nos prochains investissements vont porter sur des tanks plus petits afin de produire des petites séries", annonce Edouard Haag.

Avec 40 % des ventes concentrées en Alsace et en Lorraine, Meteor défend sa carte régionale quitte à surjouer son identité face aux autres indépendants, plus petits, qui se préparent également à la réouverture des CHR. "Notre positionnement est unique dans l'industrie brassicole, loin derrière les trois géants Kronenbourg, Heineken et AB InBev et leurs 85 % de parts de marché, mais devant d'autres brasseries indépendantes régionales telles que Pietra, Jeanlain ou Mont Blanc qui produisent entre 50.000 hectolitres et 100.000 hectolitres par an. Nous avons investi massivement à Hochfelden juste avant la crise : robotisation de la chaîne de conditionnement des fûts, aménagement d'un lieu touristique à la Villa Meteor", rappelle Edouard Haag. "Malgré leurs prix parfois excessifs, les micro-brasseries ont fait du bien au marché de la bière en montrant la noblesse du produit. Elles ont contribué à l'augmentation de la valeur du marché", reconnaît-il.

L'impératif de la gestion des stocks

L'IPA, succès du moment, est produite chez Meteor à base de houblons aromatiques développés spécialement par la filière alsacienne. La brasserie utilise un houblon expérimental, le P14/8, issu du programme de recherche variétal du Comptoir agricole. 700 grammes de cet épice de la bière sont nécessaires, en pellets, pour brasser un hectolitre de bière.

Pour sortir de la crise, l'entreprise doit résoudre la délicate questiond de la gestion des stocks. "Nous avons pu allonger dans certains cas la date de durabilité minimale de trois à six mois tout en garantissant les qualités organoleptiques. Malgré cela, il a fallu détruire le contenu de 30.000 fûts arrivés à leur date limite en avril 2021, et les remplir à nouveau de bière fraîche. Cela représente 9.000 hectolitres à jeter. C'est malheureux car il s'agit de denrées alimentaires, et nous n'avons pas reçu d'aides financières à la destruction", regrette Edouard Haag. "Je me bats pour une ouverture des CHR aussi rapide que possible, dès le mois de mai, même avec un protocole très strict", prévient-il. "Après six à huit mois de léthargie, le secteur aura du mal à se réveiller. Nous nous préparons à cette réouverture en remontant le niveau de nos stocks, mais navigons toujours entre deux écueils : produire trop, au risque de voir nos stocks arriver à péremption, ou ne pas produire assez et nous retrouver cet été en rupture". Le marché de la bière est soumis traditionnellement à une forte saisonnalité, avec un pic de consommation situé entre le mois de mai et le mois d'août.

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Commentaire 1
à écrit le 28/04/2021 à 16:14
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Résilients ou pas, ils devraient se concentrer à faire de la bonne bière. On trouve désormais localement d'excellentes bières qui changent des "bibines" industrielles, markettees, standardisées. Plus chères ? Tant mieux, meilleures, on en boit moins...

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