Internet à très haut débit : la grogne des collectivités

Plusieurs associations de collectivités ont à dent dure vis-à-vis du gouvernement. Elles reprochent à l'exécutif de forcer les collectivités à se tourner vers le privé pour déployer leurs réseaux de fibre et économiser, ainsi, de l'argent public.
Pierre Manière
Dans le cadre du Plan France Très haut débit, le gouvernement veut apporter, essentiellement via le déploiement de la fibre, un Internet ultra-rapide à tous les Français à l'horizon 2022.
Dans le cadre du Plan France Très haut débit, le gouvernement veut apporter, essentiellement via le déploiement de la fibre, un Internet ultra-rapide à tous les Français à l'horizon 2022. (Crédits : Alessandro Bianchi)

C'est un sacré coup de sang. Dans un communiqué publié jeudi dernier, les associations de collectivités râlent contre le gouvernement concernant le déploiement des réseaux de fibre dans les territoires les moins denses de l'Hexagone. L'Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l'audiovisuel (Avicca), l'Association régions de France (ARF), l'Association département de France (ADF) et l'association France urbaine reprochent en particulier à l'exécutif de forcer les collectivités à se tourner vers le privé pour déployer leurs réseaux de fibre.

Concrètement, le gouvernement a lancé il y a plus d'un an un nouveau dispositif : les Appels à manifestation d'engagement locaux (Amel). Celui-ci permet aux collectivités de se tourner vers les opérateurs privés désireux de bâtir leurs réseaux de fibre, lorsqu'ils les jugent rentables. En parallèle, le gouvernement a suspendu un autre dispositif, le guichet France Très haut débit, qui permet aux collectivités de faire des demandes de subventions pour déployer leurs propres réseaux fibrés, appelés Réseaux d'initiative publique (RIP).

« Le choix entre un Amel et un Amel »

Les associations de collectivité sont depuis des mois remontées contre cette suspension qui les obligent, regrettent-elles, à se tourner vers les Amel.

« Bon nombre de collectivités qui ont fait le choix des RIP ne peuvent toujours pas accéder aux financements promis par l'État depuis 2017, fustigent-elles dans leur communiqué. Elles sont entravées aujourd'hui dans la poursuite de leurs projets. L'État répète à longueur de temps que les collectivités ont le choix. Les associations les représentant confirment hélas ce qu'elles disent depuis plus d'un an : elles n'ont le choix qu'entre un Amel et un Amel. »

Or les collectivités ont la dent dure contre ce dispositif, sur lequel l'Etat compte pour économiser des deniers publics - puisque dans ce cas, les réseaux sont entièrement financés par le secteur privé.

« Quant aux Amel, qui étaient censés faire faire des économies d'argent public et accélérer les déploiements FttH [fibre jusqu'à l'abonné, NDLR], les territoires concernés sont aujourd'hui dans l'expectative, poursuit le communiqué. Le Premier ministre, qui devait valider les premiers AMEL au début de l'été 2018, n'en a encore signé aucun. Pire, seuls deux avis - assortis de nombreuses réserves - ont été rendus par l'Arcep [le régulateur des télécoms, NDLR] sur les sept Amel officiellement recensés. Les collectivités qui ont positivement répondu pour certaines depuis huit mois se voient abandonnées en rase campagne - sans que l'on sache précisément ce qui bloque - sans calendrier ni perspectives. »

Menace de ne plus siéger à un comité

En conséquence, les associations de collectivités « demandent que dans un court délai, l'Etat annonce un calendrier engageant de réouverture du guichet France THD à court terme d'une part, et d'autre part l'arrêt immédiat de la promotion active du dispositif des Amel tant que le Premier Ministre n'aura pas exprimé sa décision s'agissant des sept premiers dossiers en souffrance ». Elles craignent que si la situation reste comme telle, de nombreux territoires se retrouveront sans Internet à très haut débit d'ici à 2022. Ce qui sonnerait l'échec de l'objectif du gouvernement d'apporter à cette date une connexion ultra-rapide à tous les Français.

Pour arriver à leurs fins, les associations des collectivités menacent de quitter le Comité de concertation France Très haut débit (CCFTHD), auquel les associations siègent avec des représentants de l'Etat pour étudier les projets de réseaux de fibre des collectivités. « L'esprit de ce comité n'y est plus », indique à La Tribune un cadre de l'Avicca, qui estime que les associations n'ont plus d'intérêt à en faire partie si l'exécutif ne veut plus prendre en compte leurs positions.

Pierre Manière

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