La nouvelle constitue une gifle pour la Ligue, et fera, sans nul doute, grincer des dents chez les détracteurs du modèle économique de Mediapro. Le groupe sino-espagnol a envoyé une bombe, ce jeudi, en affirmant qu'il souhaitait rediscuter le montant de ses droits pour l'exercice 2020-2021. Dans un entretien à L'Equipe, Jaume Roures, le patron de Mediapro, a indiqué qu'il voulait « renégocier le contrat de cette saison » avec la Ligue de football professionnel (LFP). Pour rappel, le nouveau et principal diffuseur du foot français s'est engagé, au printemps 2018, à payer 814 millions d'euros par an pour la L1 et la L2. Mais la crise du coronavirus le pousse à revoir ses obligations. « Le contrat a été établi dans des conditions qui n'ont rien à voir avec la situation actuelle, argue Jaume Roures. C'est évident. Il faut en parler. »
Mais ce n'est pas tout. Toujours selon L'Equipe, Mediapro, qui s'est allié avec la marque Téléfoot de TF1, n'a pas réglé une échéance de 172 millions d'euros prévue le 6 octobre à la LFP. Mais La Ligue, qui doit reverser ce montant aux clubs le 17 octobre, a refusé. Jaume Roures, lui, affirme qu'aucun chèque ne sera signé d'ici là. « C'est évident que le 17 octobre, on n'aura pas trouvé un accord », affirme-t-il.
Absence de garantie bancaire
La crise du coronavirus explique forcément certaines difficultés de Mediapro. Jaume Roures en convient, même s'il refuse de lever le voile sur son nombre d'abonnés. A ce niveau-là, « c'est tiède, dit-il. La situation est plus compliquée qu'on ne l'imaginait il y a deux ans, quand on a acquis les droits. » Cependant, personne n'oublie que Mediapro a acquis la majeure partie des droits du foot français pour un montant jugé astronomique. Le groupe sino-espagnol a, à l'époque, balayé Canal+, pourtant diffuseur historique du foot français, qui s'est retrouvé bredouille. Maxime Saada, le DG de la chaîne cryptée, avait largement dénoncé le prix payé par Mediapro. Il estimait que le modèle économique de son rival ne tenait pas la route et qu'il avait eu les yeux plus gros que le ventre. Il faut dire que le pari de Mediapro est grand : avec un prix à l'abonnement de 25 euros par mois, il lui faut 3,5 millions de fidèles pour être à l'équilibre.
L'affaire pourrait s'envenimer. Spécialiste des droits du football, Pierre Maes estimait l'an dernier, dans Le Parisien, que le risque était grand que Mediapro « plante » la Ligue. Le problème est que la LFP n'a pas demandé de garantie bancaire au groupe sino-espagnol. « La Ligue a estimé qu'une garantie bancaire pour un tel montant, ça n'existait pas, et s'est contentée de la garantie de l'actionnaire », précisait Pierre Maes. Pourtant, avant l'appel d'offres français, Mediapro s'est fait retoqué une offre faramineuse de plus d'un milliard d'euros sur les droits du foot italien faute, justement, d'offrir une garantie bancaire.
Dans ce contexte, si les relations entre Mediapro et la LFP devaient se dégrader, la question de la responsabilité de la Ligue va inévitablement se poser. A-t-elle été grisée par le montant record mis sur la table par Mediapro au point de ne prendre aucune précaution ? Si aucun terrain d'entente n'était trouvé entre Mediapro et la LFP, Canal et Bein Sports pourraient-ils, après coup, récupérer les droits à prix cassé, avec des conséquences forcément lourdes pour les clubs ? Les prochaines semaines s'annoncent cruciales pour le foot français et son économie.
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