Trajectoire bas carbone : un lycée construit en bois et en paille en Vendée

Engagée dans un important plan de construction de lycées, la région investit dans une nouvelle génération d’établissements, connectés et durables. Avec la construction en bois et en paille du lycée général et technologique d’Aizenay en Vendée, la filière construction des Pays de la Loire entend faire la démonstration qu’elle est prête à entrer dans une trajectoire bas carbone avec l’utilisation de matériaux biosourcés en circuit court.
La démarche s'inscrit dans la Stratégie Nationale Bas Carbone, qui verra l'entrée en vigueur le 1er janvier prochain de la nouvelle réglementation RE2020.
La démarche s'inscrit dans la Stratégie Nationale Bas Carbone, qui verra l'entrée en vigueur le 1er janvier prochain de la nouvelle réglementation RE2020. (Crédits : CRR Architectures)

« A un moment où le marché de la construction souffre de tensions d'approvisionnement sur les matières premières, on fait la démonstration que l'on peut mettre en œuvre une économie circulaire sans production dédiée. On récolte un coproduit de l'alimentation, qui était considéré comme un déchet, on amène un revenu complémentaire au monde agricole et on sécurise nos approvisionnements en local », boucle Dewi le Breguec, directeur commercial et co-fondateur de la société vendéenne Profibres, fabricant d'isolant végétal décarboné à base de paille. C'est elle qui a produit les 14.000 bottes de paille nécessaires à la construction du lycée général et technologique d'Aizenay en Vendée. Un matériau aux qualités isolantes et acoustiques performantes, proposé par le cabinet CRR Architecture, dont la mise en œuvre a nécessité anticipation et nouvelles méthodes de travail pour la maitrise d'ouvrage.

 La Vendée : une opportunité pour le circuit court

La démarche s'inscrit dans la Stratégie Nationale Bas Carbone, qui verra l'entrée en vigueur le 1er janvier prochain de la nouvelle réglementation RE2020, destinée à réduire l'empreinte carbone des bâtiments neufs et améliorer les performances énergétiques. Dans ce contexte, la région des Pays de la Loire avait imposé d'atteindre un niveau de performance énergétique E3C1 et d'utiliser un maximum de matériaux bio sourcés de niveau 1. Autrement dit, « le donneur d'ordres voulait un bâtiment exemplaire. Au début, il ne devrait être qu'en bois. Mais, lorsque l'on construit du neuf, c'est l'occasion de pousser le curseur vers le bas carbone », souligne l'architecte Jihen Jallouli, du cabinet CRR architectures, qui depuis vingt ans incite au développement durable dans la construction. Cette fois, c'est la paille qu'elle met en avant. « Ici, en Vendée, nous avons l'opportunité d'avoir un territoire riche de nombreux acteurs du BTP engagés sur le développement de produits biosourcés », rappelle-t-elle. L'initiative bénéficie du soutien de l'association pour la promotion du bois Fibois, du cluster du BTP Novabuild, engagé vers la construction durable et s'appuie sur les règles de construction établies par le RCPF (Réseau Français pour la Construction Paille) « Alors, on a dit oui ! », ajoute Pascal Dublaneau, chargé d'opération à la région des Pays de la Loire, pour la construction du lycée d'Aizenay, devenu l'un des bâtiments les plus importants en Europe à utiliser le principe d'une ossature bois et d'une isolation en paille.

