Pour l'automobile, l'aéronautique et le BTP, l'impression en 3D, c'est une vieille histoire

Plusieurs secteurs industriels, comme l'automobile et l'aéronautique, sont déjà des utilisateurs convaincus de l'impression 3D depuis une vingtaine d'années, majoritairement pour le prototypage rapide. La médecine et la construction s'y mettent aussi.
Montée sur une grue, une imprimante 3D géante permet de construire une maison. C'est le système Contour Crafting, développé par l'université de Californie du Sud. / DR

Les toutes premières imprimantes 3D remontent au milieu des années 1980. Et certaines entreprises en sont des utilisatrices convaincues depuis une vingtaine d'années. Le fabricant de jouets Mattel s'y est converti en 1992. Il en possède désormais une trentaine et crée certaines pièces de ses jouets, des voitures Hot Wheels aux poupées Monster High. Chez la plupart des constructeurs automobiles de la planète, la modélisation et l'impression 3D sont utilisées depuis la fin des années 1980 pour concevoir les prototypes de pièces. Même Ford, berceau du travail à la chaîne et des grandes séries, est l'un des plus avancés dans l'utilisation de l'impression 3D. Le constructeur américain gagne environ un mois dans la durée de fabrication d'un prototype d'une tête de cylindre. Et il n'exclut pas que les clients, à l'avenir, puissent eux-mêmes imprimer les pièces de remplacement.

« Plutôt que de stocker des pièces rarement utilisées ou de faire attendre leur commande aux clients, les pièces pourraient être imprimées à la demande. Un mécanicien pourrait avoir une imprimante 3D dans son véhicule ou son garage », observe Duncan Stewart chez Deloitte. « Il y a deux ans, nous disions qu'une clé à molette imprimée en 3D était moins solide qu'une traditionnelle en acier forgé. Ce n'est plus le cas aujourd'hui », observe-t-il. Le champ des matériaux utilisés, qui demeure restreint (plastique, céramique, sable de silice, acier, bronze, verre), s'élargit à des catégories très résistantes : bientôt du titane, de l'aluminium, du carbure de tungstène, du magnésium.

Idéale pour les petites pièces en faibles séries

L'impression 3D est très adaptée à ce qui peut être produit en petite série, dans un seul matériau. L'industrie aéronautique y a recours pour certaines pièces de carénage ou des faisceaux de câbles : en faisant l'économie de tout le processus de moulage, le coût de revient est mineur. « Nous en sommes aux tout débuts. Nous produisons de petites pièces. À l'avenir, ce sera certains composants, mais pas une aile entière ou un avion entier », explique-t-on chez Airbus. Autre secteur pionnier, le médical, pour toutes sortes de prothèses, implants chirurgicaux, hanches artificielles, appareils dentaires et auditifs, qui sont ainsi personnalisés pour plus de confort. Ce marché des équipements médicaux imprimés pèserait plusieurs dizaines de millions de dollars. La joaillerie serait aussi déjà une grande utilisatrice du procédé, pas seulement pour le prototypage. La mode aussi commence à s'y mettre.

Au-delà de 10 unités, pour un industriel, ce n'est généralement plus rentable, il faut basculer sur la production de masse. Car l'impression 3D reste un processus un peu... laborieux : parfois une à deux minutes par couche, soit plusieurs heures pour un objet, ou plusieurs jours s'il est très volumineux. L'expert de Deloitte prédit que « la technologie va rester cantonnée aux pièces détachées ». « Même dans ce domaine, nous estimons le chiffre d'affaires réel des articles imprimés en 3D à moins de 10 millions de dollars, sur un marché de plusieurs milliards. »

« La voiture la plus verte de la Terre » et des maisons sur Mars !

Il reste la production de niche. Un inventeur, Jim Kor, travaille à la fabrication d'une voiture entièrement imprimée en 3D, qui sera « la voiture la plus verte de la Terre » : l'Urbee 2, dont la carrosserie est « aussi solide que l'acier mais deux fois plus légère », donc moins gourmande en carburant. Le moteur reste un élément trop complexe pour être imprimé à ce stade.

À l'université de Californie du Sud (USC), le professeur d'ingénierie Behrokh Khoshnevis a mis au point, à l'issue de dix ans de travaux, une technologie de construction automatisée, baptisée Contour Crafting, utilisant une forme de béton renforcé imprimé en 3D : couche par couche, par de grands mouvements d'allers-retours, une grue bâtit en une seule opération, sans main-d'oeuvre, un mur ou même une maison en moins de 24 heures ! Caterpillar a injecté des fonds dans le projet et Bouygues Construction va se rendre sur place pour étudier ce procédé révolutionnaire. Contour Crafting l'a surtout imaginé pour les pays émergents ou les zones ravagées par une catastrophe, mais... elle se voit même construire des habitations sur la Lune et sur Mars !

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Pionniers, start-up et rachats à tout-va...
Le rachat par Stratasys de MakerBot, qui a fait la une des médias à la fin juin, est révélateur de l'évolution de ce marché encore naissant de l'impression 3D. Fondé en 1989 par l'inventeur de la technologie par dépôt de fil (FDM), Stratasys, installé à Minneapolis, est l'un des pionniers et le leader mondial du marché. Elle s'offre la success-story de l'imprimante grand public pour 400 millions de dollars : MakerBot, start-up de Brooklyn, a écoulé 22 000 exemplaires de sa machine Replicator (vendue 2 200 dollars), et sa plate-forme de partage de fichiers de modèles 3D Thingiverse génère 1 million de téléchargements par mois.
Stratasys, qui avait déjà fusionné fin 2012 avec le numéro deux du marché, l'israélien Objet, emploie 1 100 personnes et pèse 3,2 milliards de dollars au Nasdaq pour seulement 430 millions de CA. En face, un autre poids lourd : 3D Systems, dont le fondateur, Chuck Hull, a inventé la stéréolithographie et la première imprimante 3D en 1986. L'entreprise, dont la valorisation a triplé en deux ans à 4,1 milliards d'euros, a racheté à la mi-juin le français Phenix Systems, basé à Riom, pour 15 millions d'euros, spécialiste du frittage laser de poudres fines. 3D Systems s'est diversifié dans le segment en plein essor du grand public avec sa gamme Cube. En face, des milliers de start-up, comme Formlabs, dans laquelle Xavier Niel, le fondateur de Free, a investi via son fonds Kima Ventures, Beehive, Buccaneer, etc, sans oublier l'initiative RepRap, qui vise à créer une imprimante 3D autoréplicable et open source...

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Commentaires 3
à écrit le 09/08/2013 à 12:01
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pour la construction de maison...... impressionnant.... à valider mais...... si c'est le cas.... ce serait une révolution dans le bâtiment...

à écrit le 10/07/2013 à 21:06
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Il faudrait quand même dire que la qualité des pièces fabriquées par extrusion sur les imprimantes grand public est désastreuse. Et que le frittage coûte très très cher et prend beaucoup de temps. Quant à l'imprimante à béton, j'attends la première m...

à écrit le 10/07/2013 à 15:09
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Pour le titane, cela existe déjà !

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