La e-santé recueille les faveurs de la majorité des Français. Ils sont 7 sur 10 à juger qu'elle représente un moyen efficace pour améliorer le système de santé, d'après une enquête du cabinet Deloitte et de l'Ifop intitulée "Les Français face au tournant de la e-santé", publiée mardi 24 mai et menée auprès de 1745 personnes.
Les GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon etc.) font partie des principaux acteurs plébiscités, notamment dans les domaines de la prévention et de l'éducation dans la santé. Ainsi, 59% des Français font confiance à ces acteurs technologiques et 58% les jugent légitimes.
"Les GAFA sont rentrés dans une relation de proximité avec les individus"
"Les Gafa sont légitimés par les Français", assure à La Tribune Jean-François Poletti, associé Conseil Santé Assurances et mutuelles chez Deloitte. Et les jeunes sont les plus enthousiastes, puisqu'ils sont 68% à trouver les nouveaux acteurs technologiques légitimes dans la prévention. "Les 18-25 ans mettent les GAFA au même niveau que les assureurs complémentaires et les mutuelles", ajoute-t-il.
Selon lui, "les GAFA sont rentrés dans une relation de proximité avec les individus". "Aujourd'hui, le smartphone qui représente leur support principal est dans toutes les poches. La digitalisation fait partie du quotidien dans la plupart des domaines et s'y est installée par l'usage."
Les GAFA, de l'assurance santé aux trackers d'activité
Les GAFA ont multiplié les initiatives dans la e-santé et le bien-être ces dernières années. On peut énumérer:
- Le lancement du ResearchKit d'Apple en 2015. Les patients qui le souhaitent rendent leurs données accessibles à des chercheurs. Pour Guillaume Marchand, président de DMD Santé, startup qui propose une approche collaborative de l'évaluation des applications mobiles, cela pourrait faire progresser la recherche médicale et responsabiliser les patients.
- L'entrée de Google dans l'Assurance santé aux Etats-Unis, l'année dernière, avec un investissement de plus de 30 millions de dollars dans la startup Oscar Health, startup qui s'est fait connaître en distribuant des bracelets connectés à ses adhérents. Ces derniers touchaient de l'argent s'ils atteignaient certains objectifs d'activité physique.
- Le rachat par Facebook de l'application Moves dédiée aux trackers d'activité, dont l'ouverture des données au réseau social a suscité un début de polémique.
- L'alliance de Google avec Novartis pour développer des lentilles de contact intelligentes censées détecter le taux de glycémie des diabétiques.
Les GAFA, concurrents de l'Etat ?
Mais la montée en puissance des GAFA dans la santé suscite des inquiétudes, notamment du côté du Conseil national du numérique. Un rapport de l'institution estimait que "de grandes entreprises commencent ainsi à proposer des services équivalents voire concurrents aux services publics". Le document citait notamment les carnets de santé électroniques, comme le Health Kit d'Apple, ou encore le Google Health (abandonné en 2013) qui se développent en parallèle du Dossier Médical Personnel (DMP).
Encore à la tête de l'institution en novembre 2015, Benoît Thieulin expliquait à La Tribune :
"Dans la santé, face à ces grands acteurs numériques, les pouvoirs publics sont pour ainsi dire menacés d'obsolescence, que ce soit dans leur capacité à encadrer le marché pour l'intérêt général ou encore à fournir des services publics performants et garants d'égalité."
Mais selon lui, impossible d'avancer sans ces acteurs : "En matière de santé, il est de plus en plus visible que l'Etat ne peut agir seul, et qu'il doit désormais s'appuyer sur un vaste réseau d'acteurs -- publics/privés, professionnels/non professionnels, soignants/aidants -- pour répondre efficacement aux enjeux de santé publique."
Inquiétude sur les données santé
Interrogé par La Tribune, Christian Saout, président du Collectif interassociatif sur la santé pointe des doutes également sur la présence accrue des GAFA dans la santé. Il souligne "que cela peut être inquiétant pour le citoyen car le métier des GAFA réside essentiellement dans le traitement des données".
Il estime que dans le futur, "les assureurs pourraient s'associer avec les GAFA pour acheter des données santé et sélectionner ensuite leur clientèle en fonction de leur teneur". "Il n'y aucun pare-feu" conclut-il.
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