 Naissance d'un « collectif biosourcé »

« Le système constructif est intéressant. Il impose beaucoup de préparation et de synchronisation entre les différents corps de métiers sur un chantier qui dure en général 18 à 20 mois et dont l'organisation est toujours un peu tendue...», observe Pascal Dublaneau. Avant l'appel d'offres, il a d'abord fallu sécuriser l'approvisionnement en paille auprès d'une dizaine de producteurs et veiller à ne pas déstabiliser un marché dont la récolte a lieu une fois par an. « Nous avons investi 100.000 euros dans une nouvelle machine pour être capable de produire sur place des bottes de paille respectant une densité de 100kg/m3 et 20% d'humidité. Et nous garantissons l'achat aux producteurs à un coût supérieur de 20% au prix du marché », explique Dewi le Breguec. Si, pour l'essentiel, l'isolation est assurée pour le lycée et les six logements de fonction par quelques 12.000 bottes de pailles, le projet a aussi fait appel à un isolant à base de chanvres fabriqués par le vendéen Biofib Isolation, du béton bas carbone produit par le vendéen Hoofman Green Cement technologies, l'ossature bois fournie par Piveteaubois et les peintures 100% naturelles à base d'algues du breton Algo. La démarche a d'ailleurs donné lieu à la création du collectif biosourcé en cours de constitution.

 Un process de construction novateur

 « Tout faire en biosourcé exige beaucoup d'anticipation », reconnait Thomas Monneau, conducteur de travaux chez Les Charpentiers de l'Atlantique (85), chargé d'assembler paille et bois. Pour ce faire, la mairie d'Aizenay a mis à disposition de l'entreprise un bâtiment pour réaliser un module de construction témoin et valider les choix techniques des parements, des bardages, des raccordements et des coloris. « On ne travaille plus de bas en haut, mais à plat et on relève les murs ensuite », dit-il. « Sur le chantier, la construction n'a plus lieu horizontalement par couches successives mais verticalement par bloc. C'est un important travail d'ordonnancement, de pilotage et de coordination qui permet d'optimiser les plannings d'interventions, et au final, de gagner de deux à quatre mois sur la construction », observe Pascal Dublaneau.

Labellisé E3C1 et certifié HQE bâtiment durable, le bâtiment a obtenu le niveau 3 du label « bâtiment biosourcé » avec 90kg au m² (au lieu de 38kg/m² pour atteindre le niveau 3). En raison de sa construction sur une zone de Radon nécessitant des drains, une couche de gravier et une dalle de béton, le poids carbone du lycée (Voiries et Réseaux Divers compris) atteint 1100 kg/m². Ce qui l'empêche de prétendre au niveau C2. « C'est quand même 35% de mieux que la moyenne des établissements d'enseignements secondaires », observe Jihen Jallouli.

Gain d'énergie et démographie

Financièrement, le budget du projet (incluant un complexe sportif construit de manière traditionnel) atteint 41,3 millions d'euros, soit 10% de plus qu'une construction classique. En revanche, côté énergie, les factures devraient être allégées de 50%. « La conception bioclimatique du bâtiment doit nous permettre de seulement utiliser les chaudières le matin », estime Pascal Dublaneau. Recouvert d'un bardage zinc au Sud et à l'Ouest et d'un bardage bois à l'Est et au Nord, d'une rue intérieure et d'un chauffage mixte bois et gaz, implanté dans un espace paysager où l'on a aussi préservé la biodiversité avec la valorisation d'une mare, de nichoirs... et la plantation de 60 arbres, 350 arbustes, des massifs de vivaces, des prairies naturelles et des haies bocagères, ce lycée, voulu pour être à la fois connecté et proche de la nature, accueillera 630 élèves à la rentrée 2022. Ce sera le troisième des six établissements que la région des Pays de la Loire entend construire dans le cadre de sa stratégie d'investissements des lycées 2018-2024 pour absorber, aussi, la poussée démographique des lycéens.

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Commentaires 3
à écrit le 16/09/2021 à 1:45
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Ils vont pas se ruiner en chauffage, en Vendée il gèle rarement, parfois des hivers sans un jour de gelée. le coup des bottes de paille c'est pas nouveau dans les pays de la loire.

à écrit le 15/09/2021 à 18:08
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en cas d'incendie sauvez vous vous allez griller comme des poulets c'est vraiment de l'inconcience

à écrit le 15/09/2021 à 9:30
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Bravo à eux.

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